Japaratinga nous a laissée une impression très mitigée. Nous y sommes parties avec tout le matériel de musique, suréquipées, surchargées, persuadées que dans cette région hautement reconnue pour ses plages paradisiaques, nous trouverions la dose de touristes nécessaires à venir remplir notre caisse, à venir nourrir la panthère. Nous débarquons dans une petite bourgade, bordant une grande plage de sable fin venant elle-même border une mer turquoise. Le paradis pour toutous, pigeons, la panthère aura largement de quoi subsister, à priori. Sauf que sauf que, le zoo est désert. Pas un chat. Quelques vacanciers se sont perdus ici, et viennent confirmer notre peur, il n’y a pas grand monde. Bon. Que peut-on faire ici alors ? On peut aller voir des piscines naturelles et des barrières de coraux en catamaran promène-toutous. Très peu pour nous, on est allergiques aux chiens. On va se reposer, voilà ce qu’on va faire. On a beaucoup crapahuté ces derniers jours, on a avalé moults kilomètres à pied, en bus, on va rester, et récupérer de nos folies de Lençois. Nous passons la première journée à la plage. Je lis sœur Emmanuelle avec passion, Sophie s’ennuie avec Blaise Cendrars. Petits cafés, bains de mer, et de soleil, la Sophie se fait une nouvelle peau, toute rouge, le coup de soleil le plus monumental que j’aie jamais vu et elle non-plus d’ailleurs, elle est écarlate de tout le dos. Je pèle du front, bref, notre épiderme en prend un sacré coup. Nous rentrons bien sagement dans notre charmante pousada où nous avons libre accès au Wi-Fi, et grâce au petit bijou qu’est mon ordinateur, nous prenons de vos nouvelles sur facebook, et je blog, pour la première fois, en totale liberté, gratos quoi. Le lendemain, le soleil est de plomb. Nous n’osons plus sortir. Petit dej, grasse mat, lecture et répétition avec le matos, j’ai tout branché, souvenirs de la chorale, l’alto et la soprane travaillent dur pour performer, un jour, on ne sait pas encore quand. En fin d’après-midi, le soleil descend, nous mettons le nez dehors et partons nous dégourdir les pattes sur la plage. Nous rentrons tout aussi sagement que la veille dans la pousada. Sophie internette et je pars répéter pour la énième fois la chanson de Martin. Un couple me voit passer après que j’ai joué cette chanson et la compo do Braziou dans ma chambre, et m’arrosent de compliments, je suis toute retournée, car lorsque l’on complimente mes chansons, c’est comme si on me complimentait moi-même, et et, en parfaite égocentrique que je suis, j’adore que l’on me parle de moi, et de mon inénarrable talent ! Je les remercie, suis absolument transportée que mes chansons puissent faire un tel effet. Ils reviennent me voir pour me dire qu’ils ont deux frères qui travaillent pour TV Globo, une chaîne nationale, et une copine qui bosse à la radio de Recife, là où ils habitent. Saurais-je leur fournir un enregistrement pour qu’ils montrent à tout ce petit monde ? Je ne saurais pas, desculpe… Mais je les emmène dans ma chambre pour leur présenter tout mon petit monde et leurs fais une démo du jamman sur Esquadros, une chanson brésilienne, que monsieur enregistre sur son portable. Ils m’invitent à venir quand je veux à Recife, où je serai logée nourrie blanchie, trop cools, en mode Brésil quoi…. Je ne promets rien mais garde cela bien au chaud dans un coin de ma tête. Cette rencontre me fait une fois de plus hésiter sur les choix que je dois faire dans les mois à venir. Je pressens que le Brésil sera une bonne terre d’accueil pour moi et ma musique, je me demande si je ne devrais pas rester ici un maximum pour y tenter de grandir. Mais en même temps je crève toujours d’envie de voir les tchèques, dont un en particulier. Alors j’ai arrêté cette décision. Je dispose de trois mois et demi. Je vais en passer deux et demi au Brésil, je vais travailler pour me payer un billet d’avion pour St’Martin où je passerai le dernier mois, et d’où je reviendrai en France, toujours en avion. Voilà le programme, pour le moment, parce que ça change toutes les 5 minutes ces jours-ci.
Cette journée passée à ne rien faire nous a complètement plombées avec Sophie, et nous décidons que la mer, c’est chiant. A part se cramer la pilule, il n’y a rien à faire. Et quand on a vu une plage paradisiaque, on les a toutes vues… La terre, c’est beaucoup mieux, il y a des montagnes, des cascades, des forêts, et sûrement plus de touristes. En plus on a tout ce qu’il faut pour trekker, il faut en profiter. Nous voilà donc parties de Japaratinga, direction Salvador, que nous quitterons dans deux jours, pour on ne sait pas vraiment où, on hésite entre Ilha Grande et Belo Horizonte. On verra bien.
Faisons une petite parenthèse sur cette rencontre, celle de deux brésiliens qui nous ont aidé à transporter toutes nos affaires avec leur voiture. Très gentils, adorables même, muiiiito tranquilo ! L’un a bien 45 ans, le second 30, on se demande ce qu’ils fabriquent ensemble, ils n’ont l’air d’être ni frères, ni en couple, on dirait qu’ ils se sont rencontrés pendant le voyage, et qu’ils font route ensemble. Après qu’ils nous ont aidé, on leur offre une caïpi dans la pousada, et on discute. On est très vite exaspérées par le vieux, qui monopolise la conversation et nous parle sans arrête du même endroit en nous disant, tu connais pas ??? c’est merveillllllleuuuuux, trrrrrrrès tranquiiille : e maraviliooooso, muiiiito tranquiiiiilo, você nao conhoce ????? nen nen connois pas , nao conhoce, on lui dit une bonne dizaine de fois qu’on connait pas, ils nous parle de centaines de lieux qui sont maraviliooooso, muuuito tranquiiilo, on passera notre temps à répéter ces deux adjectifs à tout bout de champs, maintenant tout est maraviliooooso e muiiiito tranquiiiiilo. On les a fui pendant deux jours ensuite, moche de notre part, mais on ne pouvait plus s’entendre dire que tel ou tel lieux était merveilleux et tranquille, même si désormais on se le répète toute la journée.. Merci les deux compères pour nous avoir offert ce délire… !
Autre parenthèse que j’ouvre sur une autre rencontre, une rencontre absolument magique, la rencontre de Patric. Patrick n’est-ce pas, est un adorable nourrisson de quelques mois seulement. La première fois que nous avons aperçu Patrick, il dormait paisiblement sur l’épaule de sa bienheureuse maman. Patrick, avec ses bonnes joues toute rondes, sa grosse bouche boudeuse, et sa carrure de rugbyman néo-zélandais, déjà. Patrick ne s’appelle pas Patrick, on ne sait pas comment s’appelle Patrick, on l’a appelé ainsi car il ne pouvait s’appeler que Patrick. Plus tôt dans la journée, on s’était mises d’accord pour dire que pour accoucher d’un bébé, d’un bambin, le tenir dans ses bras pour la première fois, poser un regard attendri et plein d’amour sur sa petite bouille innocente et angélique de petit d’homme, et décider de l’appeler Patrick, il fallait être complètement frappé. Changer la couche de Patrick, laver la barbotteuse de Patrick, Patrick fait ses dents, on va mettre un supo à Patrick, c’est l’heure de la tétée de Patrick, Patrick nous fait une petite poussée de fièvre, c’est juste pas possible ! Mais quand on a vu ce bébé (absolument adorable, trop mignon, on ne l’ a pas baptisé ainsi parce qu’il est moche, il est d’une beauté incomparable, il y a une force tranquille qui se dégage de Patrick, c’est hallucinant, Patrick nous manque, à un point que vous n’imaginez pas, bref), quand on a vu le carré de ses épaules, la force volontaire qui émane de tout son petit être, on s’est dit, c’est un Patrick ! Et c’en est un. Indéniablement. Alors que j’écris ces lignes, je pense à Patrick et ça me fait un bien fou, les pensées pour Patrick sont des pensées positives, de celles qui vous font sourire bêtement dans la rue. On pleure tous les jours en pensant qu’on ne reverra plus jamais Patrick le magnifique, l’auguste Patrick, derrière qui nous avons passé la plus magique des nuits que nous ayons passée dans un bus. Merci Patrick, pour ces instants de grâce que tu nous a offert.
mercredi 27 janvier 2010
samedi 23 janvier 2010
Chapada Diamantina: un bijou
Nous sommes allées à Lençois. Nous avons aimé Lençois, Lençois nous a aimées.
Nous y sommes arrivées à l’aube, vers 5h du matin. Prévoyantes, sages, responsables, nous avions réservé une pousada. Rita, la patronne à la panse large et à l’opulente poitrine, est venue nous chercher au terminal d’autocars pour nous conduire à pied, sous une petite pluie fine, jusqu’à sa maison. Nous logerons dans une annexe dont la rue, qui se termine par un chemin de terre, conduit à la rivière, à ses piscines naturelles d’eau rouge et pleine de fer. Rita nous laisse, nous dormons jusqu’à midi. A notre réveil, nous faisons un petit repérage dans la ville au décor d’opérette, modestes bâtisses colonniales aux vives couleurs, rues pavées, et désertes, à cette heure où le soleil cogne sévère. La rivière nous tend les bras, paréos do Braziou, bouquins, appareils photos en main, on va lui faire un gros câlin. Les bahianais sont là, qui se baignent, plongent, et backflippent dans tous les sens, pendant que nous lisons et nous rafraîchissons tranquillement en les observant, admiratives devant cette jeunesse musclée qui se donne en spectacle pour le plus grand plaisir des touristes à la fesse molle. L’après-midi s’écoule calmement, au chaud, au frais, au nordeste de ce Brésil dont nous découvrons les merveilles à deux, entre françaises, entre copines. Enfin, l'après-midi s'est passée calmement, presque. Nous avons bien failli disparaître avec Sophie. Il y avait un petit rapide, dans lequel nous nous sommes laissées entraînées, pour venir nous fracasser sur un rocher sur lequel il passait... Une peur grande comme le Brésil. Sophie garde les stigmates de cet incident car elle s'est arrachée la peau au niveau du bassin, et tous les jours, la triste vue de ses croûtes nous rappelle notre imprudence. Bref!
Avec Rita, nous avons négocié de pouvoir disposer à volonté de la cuisine pour pouvoir y préparer nos petits repas. Normalement ça ne se fait pas, mais Rita, nous ne sommes pas riches comme Crésus, et les restos midi et soir, ça nous bouffe notre budget. L’heure du dîner a sonné, ça sera donc risotto aux légumes, délicieux, nourrissant. Le lendemain, départ en fiat blanche avec un couple de brésilien et un chauffeur, pour la cachoeira da Fumaça, la deuxième cascade la plus haute du Brésil. On nous dépose au bas d’une montagne que nous devrons grimper pendant deux heures avant d’assister au spectacle étourdissant de l’eau qui dégringole de la roche. Nous avons un guide, nous sommes huit. On se fait un plaisir de semer ce petit monde et tous les autres groupes qui nous précèdent, histoire de profiter à deux, seules et sans pigeons toutes casquettes et bananes dehors, de cette petite balade de santé. C’est quand même beaucoup plus cool que de se suivre à la queue leu-leu en ayant pour seule vue celle des postérieurs disgracieux de ceux qui sont devant vous… On gambade, on chante, on photographie, on hésite à chaque fois qu’on arrive à une croisée de chemin, et on la voit enfin, la haute, la superbe, la toute mouillée, la cascade. Tellement haute d’ailleurs qu’on n’en voit pas le fond… D’une grosse roche qui surplombe le vide, juste au dessus de la chute d’eau, des touristes en petit groupe se pressent, s’allongent, se penchent, crient comme des tarzans, se prennent en photo, devant ce décor, cette verdoyante nature qui se perd dans de larges canyons, interminables successions de collines et de creuses vallées qui nous renvoient l’écho des voix surexcitées. Sur le côté de la cascade, perchées en hauteur sur une grosse pierre, nous nous repaissons du spectacle de la nature, et des hommes qui la découvrent. Et on bouffe nos gros sandwich faits maison, en papotant gentiment. Bientôt il faut redescendre. Nous arrivons en bas, toutes paniquées à l’idée que notre groupe dont nous avons complètement perdu la trace, ne nous attende. Notre chauffeur est là, qui nous rassure, ils ne sont pas encore arrivés. Un jus de mangue frais et quelques clopes plus tard, ils débarquent, tous suants, et notre guide en nous voyant, nous demande si nous sommes des athlètes, étant donné la vitesse à laquelle nous les avons tracé… So class ! Nous regagnons la pousada bien crevées, de cette fatigue qui vous tient quand vous avez passé une journée qui vous en a mis plein les yeux, plein les jambes.
