dimanche 27 septembre 2009

Le désespoir est sur le quai des aurevoir

Bientôt il serait temps de nous séparer, Denis et moi. Mais malheureusement, tenue par des impératifs professionnels, je devais vagabonder seule dans Funchal guitare en bandoulière pour trouver des bars où chanter, ou sur le port pour trouver des bateaux où monter. Je me rendis à la marina de Funchal, sur le quai ou étaient amarrés à couple les bateaux accompagnateurs de la course. Lorsque j'avais envoyé un mail à tous les skipper, un bateau, le Peaudorange, m'avait dit que je pouvais venir lui rendre visite lorsqu'il arriverait à Funchal. Moi, naïve et optimiste comme je suis, je me disais qu'ils voulaient d'abord me connaître, et que chose faite, ils m'auraient bien évidemment embarquée. Lorsque j'arrivai sur le quai, tout d'abord je fus complètement éblouie par les bateaux qui s'y trouvaient. De vraies bombes, des énormes voiliers, racés, profilés, imposants. Ensuite je n'y voyais plus. L'éclatante beauté de la plupart des équipers qui se trouvaient à leurs bords m'avait rendue aveugle. Je cherche Hervé s'il vous plaît, je viens de la part de Rico. Oui c'est moi. Mon Dieu que tu es beau. Prends moi sur ton bateau, avec toi j'irai au bout du monde.
- Je suis Anne, la jeune fille qui vous a envoyé le mail, je voudrais embarquer pour accompagner la course.
- Désolé, on est complet.
Mais Hervé qu'est-ce que tu me chantes? Tu veux me tuer???? Tu me dis de venir te voir, mais pourquoi? Pour que je puisse admirer ta gueule d'amour et pleurer en pensant que jamais je ne la verrai détourée sur un ciel azur miroitant dans une eau limpide? Kurva! Polpmipardel ti vole!
Mon désespoir n'était pas complet, il y avait 5 autres bateaux, tous chargés de marins bronzés, étincellants, respirant l'écume et le bon air du grand large. J'allai les voir un par un, je tournai de ponts en ponts, passant de l'un à l'autre, virevoltante jupe blanche, adorable minois au regard décidé, on me soulevait, on me portait, on me déposait, mais jamais, on ne m'accepta.
On apprit à me connaître, on me voyait tous les jours, traînant dans le port, et on me demandait, alors t'as trouvé? Et je répondais que non, l'air déspéré, la moue boudeuse, mais l'optimisme ravageur. Mais oui, on te fait confiance, tu vas trouver. Un jour, celui où j'avais dégoté deux bars où chanter, je retrouvai Denis et compagnie au bar O Apolo sur les quais de la marina. Je passai devant une table où trinquaient gaiement l'équipage de Solo et Pen ar Clos, deux magnifiques voiliers accompagnateurs:
- Alors la p'tite, t'as trouvé?
Moi je ne savais plus ce que je cherchais, je cherchais tellement de choses, que je crus qu'ils voulaient parler des bars où chanter.
-Oh oui, j'ai trouvé! dis-je avec un sourire radieux. Bah oui j'étais quand même bien heureuse de pouvoir chanter à Madeire.
Clameur, joie parmis les équipiers, je me disais qu'ils étaient trop sympas d´être aussi contents pour moi.
- Alors tu vas sur lequel????
- Ah mais non, je voulais dire que j'ai trouvé des bars où chanter.
Déception, mais curiosité. Mais qu'est-ce que tu fabriques, pourquoi tu veux aller au Brésil, mais comment t'es venue, ah bah d'accord, pas froid aux yeux la p'tite, eh une place de plus allez, c'est pas grand chose...Oh oui, oh OUi! nen attends, y a les parents du suisse là, ils l'ont suivi jusqu'ici, va les voir, ils vont peu-être au Brésil, oh la la, génial, merci les gars! Eh, donne nous ton numéro on sait jamais, et marque là où et quand tu chantes, si on a le temps on passera te voir... Oh lala, trop sympa les mecs, a tchao, j'vais voir les p'tits suisses! Attends demain plutôt, leur fils vient d'arriver, il faut les laisser se retrouver. Ok demain alors.
Le lendemain je fonçai à Funchal, allai voir les suisses qui m'annoncèrent qu'ils n'allaient pas au Brésil cette fois-ci, pas prêts, la fois suivante. AAAAAAAAAAAAAAhhhhhhhhhhhhhhh! Y en a marre des faux espoirs!!!! Dépitée je déambulai guitare au dos dans le port, à côté des bateaux, entre les tentes du PC course... Un gars de l'organisation, je ne le connaissais même pas, je ne l'avais jamais vu, ni rencontré, vient me voir et me dit: "alors t'as trouvé?" " mais comment tu sais que je cherche?" " bah tout le monde le sait" ah... pas mal, au moins tout le monde savait que j'existais et que j'étais au desespoir, un jour peut-être, on me ferait signe. Il me dit qu'un septième bateau accompagnateur était arrivé, un Amel avec seulement trois personnes à bord. Les Amel je les connaît bien, ils étaient à côté du Lansart des des Georges au salon du Grand Pavois de la Rochelle, on l'a visité avec Sophie, et on aurait bien dormi dedans, c'est spacieux et luxueux. Je volais, fonçais, on me refusait toujours pour cause de pas de place, un Amel c'est vaste, ils sont obligés de dire oui!!!!
J'arrive, je saute, je fais poliment demande, alors???? C'est oui???? Nan! on est trois et on est très bien. Je vous laisse mon numéro, au cas où vous changeriez d'avis... Tristesse, désespoir, blues, vague à l'âme....Mais pourquoi? Pourquoi????!!! Normalement je fais tout ce que je veux, on ne me refuse rien, on ne me dit pas non à moi! c'est un mot que je ne connais pas, non mais c'est incroyable le toupet des gens!!! J'ai demandé poliment, j'ai dit s'il vous plaît! J'envoyais l'Amel au diable, aux enfers, à tous les vents, je fumais. Mais ne perdais pas espoir, l'Atlantique, je le traverserai en bateau, et si je le veux, je le peux. Impossible n'est pas Saint-Périer, aide-toi et le ciel t'aidera, merci Papa Maman pour les petits proverbes qui donnent du courage. Prie Sainte-Rita, Saint-Yves, un jour la mer te prendra et te déposera sur les côtes brésiliennes, ça n'est qu'une question de patience et d'acharnement.