mardi 27 octobre 2009

Adieu, so long, fairwell

Encore une fois j'ai dû dire adieu à un endroit. Après Funchal, Ténérife. Et Ténérife m'a offert des adieux et le concert le plus chouette que j'aie jamais fait. La journée auparavant avait été assez stressante. Nous nous sommes levés tous gais avec Nyels; Pilhouë était vide. Nous l'avions pour nous tous seuls, et avoir Pilhouë pour soi tout seul, c'est un luxe dont on ne se blase jamais. Petit dej en musique, gaieté, bonheur. Nous avions un beau petit programme en perspective, aller prendre une douche (vu la distance qui nous sépare des salles d'eau, se laver est un temps fort de la journée auquel on doit consecrer du temps et de l'énergie: il ne faut jamais aller se laver le ventre vide, bien s'échauffer avant, et boire beaucoup d'eau, tous les professionneles vous le diront), boire un café, et zoner dans le port. Mais François et Nicole sont revenus surexcités, brisant la petite bulle de bonheur où nous nous lovions gentiment, nous faisant nettoyer le bateau, et pressant Nyels pour qu'il aille pousser le cady de l'avitaillement avec eux au super. Horreur, malheur! Programme bonheur largement compromis. Mais Nyels a su tenir tête. Il faut dire que plusieurs bateaux lui tournent autour pour l'embarquer à leur bord en vue de la transat, et lui proposent même de ne pas payer de caisse de bord. Il en a avisé François, qui serait bien fou de réduire à l'esclavage son précieux équipier sous peine de se le voir chipper par d'autres skippers! Joie donc, Nyels a esquivé le cady, programme bonheur remis au goût du jour. Nous allons donc doucher, cafer-clopper, zoner. Puis j'enfourche une de ces petites byciclettes démontables spécial voilier et part me faire vacciner. J'arrive trop tard. Je rentre au bateau et mitonne aux petits oignons et à la crème fraîche un crumble au thon pêché en arrivant, à vous faire fondre un iceberg. Puis je m'apprête à partir faire mon dernier tour de chant à Ténérife. Je m'emploie à descendre tout mon bardas du bateau ce qui demande aussi échauffement et préparation, entre la batterie qu'il faut transporter bien droit, l'ampli, la guitare et tout le tralala... Epuisée, je m'apprête à quitter le catway quand les deux tempêtes du désert arrivent de nulle part, pestant, fumant, où est Nyels, il faut vider les courses, on doit s'habiller pour le cocktail du rallye au yacht club, stress, pression. Je m'emploie donc à faire des allers-retour entre la voiture et le ponton pour aider mes deux gentils hôtes, Nyels arrive et prend la relève, je m'échappe. Un gentil marin me propose de me charger avec tout mon matos dans sa loc, et me dépose en bas de la place centrale. Je stresse, déjà parce que les deux tempêtes m'ont bien stressée avant, et aussi parce que j'ai peur que Norman l'israëlien, un autre musicien, aie déjà pris la place convoitée, qui est de choix. Dès le premier jour je m'étais dit: "cette semaine, je chante là, c'est clair". Je l'avait déjà eu une fois, puis le lendemain elle avait été prise par Norman, mais aujourd'hui, elle était libre. Je m'installe et commence. Joie! Jolie voix. Du souffle, je peux tenir les notes, ou pas, au moins, j'ai le choix. Les gens s'attroupent, s'asseyent, et mettent piécettes. Au bout d'une heure, j'ai devant moi pas mal de monde, qui ne fait que m'écouter, puisqu'il n'y a que des banc publics et pas de tables où prendre un verre en caussant. Ils restent. Je les en remercie. Je suis contente, heureuse, je plane presque, je ne veux plus m'arrêter. Je le leur dis. Merci, c'est très agréable de chanter pour vous, je veux continuer toute la nuit. Total, je chante deux heures. Deux heures de pur bonheur. Deux heures d'attention, d'émotion, de pures sensations. Je fais L.O.V.E, à contre coeur, ça signe la fin de l'ultime concert canarien, le meilleur que j'aie jamais fait depuis que je chante dans la rue. Une femme vient me voir, elle fait partie de l'association des femmes créatives, il y a une conférence dans trois semaines, peux tu participer? Non, mais merci en tout cas. Un couple qui m'avait écouté tout un tour la veille, qui est revenu cette fois-ci et resté encore jusqu'au bout, vient discuter. Les gens sont d'une gentillesse et d'une humanité folle, ils sont ouverts, intéressés, intéressants, et je suis trop triste de partir. Pendant le tour, un clochard avec qui j'ai copiné est venu m'apporter une canette, une petite fille est venue chanter dans le micro, pas froid aux yeux, une comptine a capella sant trembler d'un poil! En passant à côté de moi après m'avoir mis des pièces, les gens me faisaient des clins d'oeils, levaient le pouce ou me glissaient "muy bien", pour marquer leur approbation. Nous allons café-clopper-compter sousous avec N qui a aussi eu l'air de beaucoup aimer le tour, et j'ai fait 70 euros presque. Un monsieur nous paye notre addition, quand je vais le voir pour l'en remercier, il me dit:" no hay porque, me diste felicidad est tarde", je plane d'allégresse. Je décide de ne pas chanter de nouveau, je veux rester sur cette merveilleuse impression. Aurevoir les Canaries, merci pour tout, et à très bientôt sûrement! Et merci pour les 410 euros aussi.... Semaine bonheur!