Le lendemain, direction le toboggan naturel, mais avant, une surprise. Au petit dej, qui vois-je attablés sympathiquement, parlant un français à l’accent chantant de Marseilleu ? 6 gaulois, dont 4 que je connais, puisqu’ils sont des amis de François de Monastir. Comme Pilou, leur voilier, Sonate, est un Sunfizz. A Mindelo, ils sont venus prendre un apéro chez nous, lorsque Sophie et moi avons rendu visite à mon cher et tendre skipper à Salvador, on les a croisé sur les pontons, et ce matin on se retrouve devant un café chaud, au cul du monde, c’est juste surréaliste… On discute gaiement, on se raconte nos traversées, je fais mon sempiternel laïus sur les skippers qui met tous les équipiers d’accord. Rita arrive, et profite de ce que je baragouine un peu beaucoup la langue pour me charger de traduire tout un tas de choses qu’elle veut communiquer à ses hôtes. Au final je finis par leurs vendre un circuit dans une agence dont elle percevra la commission, plus un repas pour 6 personnes qu’ils prendront au dîner dans sa pousada, le jour suivant. En gros je lui fais marcher son petit business, et je m’en souviendrai. Rien n’est jamais gratuit dans ce bas monde, rien, et on peut tirer profit de tout ! Le petit dej avalé, on se dirige vers le toboggan à pied, 45 minutes de marche dans une petite forêt, qui débouche sur une rivière, là encore, toute rouge. Il y a une énorme pierre en pente, qui prend toute la largeur, sur laquelle l’eau court et fait glisser pour leur plus grand bonheur, les popotins des baigneurs. Petit bain, pause pique-nique, puis enfin, il est temps de se frotter à la dalle, au risque d’endolorir nos délicates fesses. Car bon, le toboggan a des aspérités, des petites irrégularités, on est pas à l’aquaboulevard n’est-ce pas, et on sent que nos derrières risquent d’en prendre un sacré coup, si on ne fait pas très attention… On grimpe sur le côté, on arrive en haut, on étudie le terrain ; on voit arriver un grand black, dont la plage arrière bombonne de deux beaux airbags impressionnants de rondeur, on se dit celui là, peut importe les aspérités, il doit rebondir comme une balle de basket. On le voit dispenser des conseils à ses copines, je prête l’oreille, il a dit qu’il fallait garder les jambes bien fermées sinon on vrille dans tous les sens. Debout, superbe, généreux de dos comme de face, il se charge de donner de l’élan à ces demoiselles en leur indiquant la voie à emprunter. On se met à la file l’air de rien, sa grande paume ferme vient nous donner l’impulsion nécessaire pour dévaler la grosse pierre. Je m’élance, je serre les jambes, les fesses, les dents, grosses sensations, et plouf ! Dans l’eau. Sophie me suit et je peux profiter du spectacle hilarant qu’elle donne ; toute raide et constipée comme moi, elle garde les jambes serrées, les bras écartés, tendus comme des hautbans, et hyper sérieuse, elle dévale elle aussi la pente, en conservant malgré ses petits soubresauts, la droiture de la justice ! Je me tords, je me noie presque de rire. Nous restons toute l’après-midi dans ce petit paradis, explorant toutes les petites piscines naturelles, lisant, admirant une fois de plus les bahianais qui plongent et vrillent dans tous les sens, photographiant, et et et, on se fait même des copains, trois brésiliens, étudiants, et une canadienne baroudeuse, qui nous invitent à un anniversaire chez une de leur copine le soir même. Seul problème, nous avons un bus qui doit nous ramener à Salvador, et qui part ce soir là. De plus, rester une nuit encore nous coûterait cher, puisque justement, on comptait passer cette nuit-là dans le bus, et par la même , économiser une pousada. Mais, on se souvient des petits services rendus le matin même, et on se dit que vu l’ argent qu’on a fait gagner à Rita, avec ses petites com et son dîner pour 6 personnes, on est en droit de demander une petite faveur. On troque nos billets du soir même pour le lendemain, et on part à la pousada, séduire la Rita. Ola Anna tudo bom ? Oh oui ! On a passé une super journée mais j’ai une faveur à te demander . On a rencontré des brésiliens trop cool, on voudrait passer la soirée avec eux, sauf qu’on n’a pas le budget pour s’offrir une nuit en plus chez toi, penses-tu que tu pourrais nous l’offrir ? Pas de problème Anna ! Yes ! Trop facile ! Vive le Brésil, merci Rita ! On cuisine un risotto pour 6 dans la cuisine, et on part avec notre marmite remplie, ripailler dans la pousada de Katy, Bruno, Daniel et Jérémie. On dîne, on boit du vin brésilien immonde, et en route pour la fête. C’est Daniela qui reçoit, dans sa petite maison, on est presque les premiers. Elle a préparé un buffet avec de la nourriture et surtout, et surtout, il y a pléthore de fruits frais, mangues, maracuja, citrons verts, ananas, bananes, au milieu de tout cela trône un mixer, entouré de bouteilles de vodka, cachaça, rhum. Un énorme bac rempli de glaçon siège en dessous de la table, autant dire que c’est la fête aux cocktails. Au début, sages, on boit des caïpi, et au fur et à mesure que la soirée et notre état d’ébriété avancent, on se risque à de petites inventions maisons, c’est le bonheur. Tout cela en charmante compagnie, il y a là des étudiants, des guides touristiques, des vieux, des jeunes, des baroudeurs, des fous, des rastas, tout un mélange de professions et de nationalités, ça se parle en espagnol, en anglais, en portugais, ça chante et ça guitare, c’est le bonheur, la vie quoi ! Bientôt on est un peu trop ronds, on décide de changer d’ambiance, d’endroit et de se dégourdir les pates. Sophie et moi, on a une idée lumineuse, et si on allait se bourrer tous baignés dans la rivière les copains ??? Les copains, Daniel et Jérémie en l’ occurrence, ne sont pas , mais alors pas chauds du tout. Sauf que Sophie et moi on a l’idée fixe des gens qui sont bien pafs, et on ne démord pas. On va retrouver le chemin de la rivière en tirant par la peau du coup nos deux garçons qui traînent la patte, mais qui nous suivent quand même, parce qu’ils s’imaginent, ils espèrent, les naïfs, qu’on leur fera l’aumône d’un bisous sur la boubouche, pauvres fous ! Ils tremblent de peur les gros mâles, il fait noir, on est dans la forêt, on n’y voit rien. Sophie, brave, téméraire, audacieuse, complètement ivre, ouvre la marche, elle aurait eu les yeux fermés que ça n’aurait rien changé, il y a une visibilité inférieure à 0,001 mile. Je la suis, tout aussi grise, en traitant nos deux amis de peureux, de poltrons, de couards, et en leur faisant de la lumière avec mon mp3 pour les rassurer. On arrive en tâtonnant, quasi à quatre pattes, à la rivière, on se baigne habillées, nos deux copains sont en slip kangourous, on se fout allègrement de leur gueule, mais ils acceptent nos quolibets, toujours dans l’espoir que, d’un moment à l’autre, on se jette sur eux la bouche béante. Finalement le jour se lève, la faim se fait sentir, bon bah on va prendre le p’tit dej ! On se précipite dans notre pousada et les brésiliens rentrent brecouilles… cruelles ! Ah ah ! Le petit dej avalé, on débriefe la soirée qui n’est toujours pas finie pour nous puisqu’on a pas dormi encore, affalées dans les hamacs de la pousada, en écoutant de la super musique sur le petit ordi, et en buvant cafés sur cafés. Bientôt c’est l’heure de prendre le bus, on grimpe, on s’écrase pendant quelques heures, puis on découvre qu’ avec le mp3 de Sophie on peut écouter la radio brésilienne, et aussi s’enregistrer, on délire un bon moment, de bons fous-rires, avoir un bon copain… Faut dire que les délires dans les bus, ça nous connaît avec Sophie. Pendant les tournées à la chorale, on passait des heures dans les vans côtes à côtes, et on rigolait comme des idiotes. Là c’est un peu notre tournée à toutes deux, et quand on est en forme, comme ce jour-là, ça envoie de la vanne à deux balle et c’est trop bon ! Si on vous faisait écouter les enregistrements… bref. On arrive enfin à Salvador, on dîne dans une cantine au bout de la rue de notre pousada, il y a un jeune qui joue seul à la guitare, je lui emprunte deux fois le micro, on bouffe bien, et pour pas cher, bref, c’est la joie.
Le lendemain, branle-bat de combat, journée shopping, et shopping lourd. Il faut s’équiper pour chanter et pour camper. On s’achète une tente, des tapis de sols, une grille, une casserole, une lampe de poche, un micro pour la Sophie, des claves, un tambourin, des jacks tous neufs, j’ai fait réparer le yuku et la guitare, soit dix chevilles remplacées, un système d’ampli remis d’aplomb, des nouvelles cordes, un micro posé sur le yuku, bref, c’est la fête, l’effervescence, à l’idée des treks et des shows de folie qui se préparent. On prend le bus à 20h, direction le nord, direction Recife. On est chargées comme des baudets. Deux sacs à dos « scouts », deux sacs à dos normaux, un sac de voyage à roulette avec mes fringues et du matos, la guitare, le yuku, le pied de micro, le tabouret, et le fidèle charriot, qui prend la batterie de 12, l’ ampli, et le chargeur black et decker. On s’arrête à Japaratinga, petite bourgade touristique bordant une plage paradisiaque. On est comme des connes à l’ arrêt de bus avec tout le bordel, ici il n’y a que des motos taxis, et pas de voitures taxis, drôle de coin. J’enfourche une moto, avec pour mission de trouver une caisse et une pousada. Je trouve une pousada à l’arrachée qui a des chambres de libres dans nos prix, je vois dans la rue un mec s’avancer vers sa voiture, je lui demande s’il veut bien m’aider à trimballer tout notre petit monde, il accepte tout de suite, on part retrouver la Sophie qui cuit au soleil sur le bord de la route entourée de tout une petite cour de sacs à dos et de matos de musique, on charge tout, direction la pousada qui est charmante, toute colorée, accueil chaleureux, petites chambres coquettes, on paie 70 au lieu de 80, café italien, wi-fi gratuit, le bo-nheur ! Ce soir on s’est fait une énorme langouste chacune au resto, la ville est un peu vide et morte, et si on voit que demain c’est pareil, on bouge dans un coin où ça bouge un peu plus, histoire de faire un peu de sous avec la musique !
On a un très don feeling avec les gens en général. Il faut dire qu’avec le joli minois de Sophie et mon brésilien assez bien maîtrisé, on forme un petit couple très sympatique, agréable à regarder et à écouter. Ils sont en général absolument désolés de constater que Sophie ne parle pas la langue, qu’elle parle en fait de plus en plus, car dans un mois, elle sera lâché dans la nature avec son Charles, qui ne parle pas un mot pour le coup, et je ne serai pas là pour palabrer avec les locaux. Et au final pas_mal de gens parlent anglais comme elle, donc au bout d’un moment tout le monde peut communiquer. Elle sait donc commander un taxi, se diriger, demander combien ça coûte, compter jusqu’à dix, tous les jours elle apprend un petit quelque chose et imprime tout très vite. Comme avec Laurence en Argentine, on fait tout un tas de rencontres sympathiques, on apprend plein de choses sur le Brésil, on a des retours très différents sur la politique, l’insécurité, mais tout le monde est d’accord pour nous dire qu’ici c’est la joie de vivre, la chaleur, la musique et la danse, le bonheur quoi ! Je suis malgré tout un peu lasse de la rencontre en général. Elle est toujours éphémère et apporte son lot de répétitions en tous genres. On répète mille fois qui l’on est, d’où l’on vient, où on va, qu’ est-ce qu’on aime, qu’est ce qu’on aime pas. On nous conseille dix mille endroits différents qui son imperdivel, on ne sait plus où donner du billet de bus, et on nous répète toujours les mêmes choses sur la France, Sarkozy est populaire alors qu’il ne l’est pas tant que ça, Carla Bruni première dame de France, oh my God, et pourquoi que les français ils n’aiment pas parler d’autres langues et surtout l’anglais, alors qu’ils ont devant eux un exemple parlant que ça n’est pas vraiment le cas non plus. On passe de bons moments, c’est clair, mais je fatigue un peu et me décourage intérieurement à chaque fois qu’on nous aborde, en me disant, et c’est reparti pour un tour ! ça serait tellement bon de voir sans être vues parfois ! Je fatigue aussi comme toujours depuis que je voyage, de voyager justement, et de ne jamais m’enraciner vraiment. Quand Sophie sera partie, ça sera déjà le mois de mars, et je devrai revenir en juin, ça fait trois petits mois, c’est rien ! Trois mois où je devrai trouver le temps pour enfin faire mon trou quelque part, et en plus je crève d’envie de retourner aux caraïbes pour voir les tchèques, mais je ne veux pas prendre l’avion, donc ça va prendre du temps, autant dire que c’est impossible de concilier toutes mes envies. J’ai envie d’avoir encore six mois devant moi, d’en passer 5 dans un endroit, qui ne soit pas que touristique, où je puisse rencontrer des jeunes de mon âge ET de mon milieu. Il y a une chose que j’ai apprise, c’est que quoiqu’il arrive, on n’échappe pas à son milieu. Je ne peux pas passer ma vie à traîner avec des guides, des pizzaïolos et des vendeurs de bière de la rue, j’adore discuter avec eux, connaître leur point de vue sur les choses de la vie, apprendre de leur rage de réussir ou de leur capacité à être heureux sans rien, leur demander tous les jours comment s’est passée la journée, les faire voyager en leur parlant de la France et de la mer, mais j’ai besoin de recréer autour de moi un petit monde similaire à mon monde français, avec des vrais copains. Trois mois c’est trop peu pour ça. Bref, petit moments difficiles parfois où je me demande où je vais et qu’est ce que je fous là. Si je pense en mode Anne la folle, c'est-à-dire sans songer au lendemain, je suis ravie de ce que je vis et je n’y vois que du bon, si je pense en mode vierge sage avec la petite voix des parents, les miens et ceux des autres, la famille etc…, je me dis, à quoi bon, et où ça mène ? alors je ne sais plus quoi faire. Car j’ai l’impression que chaque décision que je prends peut changer le cours des choses, si je reste au Brésil, si je vais à St Martin, si je retourne en France et décide de ne plus en repartir, quelle que soit ma décision, elle apportera son lot d’évènements, de rencontres, d’opportunités et de chances qui viendront modifier le tracer de ma petite existence, et ça me stresse ! Bref, c’est le grand bazar dans ma tête… Mais pour le moment, Sophie est là, oh bonheur, oh joie! Ne penser qu’à ça, tomorrow is another day, comme dirait notre copine Scarlett….
