mercredi 27 janvier 2010

Japaratinga: no comment

Japaratinga nous a laissée une impression très mitigée. Nous y sommes parties avec tout le matériel de musique, suréquipées, surchargées, persuadées que dans cette région hautement reconnue pour ses plages paradisiaques, nous trouverions la dose de touristes nécessaires à venir remplir notre caisse, à venir nourrir la panthère. Nous débarquons dans une petite bourgade, bordant une grande plage de sable fin venant elle-même border une mer turquoise. Le paradis pour toutous, pigeons, la panthère aura largement de quoi subsister, à priori. Sauf que sauf que, le zoo est désert. Pas un chat. Quelques vacanciers se sont perdus ici, et viennent confirmer notre peur, il n’y a pas grand monde. Bon. Que peut-on faire ici alors ? On peut aller voir des piscines naturelles et des barrières de coraux en catamaran promène-toutous. Très peu pour nous, on est allergiques aux chiens. On va se reposer, voilà ce qu’on va faire. On a beaucoup crapahuté ces derniers jours, on a avalé moults kilomètres à pied, en bus, on va rester, et récupérer de nos folies de Lençois. Nous passons la première journée à la plage. Je lis sœur Emmanuelle avec passion, Sophie s’ennuie avec Blaise Cendrars. Petits cafés, bains de mer, et de soleil, la Sophie se fait une nouvelle peau, toute rouge, le coup de soleil le plus monumental que j’aie jamais vu et elle non-plus d’ailleurs, elle est écarlate de tout le dos. Je pèle du front, bref, notre épiderme en prend un sacré coup. Nous rentrons bien sagement dans notre charmante pousada où nous avons libre accès au Wi-Fi, et grâce au petit bijou qu’est mon ordinateur, nous prenons de vos nouvelles sur facebook, et je blog, pour la première fois, en totale liberté, gratos quoi. Le lendemain, le soleil est de plomb. Nous n’osons plus sortir. Petit dej, grasse mat, lecture et répétition avec le matos, j’ai tout branché, souvenirs de la chorale, l’alto et la soprane travaillent dur pour performer, un jour, on ne sait pas encore quand. En fin d’après-midi, le soleil descend, nous mettons le nez dehors et partons nous dégourdir les pattes sur la plage. Nous rentrons tout aussi sagement que la veille dans la pousada. Sophie internette et je pars répéter pour la énième fois la chanson de Martin. Un couple me voit passer après que j’ai joué cette chanson et la compo do Braziou dans ma chambre, et m’arrosent de compliments, je suis toute retournée, car lorsque l’on complimente mes chansons, c’est comme si on me complimentait moi-même, et et, en parfaite égocentrique que je suis, j’adore que l’on me parle de moi, et de mon inénarrable talent ! Je les remercie, suis absolument transportée que mes chansons puissent faire un tel effet. Ils reviennent me voir pour me dire qu’ils ont deux frères qui travaillent pour TV Globo, une chaîne nationale, et une copine qui bosse à la radio de Recife, là où ils habitent. Saurais-je leur fournir un enregistrement pour qu’ils montrent à tout ce petit monde ? Je ne saurais pas, desculpe… Mais je les emmène dans ma chambre pour leur présenter tout mon petit monde et leurs fais une démo du jamman sur Esquadros, une chanson brésilienne, que monsieur enregistre sur son portable. Ils m’invitent à venir quand je veux à Recife, où je serai logée nourrie blanchie, trop cools, en mode Brésil quoi…. Je ne promets rien mais garde cela bien au chaud dans un coin de ma tête. Cette rencontre me fait une fois de plus hésiter sur les choix que je dois faire dans les mois à venir. Je pressens que le Brésil sera une bonne terre d’accueil pour moi et ma musique, je me demande si je ne devrais pas rester ici un maximum pour y tenter de grandir. Mais en même temps je crève toujours d’envie de voir les tchèques, dont un en particulier. Alors j’ai arrêté cette décision. Je dispose de trois mois et demi. Je vais en passer deux et demi au Brésil, je vais travailler pour me payer un billet d’avion pour St’Martin où je passerai le dernier mois, et d’où je reviendrai en France, toujours en avion. Voilà le programme, pour le moment, parce que ça change toutes les 5 minutes ces jours-ci.
Cette journée passée à ne rien faire nous a complètement plombées avec Sophie, et nous décidons que la mer, c’est chiant. A part se cramer la pilule, il n’y a rien à faire. Et quand on a vu une plage paradisiaque, on les a toutes vues… La terre, c’est beaucoup mieux, il y a des montagnes, des cascades, des forêts, et sûrement plus de touristes. En plus on a tout ce qu’il faut pour trekker, il faut en profiter. Nous voilà donc parties de Japaratinga, direction Salvador, que nous quitterons dans deux jours, pour on ne sait pas vraiment où, on hésite entre Ilha Grande et Belo Horizonte. On verra bien.

