lundi 23 novembre 2009

Mindelo live

Ca fait deux jours que je dis que j'y vais. Ca fait deux jours que je refuse devant l'obstacle. Deux jours que je dis, aujourd'hui je ne fais rien, ce soir je chante, deux soirs que je n'y vais pas. Je n'ai pas envie. J'en ai marre. Mais bon ce soir j'y suis allée quand même. Toute seule, comme un grande, j'ai roulé mon charriot, installé mon matos. Je déplie le pied de micro, je l'installe, je déplie le tabouret, je mets le pupitre, je prend la batterie de voiture, je la déplace, je me nique le dos, je prends l'adaptateur, j'accroche les crocos a moins noir et plus rouge, je branche la prise multiple, je branche l'ampli, je branche le jamman, je branche le micro, je branche la guitare, je baisse tous les niveaux, j'allume le courant en priant pour qu'il n'y ait pas de couille, il n'y a pas de couille, je monte le volume, le niveau de la gratte, du micro, de la boucle, je fais un essai en bouclant un refrain, je me lève, je vais à l'autre bout de la place pour voir si on m'entend haut et clair, j'ajuste en fonction, je me rassois, je mets ma boite à côté de moi, je la dégainerai à la fin de la première chanson. Je chante, je danse, je fais des galipettes, je salue, je remercie, je débranche tout, je range tout, je prends le charriot, je remets la batterie dessus, je me nique le dos, je pose l'ampli par dessus, puis je cale le tabouret, le pupitre, je sangle, je mets le jamman dans la gratte, les jacks dans mon sac à dos, je prends la guitare sur le dos, le sac à dos sur le ventre et le pied de micro dans la main, et je m'en vais, sous les vivas, les hourras, les applaudissements, les petites culottes qui volent, les bouquets de roses qui pleuvent, le champagne qui ruisselle!
C'est d'un banal.

A Mindelo, ils aiment la musique. J'avais même pas fini l'intro de la première chanson qu' ils tapaient déjà dans les mains. Je me suis installée sur la Praça Nova, une place centrale, avec des petites fontaines, des arbres et de jolies lumières. Je me suis renseignée, l'heure de pointe c'est 19h30. Je commence à 19h30. Il y a des enfants, des jeunes, des vieux, que des capverdiens, pas de touristes. Je fais mon petit speech en portugais, ils me comprennent, réagissent bien à propos de la boîte qu'ils applaudissent d'ailleurs, ce que j'approuve et apprécie énormément, bravo la boîte, bravo bravo bravo! J'adore qu'on applaudisse la boîte. Si la boïte pouvait faire la révérence et envoyer des baisers à la volée, elle le ferait! A toutes les chansons, dès que je passe de l'arpège au petit ryhthme bossa, ils tapent dans leurs mains, se mettent à danser, c'est idéal, incroyable...Je le leurs dis d'ailleurs, ils sont trop chouettes de participer autant, et ils s'applaudissent, les capverdiens adorent taper dans leurs mains! ça fait plaisir, labes. Ils mettent de l'argent, c'est trop cool, tout va comme sur des roulettes. Mais je m'emmerde un peu. J'en ai marre. J'en ai marre de chanter les mêmes chansons, de faire les mêmes accords, les mêmes rythmes, j'en peux plus, je vomis Brel, Dylan, Denver, Young, J'en ai ma claque, je me fais chier. Il y a du bonheur, mais il n' est pas excitant, c'est bien mais c'est pas top. Je remballe tout, je vais au club nautique, je compte, il y a 2700 escudos ce qui fait 27 euros, 7 dollars, et 5 euros. C'est plus que cool, mais ça ne m'excite pas. Ca me saoule. Je m'ennuie.

Ce qui est bien avec l'ennui, c'est que c'est excitant. Parce que c'est créatif. Tout être normalement constitué, quand il souffre d'un ennui mortel, se creuse les méninges pour trouver comment s'amuser. Ou alors il sort son larfeuille, c'est au choix. Moi je m'ennuie parce que je chante toujours les mêmes chansons, et en plus c'est pas les miennes. Qaund on m'applaudit, c'est aussi Brel, Dylan, Young et Denver qu'on applaudit, ça n'est pas que moi, et ça, ça n'est pas supportable. C'est intolérable. Alors, alors... Et bien sans m'en rendre compte, étant donné que je n'ai pas le courage de chanter les bouses que j'ai faites avant, petit à petit, je me mets à fabriquer d'autres bouses, un peu moins malodorantes, et pour qu'on puisse sentir ces bouses, les percevoir, je les fais anglaises. Sauf que, mon anglais est fluent, mais limité, je n'ai pas de mal à trouver les paroles du refrain ou des premières phrases, mais après je cale lamentablement. Je mets donc du temps à faire sortir les bouses de moi, à bouser quoi. Je bouse mou. Et en plus, cerise, mouche sur la bouse, je n'ai pas d'endroit privé pour bouser, et poser mes bouses. Je n'ai pas de chez moi, de studio ou de salle de répète pour pouvoir graver mes bouses, les affiner, les travailler, pour en faire de belles bouses, bien nettes, bien propres. Je n'ai nulle part où bouser. Je suis bloquée. Je suis libre, mais bloquée.

Quand j'arrive au Brésil, première chose que je fais, je prends un chez moi, direct, avec une porte qu'on peut fermer, et une prise de courant, et je bouse, tant et plus, à tout va, je m'enferme pendant 15 jours et quand je ressors, je chante que du moi. Ou une fois sur deux.

Mais quand, quand, quand vais-je enfin arriver au Brésil???!!! J'en peux plus!

Elle est énervante hein, elle se tape une méga croisière sur des gros voiliers, elle passe par plein d'endroits différents, elle voit du monde, du pays, de l'eau, elle fait de la musique, elle se bronze toute la journée, et elle trouve encore le moyen de se plaindre...ç't'agaçant!