Nous y sommes arrivées à l’aube, vers 5h du matin. Prévoyantes, sages, responsables, nous avions réservé une pousada. Rita, la patronne à la panse large et à l’opulente poitrine, est venue nous chercher au terminal d’autocars pour nous conduire à pied, sous une petite pluie fine, jusqu’à sa maison. Nous logerons dans une annexe dont la rue, qui se termine par un chemin de terre, conduit à la rivière, à ses piscines naturelles d’eau rouge et pleine de fer. Rita nous laisse, nous dormons jusqu’à midi. A notre réveil, nous faisons un petit repérage dans la ville au décor d’opérette, modestes bâtisses colonniales aux vives couleurs, rues pavées, et désertes, à cette heure où le soleil cogne sévère. La rivière nous tend les bras, paréos do Braziou, bouquins, appareils photos en main, on va lui faire un gros câlin. Les bahianais sont là, qui se baignent, plongent, et backflippent dans tous les sens, pendant que nous lisons et nous rafraîchissons tranquillement en les observant, admiratives devant cette jeunesse musclée qui se donne en spectacle pour le plus grand plaisir des touristes à la fesse molle. L’après-midi s’écoule calmement, au chaud, au frais, au nordeste de ce Brésil dont nous découvrons les merveilles à deux, entre françaises, entre copines. Enfin, l'après-midi s'est passée calmement, presque. Nous avons bien failli disparaître avec Sophie. Il y avait un petit rapide, dans lequel nous nous sommes laissées entraînées, pour venir nous fracasser sur un rocher sur lequel il passait... Une peur grande comme le Brésil. Sophie garde les stigmates de cet incident car elle s'est arrachée la peau au niveau du bassin, et tous les jours, la triste vue de ses croûtes nous rappelle notre imprudence. Bref!
Avec Rita, nous avons négocié de pouvoir disposer à volonté de la cuisine pour pouvoir y préparer nos petits repas. Normalement ça ne se fait pas, mais Rita, nous ne sommes pas riches comme Crésus, et les restos midi et soir, ça nous bouffe notre budget. L’heure du dîner a sonné, ça sera donc risotto aux légumes, délicieux, nourrissant. Le lendemain, départ en fiat blanche avec un couple de brésilien et un chauffeur, pour la cachoeira da Fumaça, la deuxième cascade la plus haute du Brésil. On nous dépose au bas d’une montagne que nous devrons grimper pendant deux heures avant d’assister au spectacle étourdissant de l’eau qui dégringole de la roche. Nous avons un guide, nous sommes huit. On se fait un plaisir de semer ce petit monde et tous les autres groupes qui nous précèdent, histoire de profiter à deux, seules et sans pigeons toutes casquettes et bananes dehors, de cette petite balade de santé. C’est quand même beaucoup plus cool que de se suivre à la queue leu-leu en ayant pour seule vue celle des postérieurs disgracieux de ceux qui sont devant vous… On gambade, on chante, on photographie, on hésite à chaque fois qu’on arrive à une croisée de chemin, et on la voit enfin, la haute, la superbe, la toute mouillée, la cascade. Tellement haute d’ailleurs qu’on n’en voit pas le fond… D’une grosse roche qui surplombe le vide, juste au dessus de la chute d’eau, des touristes en petit groupe se pressent, s’allongent, se penchent, crient comme des tarzans, se prennent en photo, devant ce décor, cette verdoyante nature qui se perd dans de larges canyons, interminables successions de collines et de creuses vallées qui nous renvoient l’écho des voix surexcitées. Sur le côté de la cascade, perchées en hauteur sur une grosse pierre, nous nous repaissons du spectacle de la nature, et des hommes qui la découvrent. Et on bouffe nos gros sandwich faits maison, en papotant gentiment. Bientôt il faut redescendre. Nous arrivons en bas, toutes paniquées à l’idée que notre groupe dont nous avons complètement perdu la trace, ne nous attende. Notre chauffeur est là, qui nous rassure, ils ne sont pas encore arrivés. Un jus de mangue frais et quelques clopes plus tard, ils débarquent, tous suants, et notre guide en nous voyant, nous demande si nous sommes des athlètes, étant donné la vitesse à laquelle nous les avons tracé… So class ! Nous regagnons la pousada bien crevées, de cette fatigue qui vous tient quand vous avez passé une journée qui vous en a mis plein les yeux, plein les jambes.
Le lendemain, direction le toboggan naturel, mais avant, une surprise. Au petit dej, qui vois-je attablés sympathiquement, parlant un français à l’accent chantant de Marseilleu ? 6 gaulois, dont 4 que je connais, puisqu’ils sont des amis de François de Monastir. Comme Pilou, leur voilier, Sonate, est un Sunfizz. A Mindelo, ils sont venus prendre un apéro chez nous, lorsque Sophie et moi avons rendu visite à mon cher et tendre skipper à Salvador, on les a croisé sur les pontons, et ce matin on se retrouve devant un café chaud, au cul du monde, c’est juste surréaliste… On discute gaiement, on se raconte nos traversées, je fais mon sempiternel laïus sur les skippers qui met tous les équipiers d’accord. Rita arrive, et profite de ce que je baragouine un peu beaucoup la langue pour me charger de traduire tout un tas de choses qu’elle veut communiquer à ses hôtes. Au final je finis par leurs vendre un circuit dans une agence dont elle percevra la commission, plus un repas pour 6 personnes qu’ils prendront au dîner dans sa pousada, le jour suivant. En gros je lui fais marcher son petit business, et je m’en souviendrai. Rien n’est jamais gratuit dans ce bas monde, rien, et on peut tirer profit de tout ! Le petit dej avalé, on se dirige vers le toboggan à pied, 45 minutes de marche dans une petite forêt, qui débouche sur une rivière, là encore, toute rouge. Il y a une énorme pierre en pente, qui prend toute la largeur, sur laquelle l’eau court et fait glisser pour leur plus grand bonheur, les popotins des baigneurs. Petit bain, pause pique-nique, puis enfin, il est temps de se frotter à la dalle, au risque d’endolorir nos délicates fesses. Car bon, le toboggan a des aspérités, des petites irrégularités, on est pas à l’aquaboulevard n’est-ce pas, et on sent que nos derrières risquent d’en prendre un sacré coup, si on ne fait pas très attention… On grimpe sur le côté, on arrive en haut, on étudie le terrain ; on voit arriver un grand black, dont la plage arrière bombonne de deux beaux airbags impressionnants de rondeur, on se dit celui là, peut importe les aspérités, il doit rebondir comme une balle de basket. On le voit dispenser des conseils à ses copines, je prête l’oreille, il a dit qu’il fallait garder les jambes bien fermées sinon on vrille dans tous les sens. Debout, superbe, généreux de dos comme de face, il se charge de donner de l’élan à ces demoiselles en leur indiquant la voie à emprunter. On se met à la file l’air de rien, sa grande paume ferme vient nous donner l’impulsion nécessaire pour dévaler la grosse pierre. Je m’élance, je serre les jambes, les fesses, les dents, grosses sensations, et plouf ! Dans l’eau. Sophie me suit et je peux profiter du spectacle hilarant qu’elle donne ; toute raide et constipée comme moi, elle garde les jambes serrées, les bras écartés, tendus comme des hautbans, et hyper sérieuse, elle dévale elle aussi la pente, en conservant malgré ses petits soubresauts, la droiture de la justice ! Je me tords, je me noie presque de rire. Nous restons toute l’après-midi dans ce petit paradis, explorant toutes les petites piscines naturelles, lisant, admirant une fois de plus les bahianais qui plongent et vrillent dans tous les sens, photographiant, et et et, on se fait même des copains, trois brésiliens, étudiants, et une canadienne baroudeuse, qui nous invitent à un anniversaire chez une de leur copine le soir même. Seul problème, nous avons un bus qui doit nous ramener à Salvador, et qui part ce soir là. De plus, rester une nuit encore nous coûterait cher, puisque justement, on comptait passer cette nuit-là dans le bus, et par la même , économiser une pousada. Mais, on se souvient des petits services rendus le matin même, et on se dit que vu l’ argent qu’on a fait gagner à Rita, avec ses petites com et son dîner pour 6 personnes, on est en droit de demander une petite faveur. On troque nos billets du soir même pour le lendemain, et on part à la pousada, séduire la Rita. Ola Anna tudo bom ? Oh oui ! On a passé une super journée mais j’ai une faveur à te demander . On a rencontré des brésiliens trop cool, on voudrait passer la soirée avec eux, sauf qu’on n’a pas le budget pour s’offrir une nuit en plus chez toi, penses-tu que tu pourrais nous l’offrir ? Pas de problème Anna ! Yes ! Trop facile ! Vive le Brésil, merci Rita ! On cuisine un risotto pour 6 dans la cuisine, et on part avec notre marmite remplie, ripailler dans la pousada de Katy, Bruno, Daniel et Jérémie. On dîne, on boit du vin brésilien immonde, et en route pour la fête. C’est Daniela qui reçoit, dans sa petite maison, on est presque les premiers. Elle a préparé un buffet avec de la nourriture et surtout, et surtout, il y a pléthore de fruits frais, mangues, maracuja, citrons verts, ananas, bananes, au milieu de tout cela trône un mixer, entouré de bouteilles de vodka, cachaça, rhum. Un énorme bac rempli de glaçon siège en dessous de la table, autant dire que c’est la fête aux cocktails. Au début, sages, on boit des caïpi, et au fur et à mesure que la soirée et notre état d’ébriété avancent, on se risque à de petites inventions maisons, c’est le bonheur. Tout cela en charmante compagnie, il y a là des étudiants, des guides touristiques, des vieux, des jeunes, des baroudeurs, des fous, des rastas, tout un mélange de professions et de nationalités, ça se parle en espagnol, en anglais, en portugais, ça chante et ça guitare, c’est le bonheur, la vie quoi ! Bientôt on est un peu trop ronds, on décide de changer d’ambiance, d’endroit et de se dégourdir les pates. Sophie et moi, on a une idée lumineuse, et si on allait se bourrer tous baignés dans la rivière les copains ??? Les copains, Daniel et Jérémie en l’ occurrence, ne sont pas , mais alors pas chauds du tout. Sauf que Sophie et moi on a l’idée fixe des gens qui sont bien pafs, et on ne démord pas. On va retrouver le chemin de la rivière en tirant par la peau du coup nos deux garçons qui traînent la patte, mais qui nous suivent quand même, parce qu’ils s’imaginent, ils espèrent, les naïfs, qu’on leur fera l’aumône d’un bisous sur la boubouche, pauvres fous ! Ils tremblent de peur les gros mâles, il fait noir, on est dans la forêt, on n’y voit rien. Sophie, brave, téméraire, audacieuse, complètement ivre, ouvre la marche, elle aurait eu les yeux fermés que ça n’aurait rien changé, il y a une visibilité inférieure à 0,001 mile. Je la suis, tout aussi grise, en traitant nos deux amis de peureux, de poltrons, de couards, et en leur faisant de la lumière avec mon mp3 pour les rassurer. On arrive en tâtonnant, quasi à quatre pattes, à la rivière, on se baigne habillées, nos deux copains sont en slip kangourous, on se fout allègrement de leur gueule, mais ils acceptent nos quolibets, toujours dans l’espoir que, d’un moment à l’autre, on se jette sur eux la bouche béante. Finalement le jour se lève, la faim se fait sentir, bon bah on va prendre le p’tit dej ! On se précipite dans notre pousada et les brésiliens rentrent brecouilles… cruelles ! Ah ah ! Le petit dej avalé, on débriefe la soirée qui n’est toujours pas finie pour nous puisqu’on a pas dormi encore, affalées dans les hamacs de la pousada, en écoutant de la super musique sur le petit ordi, et en buvant cafés sur cafés. Bientôt c’est l’heure de prendre le bus, on grimpe, on s’écrase pendant quelques heures, puis on découvre qu’ avec le mp3 de Sophie on peut écouter la radio brésilienne, et aussi s’enregistrer, on délire un bon moment, de bons fous-rires, avoir un bon copain… Faut dire que les délires dans les bus, ça nous connaît avec Sophie. Pendant les tournées à la chorale, on passait des heures dans les vans côtes à côtes, et on rigolait comme des idiotes. Là c’est un peu notre tournée à toutes deux, et quand on est en forme, comme ce jour-là, ça envoie de la vanne à deux balle et c’est trop bon ! Si on vous faisait écouter les enregistrements… bref. On arrive enfin à Salvador, on dîne dans une cantine au bout de la rue de notre pousada, il y a un jeune qui joue seul à la guitare, je lui emprunte deux fois le micro, on bouffe bien, et pour pas cher, bref, c’est la joie.
