On arrive au Cap Vert. En pleine après-midi, en plein contre jour, les massifs montagneux des îles se dressent devant nous, découpant dans le ciel azur des ombres noires et imposantes. C'est majestueux. Les îles sont longues, grandes, il y en plein, Boa Vista, Sal, Sao Nicolau, et la nôtre, Sao Vincente. Nous arrivons dans la marina, sur un plan d'eau large, enclavé dans une petite baie, derrière laquelle trône une montagne. Lorsque l'on regarde vers la mer, on voit une île et ses cîmes en face, le soleil se couche sur son dos, et l'île devient toute noire, alors qu'il fait encore jour, on dirait qu'elle meurt, dans un ciel tout rose et jaune.
Mindelo, la ville qui nous accueille, a des airs d'Ushuaïa. Comme là-bas, les bâtisses descendent doucement dans l'eau, surplombées par la montagne, s'y moulant dans une architecture gaie et colorée de maisons et d'immeubles bas, de pas plus de deux ou trois étages chacuns. Les bateaux de la marina rivalisent d'originalité, de beauté ou d'élégance, tel ce 96 pied, Lezard of Cornwall, battant pavillon espagnol, qui est arrivé ce matin. Il est sur mon spot, mon ponton, le premier en partant de la mer, le dernier en partant de la terre, toujours désert. Je me pose au bout avec ma bouteille d'eau, mes cloppes et ma gratte, et je glande en regardant le mouillage au devant danser devant moi, avec le soleil et les jolis reliefs de la belle île d'en face, et depuis ce matin, en regardant Lezard of Cornwall, et en le mitraillant de photos. Il est gros, tellement gros, 96 pieds, ça fait presque trentre mètres. Le propriétaire est très secret, l'équipage refuse d'en parler, le 26 ils appareillent pour traverser jusqu'au Bresil, ils mettront 6 jours!!!! Demain soir je monte à bord avec ma gratte, Michel le skippeur belge me fait faire le tour du propriétaire en échange d'un plat pays qui est le mien, je vais poser plein de petites questions, un régal...
Je suis toujours en crise, je n'en peux plus de voyager, de bouger, de m'attacher, de me séparer, et j'ai peur d'aller chanter, j'ai pas envie. J'ai envie de voir mon Papa et ma Maman, mes copines, mes copains, mes Chayrigues, mes frères, ma soeur, mon Saint-Cloud, mon 16ème, mes des Georges, ma Parmentier, ma Boulette, j'ai envie de me poser, de me reposer, de dormir pendant une semaine, de rire, de pleurer, de prendre un bain, d'enregistrer des chansons, de manger du saucisson, de changer de stock de fringues, j'ai envie d'avoir froid et de mettre un manteau.
Je profite quand même et passe d'agréables moments, mais quand je vois des photos de vous sur facebook, je pleure de joie, quand je vous ai au téléphone, je pleure de joie, je suis en manque, c'est clair et net...
Je pense que tout se résorbera quand j'irai chanter, encore faut-il que je trouve la motivation, pour le moment, je ne veux que contempler, jouer, cuisiner, et écrire. Mais ça ne m'épanouit pas, il faut que je me fasse vibrer, sinon je me prends le chou. Il faut que j'oublie tout ce qui me passe par la tête en faisant quelque chose de bien disjoncté comme chanter dans la rue. C'est puissant, ça lave tout.