Faisons une petite parenthèse sur cette rencontre, celle de deux brésiliens qui nous ont aidé à transporter toutes nos affaires avec leur voiture. Très gentils, adorables même, muiiiito tranquilo ! L’un a bien 45 ans, le second 30, on se demande ce qu’ils fabriquent ensemble, ils n’ont l’air d’être ni frères, ni en couple, on dirait qu’ ils se sont rencontrés pendant le voyage, et qu’ils font route ensemble. Après qu’ils nous ont aidé, on leur offre une caïpi dans la pousada, et on discute. On est très vite exaspérées par le vieux, qui monopolise la conversation et nous parle sans arrête du même endroit en nous disant, tu connais pas ??? c’est merveillllllleuuuuux, trrrrrrrès tranquiiille : e maraviliooooso, muiiiito tranquiiiiilo, você nao conhoce ????? nen nen connois pas , nao conhoce, on lui dit une bonne dizaine de fois qu’on connait pas, ils nous parle de centaines de lieux qui sont maraviliooooso, muuuito tranquiiilo, on passera notre temps à répéter ces deux adjectifs à tout bout de champs, maintenant tout est maraviliooooso e muiiiito tranquiiiiilo. On les a fui pendant deux jours ensuite, moche de notre part, mais on ne pouvait plus s’entendre dire que tel ou tel lieux était merveilleux et tranquille, même si désormais on se le répète toute la journée.. Merci les deux compères pour nous avoir offert ce délire… !
Autre parenthèse que j’ouvre sur une autre rencontre, une rencontre absolument magique, la rencontre de Patric. Patrick n’est-ce pas, est un adorable nourrisson de quelques mois seulement. La première fois que nous avons aperçu Patrick, il dormait paisiblement sur l’épaule de sa bienheureuse maman. Patrick, avec ses bonnes joues toute rondes, sa grosse bouche boudeuse, et sa carrure de rugbyman néo-zélandais, déjà. Patrick ne s’appelle pas Patrick, on ne sait pas comment s’appelle Patrick, on l’a appelé ainsi car il ne pouvait s’appeler que Patrick. Plus tôt dans la journée, on s’était mises d’accord pour dire que pour accoucher d’un bébé, d’un bambin, le tenir dans ses bras pour la première fois, poser un regard attendri et plein d’amour sur sa petite bouille innocente et angélique de petit d’homme, et décider de l’appeler Patrick, il fallait être complètement frappé. Changer la couche de Patrick, laver la barbotteuse de Patrick, Patrick fait ses dents, on va mettre un supo à Patrick, c’est l’heure de la tétée de Patrick, Patrick nous fait une petite poussée de fièvre, c’est juste pas possible ! Mais quand on a vu ce bébé (absolument adorable, trop mignon, on ne l’ a pas baptisé ainsi parce qu’il est moche, il est d’une beauté incomparable, il y a une force tranquille qui se dégage de Patrick, c’est hallucinant, Patrick nous manque, à un point que vous n’imaginez pas, bref), quand on a vu le carré de ses épaules, la force volontaire qui émane de tout son petit être, on s’est dit, c’est un Patrick ! Et c’en est un. Indéniablement. Alors que j’écris ces lignes, je pense à Patrick et ça me fait un bien fou, les pensées pour Patrick sont des pensées positives, de celles qui vous font sourire bêtement dans la rue. On pleure tous les jours en pensant qu’on ne reverra plus jamais Patrick le magnifique, l’auguste Patrick, derrière qui nous avons passé la plus magique des nuits que nous ayons passée dans un bus. Merci Patrick, pour ces instants de grâce que tu nous a offert.