Le lendemain, branle-bat de combat, journée shopping, et shopping lourd. Il faut s’équiper pour chanter et pour camper. On s’achète une tente, des tapis de sols, une grille, une casserole, une lampe de poche, un micro pour la Sophie, des claves, un tambourin, des jacks tous neufs, j’ai fait réparer le yuku et la guitare, soit dix chevilles remplacées, un système d’ampli remis d’aplomb, des nouvelles cordes, un micro posé sur le yuku, bref, c’est la fête, l’effervescence, à l’idée des treks et des shows de folie qui se préparent. On prend le bus à 20h, direction le nord, direction Recife. On est chargées comme des baudets. Deux sacs à dos « scouts », deux sacs à dos normaux, un sac de voyage à roulette avec mes fringues et du matos, la guitare, le yuku, le pied de micro, le tabouret, et le fidèle charriot, qui prend la batterie de 12, l’ ampli, et le chargeur black et decker. On s’arrête à Japaratinga, petite bourgade touristique bordant une plage paradisiaque. On est comme des connes à l’ arrêt de bus avec tout le bordel, ici il n’y a que des motos taxis, et pas de voitures taxis, drôle de coin. J’enfourche une moto, avec pour mission de trouver une caisse et une pousada. Je trouve une pousada à l’arrachée qui a des chambres de libres dans nos prix, je vois dans la rue un mec s’avancer vers sa voiture, je lui demande s’il veut bien m’aider à trimballer tout notre petit monde, il accepte tout de suite, on part retrouver la Sophie qui cuit au soleil sur le bord de la route entourée de tout une petite cour de sacs à dos et de matos de musique, on charge tout, direction la pousada qui est charmante, toute colorée, accueil chaleureux, petites chambres coquettes, on paie 70 au lieu de 80, café italien, wi-fi gratuit, le bo-nheur ! Ce soir on s’est fait une énorme langouste chacune au resto, la ville est un peu vide et morte, et si on voit que demain c’est pareil, on bouge dans un coin où ça bouge un peu plus, histoire de faire un peu de sous avec la musique !
On a un très don feeling avec les gens en général. Il faut dire qu’avec le joli minois de Sophie et mon brésilien assez bien maîtrisé, on forme un petit couple très sympatique, agréable à regarder et à écouter. Ils sont en général absolument désolés de constater que Sophie ne parle pas la langue, qu’elle parle en fait de plus en plus, car dans un mois, elle sera lâché dans la nature avec son Charles, qui ne parle pas un mot pour le coup, et je ne serai pas là pour palabrer avec les locaux. Et au final pas_mal de gens parlent anglais comme elle, donc au bout d’un moment tout le monde peut communiquer. Elle sait donc commander un taxi, se diriger, demander combien ça coûte, compter jusqu’à dix, tous les jours elle apprend un petit quelque chose et imprime tout très vite. Comme avec Laurence en Argentine, on fait tout un tas de rencontres sympathiques, on apprend plein de choses sur le Brésil, on a des retours très différents sur la politique, l’insécurité, mais tout le monde est d’accord pour nous dire qu’ici c’est la joie de vivre, la chaleur, la musique et la danse, le bonheur quoi ! Je suis malgré tout un peu lasse de la rencontre en général. Elle est toujours éphémère et apporte son lot de répétitions en tous genres. On répète mille fois qui l’on est, d’où l’on vient, où on va, qu’ est-ce qu’on aime, qu’est ce qu’on aime pas. On nous conseille dix mille endroits différents qui son imperdivel, on ne sait plus où donner du billet de bus, et on nous répète toujours les mêmes choses sur la France, Sarkozy est populaire alors qu’il ne l’est pas tant que ça, Carla Bruni première dame de France, oh my God, et pourquoi que les français ils n’aiment pas parler d’autres langues et surtout l’anglais, alors qu’ils ont devant eux un exemple parlant que ça n’est pas vraiment le cas non plus. On passe de bons moments, c’est clair, mais je fatigue un peu et me décourage intérieurement à chaque fois qu’on nous aborde, en me disant, et c’est reparti pour un tour ! ça serait tellement bon de voir sans être vues parfois ! Je fatigue aussi comme toujours depuis que je voyage, de voyager justement, et de ne jamais m’enraciner vraiment. Quand Sophie sera partie, ça sera déjà le mois de mars, et je devrai revenir en juin, ça fait trois petits mois, c’est rien ! Trois mois où je devrai trouver le temps pour enfin faire mon trou quelque part, et en plus je crève d’envie de retourner aux caraïbes pour voir les tchèques, mais je ne veux pas prendre l’avion, donc ça va prendre du temps, autant dire que c’est impossible de concilier toutes mes envies. J’ai envie d’avoir encore six mois devant moi, d’en passer 5 dans un endroit, qui ne soit pas que touristique, où je puisse rencontrer des jeunes de mon âge ET de mon milieu. Il y a une chose que j’ai apprise, c’est que quoiqu’il arrive, on n’échappe pas à son milieu. Je ne peux pas passer ma vie à traîner avec des guides, des pizzaïolos et des vendeurs de bière de la rue, j’adore discuter avec eux, connaître leur point de vue sur les choses de la vie, apprendre de leur rage de réussir ou de leur capacité à être heureux sans rien, leur demander tous les jours comment s’est passée la journée, les faire voyager en leur parlant de la France et de la mer, mais j’ai besoin de recréer autour de moi un petit monde similaire à mon monde français, avec des vrais copains. Trois mois c’est trop peu pour ça. Bref, petit moments difficiles parfois où je me demande où je vais et qu’est ce que je fous là. Si je pense en mode Anne la folle, c'est-à-dire sans songer au lendemain, je suis ravie de ce que je vis et je n’y vois que du bon, si je pense en mode vierge sage avec la petite voix des parents, les miens et ceux des autres, la famille etc…, je me dis, à quoi bon, et où ça mène ? alors je ne sais plus quoi faire. Car j’ai l’impression que chaque décision que je prends peut changer le cours des choses, si je reste au Brésil, si je vais à St Martin, si je retourne en France et décide de ne plus en repartir, quelle que soit ma décision, elle apportera son lot d’évènements, de rencontres, d’opportunités et de chances qui viendront modifier le tracer de ma petite existence, et ça me stresse ! Bref, c’est le grand bazar dans ma tête… Mais pour le moment, Sophie est là, oh bonheur, oh joie! Ne penser qu’à ça, tomorrow is another day, comme dirait notre copine Scarlett….
mardi 19 janvier 2010
La grandes retrouvailles
Je suis absolument impatiente de retrouver la Sophie, je ne ferme pas l’œil ! Juste à côté de ma pousada il y a une station service avec cyber ouvert h24, j’y passe la nuit en regardant des épisodes de desperate housewives en streaming. Toutes les deux heures je tombe de sommeil et retourne me coucher mais une fois allongée dans mon lit je ne pense qu’ à une chose, Sophie arrive, et je suis incapable de m’endormir, alors je retourne au cyber pour passer le temps. Bientôt il est l’heure de mon rendez-vous avec le chauffeur de taxi de la veille que j’ai rebooké pour aujourd’hui, j’embarque, direction l’ aéroport. L’avion de Sophie a 20mn de retard, que je passe à cafer-clopper, toute tremblante d’impatience. J’ai un sourire scotché aux lèvres en permanence que je distribue à tout l’ aéroport car je passe mon temps à imaginer nos retrouvailles et ça me met en joie ! Je vais à la porte des sorties de tapis roulant à bagages, et bientôt je l’ aperçois, elle est en bleu marine comme je le pensais, déjà en short, blanche comme un cachet, mais elle arbore un sourire grand comme le mien, et quand je la vois, je ne peux m’empêcher de pousser un cri qui fait retourner mes voisins. Mais il faut encore qu’elle récupère ses affaires, je dois patienter. Je discute avec une mère et sa fille, des cariocas très sympathiques, au moment où la maman me dit qu’elle a une copine parisienne producteur de musique Sophie arrive, j’oublie tous mes rêves de gloire, on se serre dans les bras, je dis aurevoir à la carioca, et on part bras dessus bras dessous se poser dehors un temps avant de sauter dans le taxi. La pauvre Sophie. Pendant toute la journéee, je vais vomir mes 4 mois de voyages dans son oreille, je ne m’arrêterai pas de raconter jusqu’au soir, tout tout tout, absolument tout. Denis, la traversée jusqu’à Madère, Madère, les tchèques, Nicholas, le rallye, François, les skippeurs, Andy the danish guy, la musique, la grande traversée, Ilha Grande, Eric, Solo, tout y passe. Bien sûr elle me raconte aussi Paris, les copain, les familles, bref, pendant 24h, sur la plage, au resto, à la pousada, on se dit tout et ça fait tellement de bien ! Tellement de bien de voir un visage connu, familier, aimé, aimant, la vieille copine de toujours, la sœur, de lui parler, de la toucher, et de tout partager avec elle ! Je suis absolument aux anges, et je pense qu´elle aussi. On passe la première journée à bronzer, à tchatcher, à se baigner, c’ est le bonheur. En plus Sophie n’ est pas venue les mains vides. Des parents, elle m’a rapporté un tout petit ordinateur, des livres de pêcheurs de lune et d’aventures, et une boîte de foie gras. De sa part, une bouteille de vin blanc, une part de galette des rois et un livre de sœur Emmanuelle. Comble du bonheur, j´ai eu la fève, ça ne m´arrive jamais! Je pensais naïvement que ce n´était que coïncidence et j´y voyais le signe annonciateur d´une année faste et prospère, mais en fait Sophie avait fait les choses bien, et avait emporté exprès la part avec la fève...! Aude m´a fait parvenir des photos développées des copains et de Laurent que je caresse et contemple amoureusement presque tous les jours. C’est Noël en retard, et un des meilleurs que j’ aie jamais vécu ! Le soir, on embarque le foie gras, du pain et la bouteille de vin, direction un ponton de la marina de Salvador pour déguster toutes ces merveilles de la gastronimie française. Je me gave, Sophie grignotte, on discute, c’ est juste trop bon. Bientôt ratrappées par le sommeil, nous rentrons bien sagement nous coucher dans la petite pousada trop mignonne du quartier de Barra.
mercredi 13 janvier 2010
Back to Salvador
Les voyages en bus. Il n´y a que ça de vrai. Les gens ouvrent des yeux tous rond quand je leurs dis que j´adore ça, pourtant, je n´y vois que du bon. Déjà c´est tout confort. Pour vous donner une idée, c´est l´équivalent, au niveau de l´inclinaison des sièges, de l´espace dont on dispose, du moelleux de la texure des fauteuils, d´un business class Air France. Ensuite, il y a les paysages. Des plaines, des forêts, des montagnes, des rivières, la mer, les villes, les village, on passe partout, on voit tout. Un mp3 vissé dans les oreilles avec la bonne musique de VCP, les yeux collés à la vitre, je suis juste au paradis. Seconde chose. Quand on fait
30h de bus, on se tape 5 box-offices américains, sous-titrés en portugais, et ça ça vaut tous les cours de langues du monde, et en plus on peaufine sa culture cinématographique. Robocop, MIB, on ne se doutait pas de la portée philosophique hautement essentielle du propos de ces blockbusters... Ensuite, quand on ne regarde pas la vue, ou un film, on dort. Sur les 30h de ce trajet, j´en ai dormi 21, ce que j´ai considérablement apprecié. Comme je suis pas grande, je trouve très facilement une position confortable, et une fois que je suis lancée, plus rien ne m´arrête, si fait que j´ai raté la pause dîner hier soir, et celle du petit-dej ce matin, mais je me suis gavée de sommeil, et ça c´était trop bon! Sur les deux dernières heures par contre je n´ai pas fermé l´oeil. La Sophie a-t-elle décollé? A-t-elle retrouvé Ines? Mon bus a deux heures de retard, j´espère qu´elles vont pas s´inquiéter, la pousada a-t-elle pris en compte la resa, etc etc... On arrive. Je descends, vais chercher un careitero, il charge tout mon bordel sur sa petite charette, accepte de m´attendre pendant que je vais sur internet tchecker la resa de l´hostel, l´arrivée de Sophie et l´adresse où je dois la rejoindre que j´ai complètement zappé de demander... Total, Sophie n´a pas décollé, elle arrive le lendemain, petite déception mais quand même bien contente de pouvoir l´accueillir moi-même, coup de fil a la pousada, il y a de la place, vamos la, allez careitero, on va prendre un taxi, et transférer le bordel attention attention! C´est très fragile, ne fais pas tomber ne fais pas tomber!!!! Nao quebra nao quebra! Attention!!! Elle a failli tomber!!!! Enorme stress, je crie, je gueule, ils trimballent mon charriot comme si il était rempli de saloperies du supermarché, ils ne savent pas qu´íl y a ma vie là-dedans! Toda a mia vida, si quebra, eu muero! Je suis sur-nerveuse, le taxi me laisse fumer une cloppe, tranquila, tranquila... Voce va tomar uma caïpirinha, voce va relaxar... ouais, je t´emmerde (tu, pensé), hue cocotte! J´arrive à la pousada, on me transporte mes affaires, bien droit comme il faut, je dirige tout ce petit monde, insupportable... Bien par en-dessous, sinon ça tombe, attention la marche, non là ça va pas passer, faut tourner, mais attention quand on tourne, faut tenir par en dessous, sinon ça tombe, voilà, faut poser doucement, doucement! C´est de l´acide, c´est toxique, c´est dangereux, c´est mortel!!! Merci, merci beaucoup, désolée, je suis très stressée, c´est toute ma vie qu´il y a dans ce charriot, c´est trés important pour moi, pardon hein, mais s´il arrivait quoique ce soit je deviendrais folle, pire que maintenant, ah oui hein, vaut mieux pas que ça arrive, parce que là c´est limite je sais, pardon désolée, desculpe desculpe. Demain 9h pour l´aéroport? Sans rancune? A demain alors! Oui, la caïpirinha, j´oublie pas! A demain! Ouf! On me donne un lit, des draps, une serviette, je prends une douche, chante avec le yukulélé tu voi fare l´americano a trois italiens absolument ravis, et je repars aussi sec à la marina, voir Nicole, François, et Pilou. Manque de bol, François vient de partir avec Nicole qu´il raccompagne à l´aéroport. Je suis dégoûtée, je vais même pas revoir Nicole. Mais je verrai François le ledemain, ça c´est patate. Paul dort et part le lendemain, raté aussi, mais Claudia est là, qui prend un pot sur African Seawing un énorme catamaran du rallye, le château de versailles sur deux flotteurs, avec Frank et Martha. Je monte à bord, on discute et Franck me dit: "Mais c´est quand même risqué ce que tu fais, parce que soit il faut que tu devienne richissime, soit t´es dans le pétrin, parce que tu cottises pas pour ta retraite" Je lui dis que je deviendrai richissime. Il a l´air d´en douter. Il dit, il y a plein de gens qui sont bourrés de talents et qui ont pas un rond, d´un air, alors toi... Certes Franck je ne suis ni Jacques Brel ni Céline Dion, mais l´important dans notre monde, c´est de savoir communiquer, c´est presque plus important que l´essentiel, le talent. Aujourd´hui c´est plus cogito ergo sum, c´est comunico ergo sum, donc t´inquiète pas pour moi, niveau com, je gère. Il m´a presque énervé avec son air de dire que j´avais pas grand chose pour moi à part ma jeunesse, parce que le jour où tu seras vieille qu´est ce que tu feras? Ben on verra, toi déjà tu seras depuis longtemps dans ta tombe en train de te faire bouffer par les vers, alors c´est pas tes oignons! Non mais je rêve! Bon je m´emporte un peu, mais le belge m´a piqué au vif, je l´avoue. C´est qu´au fond il a à moitié raison, la vérité blesse, on n´oublie pas...mais je préfère croire qu´íl a tord sur toute la ligne, parce que si je me mets à douter, je suis fichue, et n´irai pas bien loin. Dans l´absolu ils sont absolument charmants sur African Seawing, je les ai toujours aimé, et au fond j´apprécie la franchise de Franck qui ne fait que me booster davantage. C´est vrai que je vais faire quoi quand j´aurai 40 balais, ménopausée, sans gamins, sans mari, sans métier? Non non j´y pense pas, vaut mieux pas! Pour le moment je suis bien jeune, pas encore ridée ni frippée, je ne suis pas morte à Ilha grande, je ne suis pas morte au Cap Finistère, Jesus, O cristo redentor, veut visiblement que celle qu´il aime encore et toujours, vive, j´ai un petit talent que j´exploite plus qu´à fond, je m ´éclate et je vais rejoindre mon futur mari aux caraïbes dans pas longtemps, la vie est belle, aux chiottes la retraite et les cottises!
