Aujourd'hui, j'ai eu la preuve par A+B que quand on veut réussir dans la musique, il faut y aller au culot, et pas autrement. Ce matin, je me réveille, il pleut des cordes. Mais je dois aller chercher ma batterie qui pèse dix tonnes, à la marina de Funchal où les tchèques et les suisses viennent enfin d'arriver. Nous nous préparons à partir avec Pedro, et il me demande si je prends mon chariot de romano. Je lui dis que non, il pleut trop, je vais trouver nulle part où chanter, tu penses que je devrais le prendre? Oui, on sait jamais... Ok. Dans la voiture je réfléchis, et je dis à Pedro: "Je sais, je vais aller au Dolce Vita center, je vais me poser en vitesse et attendre qu'ils me virent, ça se trouve ils aimeront tellement qu'ils auront pas le courage de me mettre dehors..." "why not crazy french girl? You're a kamikaze singer!" "Yes! exactly!". Il me dépose à la marina, j'arrive avec des croissants chauds plein les bras pour les suisses et les tchèques, mais c'est toujours la déprime chez les tchèques, ils n'ont que de très minces chances de trouver un job, morte-saison oblige, et la marina veut qu'ils payent d'avance, ce qui leur est complètement impossible... Les croissants apportent un peu de réconfort, et la vision de mulet surchargé que je donne une fois tout mon bardas sur le dos et sur le charriot leur fait venir un petit peu de sourire. Je pars, traînant un ampli, un guitare, un tabouret, une batterie de 10-15kg, un pied de micro, un micro, un jamman, un sac a dos, un pupitre... te motz! Ok, I come back with big money, see you tonight! Et hop, en rou
J'arrive, suant, transpirant, je vais au rez-de-chaussée, et commence à m'installer, tranquilou bilou, comme si de rien était.... J'étais sur le point de dégainer ma gratte, d'armer le jamman et de tirer ma première chanson quand une hotesse vient me voir, tout sourire (conversation en portugol que je vous retransmets en français):
- Je peux vous demander ce que vous faites?
- Je vais chanter!
- Vous avez une autorisation?
- Oui, j'ai télephoné à la mairie, ils m'ont dit que je pouvais faire ce que je veux, ou je veux, j'ai un visa de 3 mois (serial baratineuse!!).
- Oui mais vous avez une autorisation d'ici, du centre commercial?
- Non, mais je suis disponible quand vous voulez pour parler avec le directeur...
- Ne bougez pas, je vais le chercher.
Il faut savoir que le dirlo en question, je connaissais son nom, Roberto Xavier, je m'étais rencardée et je lui avait envoyé un mail avec du son, des vidéos, je n'avais eu aucune nouvelle. J'avais repéré un piano bar au centre du centre, où je m'étais dit que je pourrais trôner dans toute ma splendeur....mais rien. Là j'étais bien contente, le dirlo allait venir, tout ce que j'éspérais c'était le rencontrer, c'était de bon augure...
Roberto Xavier arrive.
- Bonjour...
- Bonjour, vous êtes Roberto Xavier!
- Oui. (la surpirse du type quand il voit que je connais son nom...!). Qu'est ce que vous faites là?
- Je vais chanter!
- Mais vous ne pouvez pas, il vous faut une autorisation.
- Très bien, alors je vous demande officiellement l'autorisation, vous acceptez?
- Mais ça ne se fait pas comme ça, il faut prendre rendez-vous, vous écouter.
- Vous pouvez m'écouter ici, je suis prête, il me reste juste à brancher la guitare...
- Non, ici c'est pas possible, et vous ne pouvez pas venir comme ça, vous installer et demander de l'argent, ça ne se fait pas.
- Oui mais vous co
Il hésite...
- Ecoutez Mr Xavier, je sais que normalement il faut des autorisations, des papiers, mais moi je suis une artiste, je parle avec mon coeur, et j'agis par instinct, de temps en temps, il faut oublier l'administratif, et privilégier le côté humain, vous ne pensez pas?
- Ok ok, mais il ne faut pas que tu chantes ici, vas t'installer là haut au piano bar, et on va voir ce que ça donne.
- Merci Merci merci, j'y vais tout de suite!
Le piano bar! J'en rêvais, Roberto l'a fait! Je replie, je remonte, je re-déballe et commence aussitôt, j'ai une permission d'une heure, je vais faire tout ce que je connais de mieux, et par
coeur. Je chante liberta, je la conduis les yeux fermés même avec dix verres de pastis dans le pif, ç
Je termine, et l'hôtesse vient me voir:
- Le directeur va arriver, il voudrait vous parler.