Sophie arrive demain, je la cueille à l´aéroport, direction la pousada pour poser les affaires, puis un petit hotel de charme que je connais dans le centre historique, ou on petit dej à volonté en profitant de la piscine même si on est pas client, le bo-nheur! Et demain en plus c´est la fete du Bonfim, aucune idée de ce que c´est mais en gros, c´est musique danse et caïpi à GOGO!!!!! A demain Sophie!!!
30h de bus, on se tape 5 box-offices américains, sous-titrés en portugais, et ça ça vaut tous les cours de langues du monde, et en plus on peaufine sa culture cinématographique. Robocop, MIB, on ne se doutait pas de la portée philosophique hautement essentielle du propos de ces blockbusters... Ensuite, quand on ne regarde pas la vue, ou un film, on dort. Sur les 30h de ce trajet, j´en ai dormi 21, ce que j´ai considérablement apprecié. Comme je suis pas grande, je trouve très facilement une position confortable, et une fois que je suis lancée, plus rien ne m´arrête, si fait que j´ai raté la pause dîner hier soir, et celle du petit-dej ce matin, mais je me suis gavée de sommeil, et ça c´était trop bon! Sur les deux dernières heures par contre je n´ai pas fermé l´oeil. La Sophie a-t-elle décollé? A-t-elle retrouvé Ines? Mon bus a deux heures de retard, j´espère qu´elles vont pas s´inquiéter, la pousada a-t-elle pris en compte la resa, etc etc... On arrive. Je descends, vais chercher un careitero, il charge tout mon bordel sur sa petite charette, accepte de m´attendre pendant que je vais sur internet tchecker la resa de l´hostel, l´arrivée de Sophie et l´adresse où je dois la rejoindre que j´ai complètement zappé de demander... Total, Sophie n´a pas décollé, elle arrive le lendemain, petite déception mais quand même bien contente de pouvoir l´accueillir moi-même, coup de fil a la pousada, il y a de la place, vamos la, allez careitero, on va prendre un taxi, et transférer le bordel attention attention! C´est très fragile, ne fais pas tomber ne fais pas tomber!!!! Nao quebra nao quebra! Attention!!! Elle a failli tomber!!!! Enorme stress, je crie, je gueule, ils trimballent mon charriot comme si il était rempli de saloperies du supermarché, ils ne savent pas qu´íl y a ma vie là-dedans! Toda a mia vida, si quebra, eu muero! Je suis sur-nerveuse, le taxi me laisse fumer une cloppe, tranquila, tranquila... Voce va tomar uma caïpirinha, voce va relaxar... ouais, je t´emmerde (tu, pensé), hue cocotte! J´arrive à la pousada, on me transporte mes affaires, bien droit comme il faut, je dirige tout ce petit monde, insupportable... Bien par en-dessous, sinon ça tombe, attention la marche, non là ça va pas passer, faut tourner, mais attention quand on tourne, faut tenir par en dessous, sinon ça tombe, voilà, faut poser doucement, doucement! C´est de l´acide, c´est toxique, c´est dangereux, c´est mortel!!! Merci, merci beaucoup, désolée, je suis très stressée, c´est toute ma vie qu´il y a dans ce charriot, c´est trés important pour moi, pardon hein, mais s´il arrivait quoique ce soit je deviendrais folle, pire que maintenant, ah oui hein, vaut mieux pas que ça arrive, parce que là c´est limite je sais, pardon désolée, desculpe desculpe. Demain 9h pour l´aéroport? Sans rancune? A demain alors! Oui, la caïpirinha, j´oublie pas! A demain! Ouf! On me donne un lit, des draps, une serviette, je prends une douche, chante avec le yukulélé tu voi fare l´americano a trois italiens absolument ravis, et je repars aussi sec à la marina, voir Nicole, François, et Pilou. Manque de bol, François vient de partir avec Nicole qu´il raccompagne à l´aéroport. Je suis dégoûtée, je vais même pas revoir Nicole. Mais je verrai François le ledemain, ça c´est patate. Paul dort et part le lendemain, raté aussi, mais Claudia est là, qui prend un pot sur African Seawing un énorme catamaran du rallye, le château de versailles sur deux flotteurs, avec Frank et Martha. Je monte à bord, on discute et Franck me dit: "Mais c´est quand même risqué ce que tu fais, parce que soit il faut que tu devienne richissime, soit t´es dans le pétrin, parce que tu cottises pas pour ta retraite" Je lui dis que je deviendrai richissime. Il a l´air d´en douter. Il dit, il y a plein de gens qui sont bourrés de talents et qui ont pas un rond, d´un air, alors toi... Certes Franck je ne suis ni Jacques Brel ni Céline Dion, mais l´important dans notre monde, c´est de savoir communiquer, c´est presque plus important que l´essentiel, le talent. Aujourd´hui c´est plus cogito ergo sum, c´est comunico ergo sum, donc t´inquiète pas pour moi, niveau com, je gère. Il m´a presque énervé avec son air de dire que j´avais pas grand chose pour moi à part ma jeunesse, parce que le jour où tu seras vieille qu´est ce que tu feras? Ben on verra, toi déjà tu seras depuis longtemps dans ta tombe en train de te faire bouffer par les vers, alors c´est pas tes oignons! Non mais je rêve! Bon je m´emporte un peu, mais le belge m´a piqué au vif, je l´avoue. C´est qu´au fond il a à moitié raison, la vérité blesse, on n´oublie pas...mais je préfère croire qu´íl a tord sur toute la ligne, parce que si je me mets à douter, je suis fichue, et n´irai pas bien loin. Dans l´absolu ils sont absolument charmants sur African Seawing, je les ai toujours aimé, et au fond j´apprécie la franchise de Franck qui ne fait que me booster davantage. C´est vrai que je vais faire quoi quand j´aurai 40 balais, ménopausée, sans gamins, sans mari, sans métier? Non non j´y pense pas, vaut mieux pas! Pour le moment je suis bien jeune, pas encore ridée ni frippée, je ne suis pas morte à Ilha grande, je ne suis pas morte au Cap Finistère, Jesus, O cristo redentor, veut visiblement que celle qu´il aime encore et toujours, vive, j´ai un petit talent que j´exploite plus qu´à fond, je m ´éclate et je vais rejoindre mon futur mari aux caraïbes dans pas longtemps, la vie est belle, aux chiottes la retraite et les cottises!
Sophie arrive demain, je la cueille à l´aéroport, direction la pousada pour poser les affaires, puis un petit hotel de charme que je connais dans le centre historique, ou on petit dej à volonté en profitant de la piscine même si on est pas client, le bo-nheur! Et demain en plus c´est la fete du Bonfim, aucune idée de ce que c´est mais en gros, c´est musique danse et caïpi à GOGO!!!!! A demain Sophie!!!
lundi 11 janvier 2010
Va con Deus
A l´heure où j´écris, je suis un peu paf. Je n´ai pas mangé depuis 4h de l´aprème et uma caïpirinha bem cargada me met en joie, en plus de la joie que me vaut le "show" tout particulier que je viens de faire. Première fois que je joue vraiment des compos, et ça c´est énorme. Faire kiffer des gens qui ne sont pas de chez moi avec des choses qui viennent de moi, et qui ne sont pas écrites dans ma langue natale, c´était assez magique. J´avais déjà joué la chanson de Martin "I want you so badly" (I want him so badly!) au Maroc, mais pas travaillée avec le jamman, ni rien, pas propre quoi. Ça avait marché mais je n´en tirais aucun mérite. Là c´est différent. Depuis trois ou quatre jours je ne sors plus de la pousada, j´ai déplacé tout mon bordel dans ma chambre, notre chambre, qui s´est transformée en studio de répète improvisé. On est quatre dedans maintenant, Jade, le serveur gay, Roberto, le cuisinier ventripotent et célibataire, et la guide brésilienne dont je ne connais même pas le nom. J´ai refusé toputes ses invites à se balader, dejeuner ou boire un verre, nao posso, je dois trabalar! Mes journées se déroulent ainsi.
Je me lève, vers 8h, vais me baigner dans la cascade au fond du jardin, me pourceotte de gateau, pain, beurre, fruits, café au lait, jus d´orange pressé, jambon, fromage, oeuf brouillés. Ça doit tenir jusqu´au soir. Et ça tient. Je prends une douche, et je me branche. Je joue, je joue, je répéte, je boucle, je sample dans tous les sens. Je prends des pauses cafés- clopes- cascade entre temps. Puis vers 13h 14h, Massi la cuisinière, a toujours besoin de l´adaptateur 120-220 volts dont je me sers et que me prête Klaus le patron, pour couper le fromage avec la machine a trancher qui fait du 220. Donc je me débranche et vais passer le temps dans la cuisine-buanderie avec Massi, Nate et Fernanda, les employées, pendant qu´elles lavent, repassent et cuisinent. Je parle portugais, les mitraille avec mon appareil, apprends à les connaître, et à les apprécier, comme d´hab. Hier ou avant-hier, je leur ai fait des crêpes, c´était trop la fête, elles ont tout bouffé, les morfales! Après tout le monde est allé se baigner dans la cascade, juste le bonheur! Quand Massi a fini avec le fromage, je récupère l´adaptateur, je me rebranche et continue à chanter, répéter, composer, cascader, caffer-clopper jusqu´á ce qu´il fasse nuit et que tous les gens de la pousada rentrent dans leurs chambres. Par respect, je débranche... Je sors, je vais dîner, et fais plein de rencontres et parle portugais dans tous les sens. Je regarde aussi TV5, dans la pousada, j´ai le droit de regarder la TV privée des patrons, comme les employés, trop la classe! Je vois qu´il fait -5 en France, et je rigole, je rigole!!! Je suis aux anges! Je pète de chaud et je vous plains, c´est trop bon...! Bref, depuis 3-4 jours, c´est le bonheur total. je suis détendue, ouverte aux autres, je parle, j´échange, je produis, j´apprends, je regarde, j´écoute, je me baigne, je bronze, je fais de la musique, félicité, quand tu me tiens! Et ce matin, mon Dieu! Je suis maussade. Dernier jour. Je ne peux décemment pas partir sans chanter. 4 jours que tout le monde, les locaux, les restaurateurs, me demandent quand ils me voient passer "Nao vai tocar hoje ana?" 4 jour que je dis après après! Alors aujourd´hui il faut que j´y aille, question de respect. Je me lève, je me fais un p´tit plaisir, petit-dej TV5 dans la cuisine. les filles me demandent si je vais passer la journée avec elles, on va se baigner, on fait des crêpes? Ah Nao, tenho que ir trabalar... et ça me fait trop chier! Je veux rester dans mon petit coin , dans ma pousada toute jolie, profiter des derniers bains, des derniers rayons de soleil, des derniers délires avec les filles, mais non! Anne , tu dois aller faire ton devoir, travailler et tenter de trouver une solution pour que Sophie que tu vas rater à Salvador, soit accueillie par quelqu´un de confiance! Je devais partir ce matin à 10h, mais j´avais laissé tout mon bordel que j´avais descendu en prévision pour pas avoir a me le trimballer et payer un carreitero, dans mon resto de d´habitude, qui n´ouvre qu´à 12h et ça j´avais zappe. Je n´ai pas paniqué hier soir en me rendant compte que je ne pourrais pas partir ce matin avec le bateau de 10h, me disant que Sophie arriverait de toute façon le 14. je pensais qu´elle partait le 13. En fait elle arrive le 13 et moi j´arrive du coup 3h aprés elle au lieu de 24h avant. Heureusement Marcos mon cousin connait Roberto Cavalho dont la maman va aller chercher sophie à l´aéroport. Tout va bien donc. Je descends vers 13h, récupère mon bordel au resto, me plante, joue, comme d´hab, tout roule, tout le monde kiffe, y a trois pecnos ( l´île est désertée après le battage médiatique autour des éboulements et de la pluie, logique), j´arrive quand même à tirer 80 reais, 35 euros. Un charmant carioca m´aide à ranger, on va sur la plage ensuite, il joue divinement de la guitare, est très classe, très bien élevé, assez beau-gosse, moment très agréable. On échange les mails pour que je l´appelle quand je vais à Rio. Je vais ensuite sur internet, trouve la solution Ines Carvalho pour sophie, et repart chanter devant mes terrasses, cette fois-ci la peur au ventre, j´ai décidé de lancer les compos, celle de Martin, et une en portugais sur le brésil. Avec samples, petites percus, lignes de basses et tout le toutim. Ça passe très bien, surtout celle de Martin qui est bien longue, bien travaillée, quand elle est applaudie, et chaudement, je suis juste transportée, je vole sur un petit nuage. je crois que la brésilienne n´a pas été trop comprise, il faudra re-bosser dessus. Un américain me met 20 reais (j´ai grillé) en me disant "It was amazing", je ne me sens plus péter, je ne m´entends plus jouer! Le carioca de l´aprés-midi revient avec un cd dans la main, il m´a gravé plein de chansons brésiliennes que je pourrais jouer en concert, trop chouette! Deux françaises sont justes trop fières que ça soit une compatriote qui fasse ce "truc de fou", deux brésiliens et une brésilienne m´ invitent à leur table et me font boire deux caïpirinhas, une offerte par le patron, un par eux, c´est pour ça que je suis un peu paf maintenant... Le patron, o patrao, comme je l´appelle. Il me fait bien rire. Après les éboulements, y a eu une desertion générale de l´île. On est passés de la haute à la basse saison en 3 jours. Moi j´ai chanté un peu, après les accidents, et je voyais bien que le resto se remplissait aprés que j´arrive, et que les gens, excusez moi si je parais prétentieuse, mais ils étaient là pour moi, c´est clair. Quand vous voyez des gens qui passent, qui s´arrêtent, vous regardent, et après demandent à ce qu´on leur déplie des tables, s´installent bien face a vous, vous avez le droit de penser que vous êtes à l´origine de la décision qu´ils ont prise de venir manger là. Bon. Alors une fois, je n´ ai pas fait assez de sous, et clairement, j´en avais rapporté au patron. Je lui dis, por favor, voce pode colaborar? Et il me dit que non! Il me garde mes affaires, ça suffit! J´ai 60 berge, ça fait 20 ans que je suis ici, le resto n´a pas besoin de toi pour se remplir, d´ailleurs, je n´aime pas les musiciens, il n´y a que toi que je laisse jouer, parce que je t´aime bien et que j´aime bien ce que tu fais. Oh l´affront! Oh l´affreux! J´ai cru que j´allais lui faire bouffer sa caisse et la mienne avec! Je l´ai sevré du câlin d´aurevoir quotidien, et je suis partie furibarde. Le lendemain, dégoûtée, je remballais mes affaires dans ma pousada. Après, tous les jours, quand je passais devant le resto, il me disait, tu vas chanter quand, tu vas chanter quand? Il me montrait la terrasse, toute vide, as cosas sao fracas, y a personne! Je disais je ne sais pas, demain peut-être, je ne sais pas... Ah ah! Il le voit bien maintenant que je les lui ramène ses clients! De toute façon c´est ma technique. Je m´installe, et fais venir les gens, qui vont faire marcher le resto, (qui me tolèrent, par conséquent, et maintenant me harcèlent pour que je revienne, au point que les deux derniers jours je faisais des détours pour ne pas avoir à passer devant eux), et qui vont venir remplir ma boîte. les clients mangent, ils écoutent de la bonne musique, et ils m´arrosent, tout contents quí´ls sont d´avoir vécu un truc un peu spécial, et d´avoir épicé leur album photo. Tout le monde y trouve son compte, c´est assez parfait. Aujourd´hui c´était assez spécial, tout le monde a dégainné sa caméra sur la chanson de Martin, parce qu´íl y a de la percu, de la ligne de basse, du yukulele et tout, donc elle dure dix minutes, et elle est intéressante parce qu´il se passe plein de trucs, je change d´instrus, je tripote les boutons, les pédales et les cordes dans tous les sens, les gens ont trop aimé, et moi j´etais toute fière de me dire qu´ils étaient en train de filmer ma chanson à moi, bonheur! Plein de films, plein de photos, je suis dans la carte mémoire de tout un tas d´appareils depuis le début de cette aventure...Le concert fini, je suis allée dire aurevoir à tous les employés des restos terrasses sur lesquels j´ai chanté, va con Deus, grandes embrassades, je ne vous oublierai jamais, et nous non plus, beijos, beijos, ate logo, ate a prossima, a gente se falla, tudo ligao, belleza!
Voilà maintenant, Ilha Grande c´est fini, je dis toujours que je vais revenir mais c´est pas vrai, parce qu´íl y a tant d´autres endroits à voir, de gens à connaître, de touristes à faire kiffer...Je vais rentrer bien sagement dans ma pousada, fumer un cloppe en regardant tv5, me coucher, et demain, je pars pour Rio, pui pour salavador, retrouver la Sophie! Youhou!!!!!!!!!!!!!
Et bon, aujourd´hui est quand même un jour à marquer d´une croix blanche, parce que j´ai vraiment pris confiance en moi, en ma capacité à composer et jouer mes chansons, c´était ça que je cherchais depuis le début, et je savais que j´allais trouver cette confiance et cette énergie hors de France, toute forcée que je serais à me botter le cul pour pouvoir exister, en tant que chanteuse, en tant que jeune femme, en tant que moi quoi...
Je me lève, vers 8h, vais me baigner dans la cascade au fond du jardin, me pourceotte de gateau, pain, beurre, fruits, café au lait, jus d´orange pressé, jambon, fromage, oeuf brouillés. Ça doit tenir jusqu´au soir. Et ça tient. Je prends une douche, et je me branche. Je joue, je joue, je répéte, je boucle, je sample dans tous les sens. Je prends des pauses cafés- clopes- cascade entre temps. Puis vers 13h 14h, Massi la cuisinière, a toujours besoin de l´adaptateur 120-220 volts dont je me sers et que me prête Klaus le patron, pour couper le fromage avec la machine a trancher qui fait du 220. Donc je me débranche et vais passer le temps dans la cuisine-buanderie avec Massi, Nate et Fernanda, les employées, pendant qu´elles lavent, repassent et cuisinent. Je parle portugais, les mitraille avec mon appareil, apprends à les connaître, et à les apprécier, comme d´hab. Hier ou avant-hier, je leur ai fait des crêpes, c´était trop la fête, elles ont tout bouffé, les morfales! Après tout le monde est allé se baigner dans la cascade, juste le bonheur! Quand Massi a fini avec le fromage, je récupère l´adaptateur, je me rebranche et continue à chanter, répéter, composer, cascader, caffer-clopper jusqu´á ce qu´il fasse nuit et que tous les gens de la pousada rentrent dans leurs chambres. Par respect, je débranche... Je sors, je vais dîner, et fais plein de rencontres et parle portugais dans tous les sens. Je regarde aussi TV5, dans la pousada, j´ai le droit de regarder la TV privée des patrons, comme les employés, trop la classe! Je vois qu´il fait -5 en France, et je rigole, je rigole!!! Je suis aux anges! Je pète de chaud et je vous plains, c´est trop bon...! Bref, depuis 3-4 jours, c´est le bonheur total. je suis détendue, ouverte aux autres, je parle, j´échange, je produis, j´apprends, je regarde, j´écoute, je me baigne, je bronze, je fais de la musique, félicité, quand tu me tiens! Et ce matin, mon Dieu! Je suis maussade. Dernier jour. Je ne peux décemment pas partir sans chanter. 4 jours que tout le monde, les locaux, les restaurateurs, me demandent quand ils me voient passer "Nao vai tocar hoje ana?" 4 jour que je dis après après! Alors aujourd´hui il faut que j´y aille, question de respect. Je me lève, je me fais un p´tit plaisir, petit-dej TV5 dans la cuisine. les filles me demandent si je vais passer la journée avec elles, on va se baigner, on fait des crêpes? Ah Nao, tenho que ir trabalar... et ça me fait trop chier! Je veux rester dans mon petit coin , dans ma pousada toute jolie, profiter des derniers bains, des derniers rayons de soleil, des derniers délires avec les filles, mais non! Anne , tu dois aller faire ton devoir, travailler et tenter de trouver une solution pour que Sophie que tu vas rater à Salvador, soit accueillie par quelqu´un de confiance! Je devais partir ce matin à 10h, mais j´avais laissé tout mon bordel que j´avais descendu en prévision pour pas avoir a me le trimballer et payer un carreitero, dans mon resto de d´habitude, qui n´ouvre qu´à 12h et ça j´avais zappe. Je n´ai pas paniqué hier soir en me rendant compte que je ne pourrais pas partir ce matin avec le bateau de 10h, me disant que Sophie arriverait de toute façon le 14. je pensais qu´elle partait le 13. En fait elle arrive le 13 et moi j´arrive du coup 3h aprés elle au lieu de 24h avant. Heureusement Marcos mon cousin connait Roberto Cavalho dont la maman va aller chercher sophie à l´aéroport. Tout va bien donc. Je descends vers 13h, récupère mon bordel au resto, me plante, joue, comme d´hab, tout roule, tout le monde kiffe, y a trois pecnos ( l´île est désertée après le battage médiatique autour des éboulements et de la pluie, logique), j´arrive quand même à tirer 80 reais, 35 euros. Un charmant carioca m´aide à ranger, on va sur la plage ensuite, il joue divinement de la guitare, est très classe, très bien élevé, assez beau-gosse, moment très agréable. On échange les mails pour que je l´appelle quand je vais à Rio. Je vais ensuite sur internet, trouve la solution Ines Carvalho pour sophie, et repart chanter devant mes terrasses, cette fois-ci la peur au ventre, j´ai décidé de lancer les compos, celle de Martin, et une en portugais sur le brésil. Avec samples, petites percus, lignes de basses et tout le toutim. Ça passe très bien, surtout celle de Martin qui est bien longue, bien travaillée, quand elle est applaudie, et chaudement, je suis juste transportée, je vole sur un petit nuage. je crois que la brésilienne n´a pas été trop comprise, il faudra re-bosser dessus. Un américain me met 20 reais (j´ai grillé) en me disant "It was amazing", je ne me sens plus péter, je ne m´entends plus jouer! Le carioca de l´aprés-midi revient avec un cd dans la main, il m´a gravé plein de chansons brésiliennes que je pourrais jouer en concert, trop chouette! Deux françaises sont justes trop fières que ça soit une compatriote qui fasse ce "truc de fou", deux brésiliens et une brésilienne m´ invitent à leur table et me font boire deux caïpirinhas, une offerte par le patron, un par eux, c´est pour ça que je suis un peu paf maintenant... Le patron, o patrao, comme je l´appelle. Il me fait bien rire. Après les éboulements, y a eu une desertion générale de l´île. On est passés de la haute à la basse saison en 3 jours. Moi j´ai chanté un peu, après les accidents, et je voyais bien que le resto se remplissait aprés que j´arrive, et que les gens, excusez moi si je parais prétentieuse, mais ils étaient là pour moi, c´est clair. Quand vous voyez des gens qui passent, qui s´arrêtent, vous regardent, et après demandent à ce qu´on leur déplie des tables, s´installent bien face a vous, vous avez le droit de penser que vous êtes à l´origine de la décision qu´ils ont prise de venir manger là. Bon. Alors une fois, je n´ ai pas fait assez de sous, et clairement, j´en avais rapporté au patron. Je lui dis, por favor, voce pode colaborar? Et il me dit que non! Il me garde mes affaires, ça suffit! J´ai 60 berge, ça fait 20 ans que je suis ici, le resto n´a pas besoin de toi pour se remplir, d´ailleurs, je n´aime pas les musiciens, il n´y a que toi que je laisse jouer, parce que je t´aime bien et que j´aime bien ce que tu fais. Oh l´affront! Oh l´affreux! J´ai cru que j´allais lui faire bouffer sa caisse et la mienne avec! Je l´ai sevré du câlin d´aurevoir quotidien, et je suis partie furibarde. Le lendemain, dégoûtée, je remballais mes affaires dans ma pousada. Après, tous les jours, quand je passais devant le resto, il me disait, tu vas chanter quand, tu vas chanter quand? Il me montrait la terrasse, toute vide, as cosas sao fracas, y a personne! Je disais je ne sais pas, demain peut-être, je ne sais pas... Ah ah! Il le voit bien maintenant que je les lui ramène ses clients! De toute façon c´est ma technique. Je m´installe, et fais venir les gens, qui vont faire marcher le resto, (qui me tolèrent, par conséquent, et maintenant me harcèlent pour que je revienne, au point que les deux derniers jours je faisais des détours pour ne pas avoir à passer devant eux), et qui vont venir remplir ma boîte. les clients mangent, ils écoutent de la bonne musique, et ils m´arrosent, tout contents quí´ls sont d´avoir vécu un truc un peu spécial, et d´avoir épicé leur album photo. Tout le monde y trouve son compte, c´est assez parfait. Aujourd´hui c´était assez spécial, tout le monde a dégainné sa caméra sur la chanson de Martin, parce qu´íl y a de la percu, de la ligne de basse, du yukulele et tout, donc elle dure dix minutes, et elle est intéressante parce qu´il se passe plein de trucs, je change d´instrus, je tripote les boutons, les pédales et les cordes dans tous les sens, les gens ont trop aimé, et moi j´etais toute fière de me dire qu´ils étaient en train de filmer ma chanson à moi, bonheur! Plein de films, plein de photos, je suis dans la carte mémoire de tout un tas d´appareils depuis le début de cette aventure...Le concert fini, je suis allée dire aurevoir à tous les employés des restos terrasses sur lesquels j´ai chanté, va con Deus, grandes embrassades, je ne vous oublierai jamais, et nous non plus, beijos, beijos, ate logo, ate a prossima, a gente se falla, tudo ligao, belleza!