- Nice, vous avez aimé?
- Sim, muito bom!
- Et la gente?
- Tambem, tambem, e o director tambem.
Je range, le directeur arrive.
- Je peux vous parler, vous voulez aller prendre un café?
- Oui, mais d'abord je dois ranger...
- ne vous pressez pas, je vous attends.
Pardon? Le directeur m'attend??? Je crois rêver, je flotte sur un petit nuage d'égo surdimensionné...
Je range, le directeur m'emmène à une table du piano bar.
- What is your name?
- Anna.
- Well Anna, it was very nice, the people liked it, the staff told me you were very good, and the first songs I saw were really nice, I'm sorry I had to leave after...
Mais ne t'en fais pas mon mignon, tu es tout pardonné, tu aurais pu rester jusqu'au bout, me lancer des fleurs et venir me baiser la main a ma sortie de scène, mais je ne vais pas t'en vouloir parce que tu as d'autres priorités que ma petite personne, on a tous des devoirs...
-No problem, I understand.
- Ok, we have a pianist that comes usually, but I like what you do, it's good, the people like it, you can talk to them, it's nice. I would like you to sing twice a week for a start, how long are you here in madeira?
- I don't know, I am looking for a boat to go to brazil, so some of them are living on the 17th, so at least, 2 weeks.
- Ok, but even for 2 weeks it would be nice. The only problem I have is that you have no official working paper, and no receipt to give me when I give you the money, so is there some things you need?
- I don't know, for now I have food and shelter, but maybe I will have to move, if you know a place I can stay..
- Maybe we can pay you the hotel for two weeks, and give you free access to the supermarket, but I will have to talk to the big boss first
- Ok, and also, I have two tchek friends, they need a job for two or three months, it would be nice if you could do something for them.
- I will talk to the boss, I can't promess you anything because I don't like to promess without being sur I can give, but I'll see what I can do, because I really like your singing.
- Ok, and also, I also need to go to Brazil on a sailing boat, so if you have any idea how to help me with that... So I just repeat everything I need, I would like food and shelter, jobs for the tchek people, or boat to brazil, if you can give to me any of that, I will sing for you anytime you want.
- Ok, I will talk to the boss on tuesday, and then I call you, give me your phone number, and take mine.
On échange les numéros, franche poignée de main, je ne vous ai pas tout retranscrit mais entre temps je lui ai raconté mon histoire, celle des thcèques, ça l'a étonné et beaucoup intéressé, et il m'a dit que c'était important pour lui de donner des opportunités aux gens comme nous, les gens du voyage quoi...
Je vais sur internet, puis rejoint la bande des crazy people au café de la marina, je leur raconte tout dans les détails, ils sont morts de rire, crazy, crazy french girl, everyday something crazier, thank you for asking the jobs, oh lala, qu'est ce qu'on s'aime!
Soudain, une française que je ne connaissais pas débarque à notre table et nous fait coucou en disant: "c'est l'heure de l'apéro?", et aprés elle part à la douche. Moi je ne perds toujours pas le nord, je demnde si elle a un bon voilier, et où elle va. Le suisse me dit, shit I forgot to tell you, she knows two young men that are going to brazil and they are lokking for someone to go with them. Je détale pour la rattrapper avant qu'elle n'aille se laver, s'il vous plait! Je suis française comme vous, et je voudrais savoir comment contacter le bateau que vous avez rencontré et qui cherche un équipier! Oui, il s'appelle sabali, vous allez sur google et vous trouverez leur blog, et leur contact. Merci! Je re-fonce au café où Martin a pris son ordi, je lui taxe, tape Sabali (titre d'une chanson d'Amadou et Mariam que j'adore), trouve le blog, l'adresse, et fais ma demande. Auparavant j'avais quand même questionné les français sur ces deux mecs, très bien sous tous rapports, diplômes tous frais d'ingénieurs, bateau qui tient la route, tu peux y aller confiante.
On dîne avec les tchèques, encore des histoire incroyables qu'ils me racontent sur leur pays, crêpes de pomme de terre saucisses, café-clopes, Pedro vient me chercher, hallucine total sur la journée dont je lui fais le récit, good girl, you know what you want... A l'appart je saute sur l'ordi, Sabali a répondu, on a peut-être un équipier à Dakar, mais on va réfléchir, et si on entend parler de quelque chose, on te rencarde. Déception, acceptation, je suis habituée maintenant...Le moral est bon, c'est ça qui est important.