Voilà maintenant, Ilha Grande c´est fini, je dis toujours que je vais revenir mais c´est pas vrai, parce qu´íl y a tant d´autres endroits à voir, de gens à connaître, de touristes à faire kiffer...Je vais rentrer bien sagement dans ma pousada, fumer un cloppe en regardant tv5, me coucher, et demain, je pars pour Rio, pui pour salavador, retrouver la Sophie! Youhou!!!!!!!!!!!!!
Et bon, aujourd´hui est quand même un jour à marquer d´une croix blanche, parce que j´ai vraiment pris confiance en moi, en ma capacité à composer et jouer mes chansons, c´était ça que je cherchais depuis le début, et je savais que j´allais trouver cette confiance et cette énergie hors de France, toute forcée que je serais à me botter le cul pour pouvoir exister, en tant que chanteuse, en tant que jeune femme, en tant que moi quoi...
mardi 5 janvier 2010
A vida na ilha
J´ai arrêté de chanter. Je pète un câble. Je n´en peux plus de chanter toujours les même chansons. Je n´en peux plus de flipper dès qu´un nuage vient cacher le soleil, de peur qu´il n´apporte une énorme pluie qui vienne gâcher mes tours. J´en ai marre de scruter les terrasses et le ciel à longueur de journée en me stressant pour être sûre que je vais performer devant un maximum de monde. J´en ai marre de courir après l´argent, et de déprimer si j´ai le malheur de ne remasser que 60 reais (alors qu´avant de chanter pour la première fois je m´ étais fixée un objectif de 30 reais par tour, but I´m too greedy now!) de toute façon j´ai payé l´intégralité de ma pousada (rubis sur l´ongle en cash), j´ai des bonnes économies en liquide, je peux me permettre une pause. Je me mets trop de pression, alors j´ai décídé de lâcher du leste. J´ai récupéré tout mon bardas et j´ai tout monté à la pousada, j´ai rangé notre chambre, rechargé ma batterie, fait une lessive, trouvé deux nouveaux clients pour la patronne Teresa qui en échange me fait manger gratos dans le resto trop bon du centre (hier il y avait des patates douces, j´en mangé au déjeuner, au goûter et au dîner!), et j´ai attrapé la grippe, parce que j´ai oublié de me laver les mains aprés avoir compté l´argent de la boîte. Normalement je pense toujours à me laver les mains, parce qu´aprés avoir compté toutes les pièces, je peux sentir et voir la crasse qui s´accumule sur mes paumes. Mais sur l´ìle je ramasse très peu de pièces et beaucoup de billets, et la saleté est moins voyante donc j´oublie de me laver les mains. Total je transpire comme une vache et j´ai mal partout! Mais des allemands m´ont filé une plaquette d´anti-grippal ce matin, ça devrait aller mieux maintenant. Je vais répéter bien sagement dans ma pousada, apprendre un nouveau programme et enregistrer les compos sur le jamman.
Hier soir je me suis baladée dans le centre, sans charriot, les mains dans les poches, pour la première fois. Et j´ai parlé à tout le monde! Depuis le temps que je pousse la chansonnette dans le coin, les gens commencent à me connaître, tous les jours j´ai l´occasion de dire bonjour à plein de locaux, qui m´appellent par mon prénom, ou a cantora, ou a musica. Je ne m´arrête jamais pour discuter, j´ai toujours mieux à faire, chanter, ou troquer mes petits billets contre des grosses coupures, ou aller me baigner, bronzer, interneter... Alors je fais un grand sourire en levant les deux pouces, je dis tudo bem e voce, et je passe mon chemin. Mais hier soir, je me suis arrêtée à chaque fois que l´on m´a dit bonjour, pour faire un brin de causette, et ma foi, c´était très très intéressant. J´ai rencontré Fabio et Robinson, gérants de lanchas de 30 et 120 personnes qui emmènent les touristes a la lagoa verde, lagoa azul, praia de Lopes Mendes, praia de os aventureros, tous les plus beaux spots de l´île sur lesquels je ne me suis encore jamais rendue. Déjà ils m´ont fait trop plaisir parce qu´íls m´ont dit que ce que je faisais interpellait pas mal de gens sur l´île, que ça les faisait réfléchir sur la vie, sur le fait d´oser faire ce qu´on a vraiment envie de faire, etc... Ensuite, ils m´ont demandé tous les deux si je serais d´accord pour embarquer mon matos et chanter sur leurs bateaux pour les touristes, moyennant de la thune... J´ai évidemment accepté, mais pour plus tard, pour dans deux ou trois jours, le temps que je me pose, me repose et guérisse de ma grippe. Ensuite j´ai rencontré une pote suisse de 35 ans trop sympa, Aimée, avec qui j´avais pris un pot la veille, durant lequel on avait pas arrêté de pester sur les hommes, leur infidélité, et leur lourdeur, en ce qui concerne les femmes qui voyagent seules. Pendant ce pot, trois fois des mecs ont essayé de s´assseoir à notre table, trois fois on les a envoyé bouler, ce qui relançait notre conversation de plus belle. Ce soir on a décidé que plus tard dans la semaine, on brancherait son ipod à mon ampli, mon ampli à ma batterie de voiture, pour faire une grosse teuf sur la plage avec tous nos copains des pousadas. Trop sympa! Ensuite j´ai rencontré un couple que j´ai reconnu tout de suite car deux fois ils étaient venus écouter le tour. On a papoté, ils sont de Sao Paulo, centwo do univewso! Ils me disent de noter leur numéro, il faut que je vienne à Sao Paulo, ils connaissent du monde là- bas, notamment le consul du Danemark, un très bon copain à eux, qui adore la musique et fait tout le temps venir des artistes dans son consulat, voce e guerera, voce e encantadora, el va gostar muito de voce, et te va fazer cantar muito. Je note leurs numeros, on ne sait jamais! Ensuite, j´ai rencontré deux mecs qui l´un après l´autre m´ont proposé de monter gratos sur leurs bateaux pour aller visiter les plages de l´île, j´ai refusé, parce que je sais ce que ça veut dire...
Quand j´étais aux Caraïbes, j´étais tranquilou bilou sur la plage, quand un mono de jetski vient me voir, me propose de faire 15mn de jetski gratos. Moi, super naïve, super contente parce que je n´étais jamais monté sur un jet de ma vie, j´accepte tout de suite. Le gars me fait monter sur son jet. Il m´explique comment prendre mes appuis, accroche toi bien à ma taille, quand je tourne à droite tu penches ton corps à droite en t´appuyant fort sur tes deux jambes, à gauche pareil, tout est dans les appuis, tu appuies bien et il t´arrivera rien de méchant. Sur ce il part en trombe, fait des grands sauts, des vrilles, des virages en épingles à cheveux, des énormes accélérations, il se la pète, il donne tout, enfin c´est ce que je pensais. Enorme sensas, j´étais trop joisse. Après il me demande si je veux conduire, je dis que oui, je vais à l´avant, je fais joujou, mais le bougre commence à avoir les mains baladeuses et il essaie de me la faire à l´envers. Là je sors de mes gonds, je me mets à gueuler mais qu´est ce que vous avez tous sur cette ìle de fou, c´est pas possible, mais vous êtes d´une lourdeur, y en a marre, c´est dingue, merde, putain, chiotte! etc... une furie. J´attrappe le guidon des deux mains, je lui dis je te ramène à la plage, et là il dit, non, c´est moi qui te ramène, tu préfères rester là ou passer à l´arrière? Mon instinct me dit, ma poulette, passe à l´arriere, aggripe toi de toute tes force à ce gros con et penses à tes appuis, le fils de pute va essayer de te faire tomber. Le mec cette fois-ci donne tout, il va à fond la caisse, fais des bonds gigantesques, accélère, freine subitement, vrille dans tous les sens, en gros il veut me faire passer à la bail, c´est clair et net. Je m´accroche à lui de toutes mes forces, je suis à fond sur mes appuis, je me dis, je ne tomberai pas, je ne tomberai pas! Je suis méga concentrée, tout dans les jambes et le mental. Je suis morte de trouille et trop contente en même temps d´arriver à rester sur la bête. Mais j´ai vraiment les boules. Je me dis, à cette vitesse (je peux la voir sur le compteur qu´il est au dela de 90), l´eau c´est du béton, si je tombe, je risque d´avoir un sérieux bobo. Il fait tout ce qu´il peut, il donne tout ce qu´il a, je ne tombe pas. Arrivés au rivage (enfin! ça m´a semblé tellement long), il dit bah dis-donc, tu tiens bien toi! Je descends furax. Je vais voir son collègue, je lui dis ton pote a essayer de me chopper et de me faire tomber ensuite, sympa! Il me dit c´était évident ma cocotte, ici c´est comme ça que ça se passe, mais ça marche mieux avec les américaines, on les emmène au large vite fait, on se les tape et on les ramène ensuite, et tout le monde est content. Ile de tarés. Pour les non-initiées. Maintenant je sais à quoi m´attendre. Le jetskieur revient vers nous, je lui dis, avec un grand sourire, t´as essayé de me faire tomber non ? Il me dit ouais j´ai tout donné, je lui dis t´as été jusqu´á combien, il me dit le max, 100-110, je lui dis t´es vraiment un fils de pute, (injustice, état sauvage, grossièreté, c´est aussi moi) et je suis bien contente d´avoir tenu bon, tu l´as bien dans le cul. Il me dit c´est comme ça, ça passe ou ça casse, mais le plus souvent ça passe. Et ben pas avec moi connard (toujours avec le sourire). Le connard ne se formalise pas il sait qu´il mérite mes insultes, je m´en donne à coeur joie, je me lâche. J´obtiens mes excuses, désolé hein, c´est tout ce que je peux tirer de lui. Allez ciao, j´ai pas que ça à faire, dans trois heures je prends l´avion pour quitter cette île de dingues, il était temps! Savez-vous comment on fait à St martin pour vous voler votre scooter? On arrive en 4x4 derrière vous, on vous renverse gentiment, on sort du véhicule, on vous vire de la bête si vous n´en avez pas été ejecté, et on vous tape le scoot, sympa non? Bref, hier soir, me rappelant ma super virée gratos de St martin, je décline les deux offres, bien gentiment, désolée mais on m´a déjà proposé, j´ai d´autres plans, oh oh, ma chère!
Je suis bien contente d´avoir discuté avec les gens de l´île, je me suis trouvé deux plans pour en visiter les paradis tout en étant payée, je vais chanter au consulat du Danemark à Sao Paulo, la fête improvisée de la plage va être trop sympa, j´ai fait des mégas progrès en portugais, il faudra renouveler l´expérience!
Hier soir je me suis baladée dans le centre, sans charriot, les mains dans les poches, pour la première fois. Et j´ai parlé à tout le monde! Depuis le temps que je pousse la chansonnette dans le coin, les gens commencent à me connaître, tous les jours j´ai l´occasion de dire bonjour à plein de locaux, qui m´appellent par mon prénom, ou a cantora, ou a musica. Je ne m´arrête jamais pour discuter, j´ai toujours mieux à faire, chanter, ou troquer mes petits billets contre des grosses coupures, ou aller me baigner, bronzer, interneter... Alors je fais un grand sourire en levant les deux pouces, je dis tudo bem e voce, et je passe mon chemin. Mais hier soir, je me suis arrêtée à chaque fois que l´on m´a dit bonjour, pour faire un brin de causette, et ma foi, c´était très très intéressant. J´ai rencontré Fabio et Robinson, gérants de lanchas de 30 et 120 personnes qui emmènent les touristes a la lagoa verde, lagoa azul, praia de Lopes Mendes, praia de os aventureros, tous les plus beaux spots de l´île sur lesquels je ne me suis encore jamais rendue. Déjà ils m´ont fait trop plaisir parce qu´íls m´ont dit que ce que je faisais interpellait pas mal de gens sur l´île, que ça les faisait réfléchir sur la vie, sur le fait d´oser faire ce qu´on a vraiment envie de faire, etc... Ensuite, ils m´ont demandé tous les deux si je serais d´accord pour embarquer mon matos et chanter sur leurs bateaux pour les touristes, moyennant de la thune... J´ai évidemment accepté, mais pour plus tard, pour dans deux ou trois jours, le temps que je me pose, me repose et guérisse de ma grippe. Ensuite j´ai rencontré une pote suisse de 35 ans trop sympa, Aimée, avec qui j´avais pris un pot la veille, durant lequel on avait pas arrêté de pester sur les hommes, leur infidélité, et leur lourdeur, en ce qui concerne les femmes qui voyagent seules. Pendant ce pot, trois fois des mecs ont essayé de s´assseoir à notre table, trois fois on les a envoyé bouler, ce qui relançait notre conversation de plus belle. Ce soir on a décidé que plus tard dans la semaine, on brancherait son ipod à mon ampli, mon ampli à ma batterie de voiture, pour faire une grosse teuf sur la plage avec tous nos copains des pousadas. Trop sympa! Ensuite j´ai rencontré un couple que j´ai reconnu tout de suite car deux fois ils étaient venus écouter le tour. On a papoté, ils sont de Sao Paulo, centwo do univewso! Ils me disent de noter leur numéro, il faut que je vienne à Sao Paulo, ils connaissent du monde là- bas, notamment le consul du Danemark, un très bon copain à eux, qui adore la musique et fait tout le temps venir des artistes dans son consulat, voce e guerera, voce e encantadora, el va gostar muito de voce, et te va fazer cantar muito. Je note leurs numeros, on ne sait jamais! Ensuite, j´ai rencontré deux mecs qui l´un après l´autre m´ont proposé de monter gratos sur leurs bateaux pour aller visiter les plages de l´île, j´ai refusé, parce que je sais ce que ça veut dire...
Quand j´étais aux Caraïbes, j´étais tranquilou bilou sur la plage, quand un mono de jetski vient me voir, me propose de faire 15mn de jetski gratos. Moi, super naïve, super contente parce que je n´étais jamais monté sur un jet de ma vie, j´accepte tout de suite. Le gars me fait monter sur son jet. Il m´explique comment prendre mes appuis, accroche toi bien à ma taille, quand je tourne à droite tu penches ton corps à droite en t´appuyant fort sur tes deux jambes, à gauche pareil, tout est dans les appuis, tu appuies bien et il t´arrivera rien de méchant. Sur ce il part en trombe, fait des grands sauts, des vrilles, des virages en épingles à cheveux, des énormes accélérations, il se la pète, il donne tout, enfin c´est ce que je pensais. Enorme sensas, j´étais trop joisse. Après il me demande si je veux conduire, je dis que oui, je vais à l´avant, je fais joujou, mais le bougre commence à avoir les mains baladeuses et il essaie de me la faire à l´envers. Là je sors de mes gonds, je me mets à gueuler mais qu´est ce que vous avez tous sur cette ìle de fou, c´est pas possible, mais vous êtes d´une lourdeur, y en a marre, c´est dingue, merde, putain, chiotte! etc... une furie. J´attrappe le guidon des deux mains, je lui dis je te ramène à la plage, et là il dit, non, c´est moi qui te ramène, tu préfères rester là ou passer à l´arrière? Mon instinct me dit, ma poulette, passe à l´arriere, aggripe toi de toute tes force à ce gros con et penses à tes appuis, le fils de pute va essayer de te faire tomber. Le mec cette fois-ci donne tout, il va à fond la caisse, fais des bonds gigantesques, accélère, freine subitement, vrille dans tous les sens, en gros il veut me faire passer à la bail, c´est clair et net. Je m´accroche à lui de toutes mes forces, je suis à fond sur mes appuis, je me dis, je ne tomberai pas, je ne tomberai pas! Je suis méga concentrée, tout dans les jambes et le mental. Je suis morte de trouille et trop contente en même temps d´arriver à rester sur la bête. Mais j´ai vraiment les boules. Je me dis, à cette vitesse (je peux la voir sur le compteur qu´il est au dela de 90), l´eau c´est du béton, si je tombe, je risque d´avoir un sérieux bobo. Il fait tout ce qu´il peut, il donne tout ce qu´il a, je ne tombe pas. Arrivés au rivage (enfin! ça m´a semblé tellement long), il dit bah dis-donc, tu tiens bien toi! Je descends furax. Je vais voir son collègue, je lui dis ton pote a essayer de me chopper et de me faire tomber ensuite, sympa! Il me dit c´était évident ma cocotte, ici c´est comme ça que ça se passe, mais ça marche mieux avec les américaines, on les emmène au large vite fait, on se les tape et on les ramène ensuite, et tout le monde est content. Ile de tarés. Pour les non-initiées. Maintenant je sais à quoi m´attendre. Le jetskieur revient vers nous, je lui dis, avec un grand sourire, t´as essayé de me faire tomber non ? Il me dit ouais j´ai tout donné, je lui dis t´as été jusqu´á combien, il me dit le max, 100-110, je lui dis t´es vraiment un fils de pute, (injustice, état sauvage, grossièreté, c´est aussi moi) et je suis bien contente d´avoir tenu bon, tu l´as bien dans le cul. Il me dit c´est comme ça, ça passe ou ça casse, mais le plus souvent ça passe. Et ben pas avec moi connard (toujours avec le sourire). Le connard ne se formalise pas il sait qu´il mérite mes insultes, je m´en donne à coeur joie, je me lâche. J´obtiens mes excuses, désolé hein, c´est tout ce que je peux tirer de lui. Allez ciao, j´ai pas que ça à faire, dans trois heures je prends l´avion pour quitter cette île de dingues, il était temps! Savez-vous comment on fait à St martin pour vous voler votre scooter? On arrive en 4x4 derrière vous, on vous renverse gentiment, on sort du véhicule, on vous vire de la bête si vous n´en avez pas été ejecté, et on vous tape le scoot, sympa non? Bref, hier soir, me rappelant ma super virée gratos de St martin, je décline les deux offres, bien gentiment, désolée mais on m´a déjà proposé, j´ai d´autres plans, oh oh, ma chère!
Je suis bien contente d´avoir discuté avec les gens de l´île, je me suis trouvé deux plans pour en visiter les paradis tout en étant payée, je vais chanter au consulat du Danemark à Sao Paulo, la fête improvisée de la plage va être trop sympa, j´ai fait des mégas progrès en portugais, il faudra renouveler l´expérience!
lundi 4 janvier 2010
Echanges de bons procédés
Un après-midi en tourraine. Nous sommes invités avec des copains dans la maison de campagne des parents d´un ami. Déjeuner au soleil, à l´ombre d´un parasol, les parents font un tour de table des projets et aspirations de chacun. On se raconte, on expose, on argumente. Arrive mon tour. Moi je veux voyager, découvrir, profiter de la vie. C´est très bien dit la maman, mais il ne s´agit que de prendre. Comment comptes-tu donner? Je sèche. A vrai dire, je n´en sais trop rien.
Cinq mois plus tard, à Madère, dans les rues de Funchal. Je chante tous les jours, et tous les jours, des clochards, des vagabonds, un folle, viennent m´ecouter, s´asseyent à côté de moi, me parlent en plein milieu de mon tour, et pendant que je chante aussi. Au début je les tolère, puis je m´habitue, et enfin je finis par les apprécier, et surtout, par apprécier le plaisir que leur procure la musique que je fais. Au Maroc, au Cap vert, ils sont plus nombreux, plus fous, et moi plus heureuse chaque jour de les voir débarquer, et kiffer, tout simplement. C´est comme ça que je donne, que je rends le bonheur que je prends à chanter dans la rue.
Dans mon île, il n´y a pas de clochards. Il y a des vendeurs de bières, des transporteurs de bagages, mais ils ne sont pas sales, ils ne sont pas fous et ils gagnent leur vie. Durement, certes, mais ils font des sous quand-même. Il n´y a pas de desespoir que je puisse venir adoucir par la guitare. Mais! Avant hier, bonheur, je croise un clochard, le premier, l´unique. Tongs, short et casquette rouge, marcel blanc crasseux, les deux incisives du haut inexistantes, un vrai de vrai, un pur et dur! Il est tout bourré, je viens de finir mon tour, je suis assise par terre dans la rue, toute seule, en train de fumer une clope décompressante. Il vient me voir, et me demande cash deux reais pour aller s´acheter uma cerveja, une binouse quoi. Ça me fait franchement chier. Je déteste sortir de l´argent juste après avoir transpiré pour en gagner. C´est pour ça que je décompresse par terre dans la rue au lieu d´aller au café. Je ne voulais même pas m´acheter une eau gazeuse fraîche, je vais quand même pas lui filer les deux réais qu´elle m´aurait coûté. Je lui dis nao, nao quero, vai embora. Mais ça me fait quand même mal au coeur de jeter un collègue de la rue. Finalement je lui file ses deux reais. Il part tout content noyer son desespoir dans une binouse qui viendra parfaire son ivresse. Le lendemain, je chante à l´heure du dej sur la place entre deux terrasses. A un moment, j´entends qu´on démontre un peu trop ostentativement son enthousiasme derrière moi, je me retourne, c´est le clochard bourré qui explose de joie, applaudit à tout rompre en hurlant des choses totalement incompréhensibles. Tout ce que je sais, c´est qu´il est content, pas de doutes là dessus. Il reste tout du long et met une ambiance de folie. Je suis absolument ravie, je me rappelle Madère, les Canaries, le Maroc, le Cap Vert, la rue, les va-nu-pieds, et moi pied nue, et aujourd´hui je donne, je rends tout ce que l´île m´a apporté de bonheur et d´argent, tout pour lui, le clochard aviné, pour toi mon chou, j´ai chanté, je chante, et je chanterai. A la fin, il est tout triste que ça se termine, vai embora, vai embora? Et oui, c´est fini, vo decansar agora. Il est tout déçu, il part, sans même me demander quoi que ce soit.
Tout à l´heure, je suis assise par terre, je café-cloppe entre deux paragraphes du journal de bord de la grande traversée. Un hurlement derrière moi, a cantora!!! Mon clochard est là, il s´assied par terre à côté de moi, me dit voce... voce...voce canta muito bem! Et soudain, devant mes yeux ahuris, il fond en larmes, et son corps est secoué de gros sanglots! Mais pourquoi tu pleures? Porque voce canta muito bem! Nao e razao pra chorar!!! Incroyable, première fois que je fais pleurer un clodo, il est là, une fontaine d´eau salée, il se balance d´avant en arrière en faisant de l´air guitare avec ses doigts tous crasseux, j ´étais absolument désolée, je lui prends la main, y pose un baiser ( ça se fait beaucoup le baise main ici, drôle de pays tout de même), la lui serre, nao choras por favor, por favor! Il ne s´arrête plus, les gens commencent à nous regarder bizarre, la chanteuse aux pieds nus et le triste clochard. Je ne sais pas quoi faire, je ne veux pas le prendre dans mes bras parce qu´il est tout crade et il pue, je suis là, à côté de lui, et j´attends que ça passe. Soudain, une idée, diabolique, eurêka! Je sors deux reais de ma poche, vai comprar uma cerveja bem gelada! Le bonheur dans son regard! Il sèche ses larmes, attrape mes reais, me baise la main à son tour, voce e boa persoa, oui oui oui, allez, zou, au bar! Voilà madame, vous vouliez que je donne, et bien je donne, à écouter, à voir, et aussi à boire...
Cinq mois plus tard, à Madère, dans les rues de Funchal. Je chante tous les jours, et tous les jours, des clochards, des vagabonds, un folle, viennent m´ecouter, s´asseyent à côté de moi, me parlent en plein milieu de mon tour, et pendant que je chante aussi. Au début je les tolère, puis je m´habitue, et enfin je finis par les apprécier, et surtout, par apprécier le plaisir que leur procure la musique que je fais. Au Maroc, au Cap vert, ils sont plus nombreux, plus fous, et moi plus heureuse chaque jour de les voir débarquer, et kiffer, tout simplement. C´est comme ça que je donne, que je rends le bonheur que je prends à chanter dans la rue.
Dans mon île, il n´y a pas de clochards. Il y a des vendeurs de bières, des transporteurs de bagages, mais ils ne sont pas sales, ils ne sont pas fous et ils gagnent leur vie. Durement, certes, mais ils font des sous quand-même. Il n´y a pas de desespoir que je puisse venir adoucir par la guitare. Mais! Avant hier, bonheur, je croise un clochard, le premier, l´unique. Tongs, short et casquette rouge, marcel blanc crasseux, les deux incisives du haut inexistantes, un vrai de vrai, un pur et dur! Il est tout bourré, je viens de finir mon tour, je suis assise par terre dans la rue, toute seule, en train de fumer une clope décompressante. Il vient me voir, et me demande cash deux reais pour aller s´acheter uma cerveja, une binouse quoi. Ça me fait franchement chier. Je déteste sortir de l´argent juste après avoir transpiré pour en gagner. C´est pour ça que je décompresse par terre dans la rue au lieu d´aller au café. Je ne voulais même pas m´acheter une eau gazeuse fraîche, je vais quand même pas lui filer les deux réais qu´elle m´aurait coûté. Je lui dis nao, nao quero, vai embora. Mais ça me fait quand même mal au coeur de jeter un collègue de la rue. Finalement je lui file ses deux reais. Il part tout content noyer son desespoir dans une binouse qui viendra parfaire son ivresse. Le lendemain, je chante à l´heure du dej sur la place entre deux terrasses. A un moment, j´entends qu´on démontre un peu trop ostentativement son enthousiasme derrière moi, je me retourne, c´est le clochard bourré qui explose de joie, applaudit à tout rompre en hurlant des choses totalement incompréhensibles. Tout ce que je sais, c´est qu´il est content, pas de doutes là dessus. Il reste tout du long et met une ambiance de folie. Je suis absolument ravie, je me rappelle Madère, les Canaries, le Maroc, le Cap Vert, la rue, les va-nu-pieds, et moi pied nue, et aujourd´hui je donne, je rends tout ce que l´île m´a apporté de bonheur et d´argent, tout pour lui, le clochard aviné, pour toi mon chou, j´ai chanté, je chante, et je chanterai. A la fin, il est tout triste que ça se termine, vai embora, vai embora? Et oui, c´est fini, vo decansar agora. Il est tout déçu, il part, sans même me demander quoi que ce soit.
Tout à l´heure, je suis assise par terre, je café-cloppe entre deux paragraphes du journal de bord de la grande traversée. Un hurlement derrière moi, a cantora!!! Mon clochard est là, il s´assied par terre à côté de moi, me dit voce... voce...voce canta muito bem! Et soudain, devant mes yeux ahuris, il fond en larmes, et son corps est secoué de gros sanglots! Mais pourquoi tu pleures? Porque voce canta muito bem! Nao e razao pra chorar!!! Incroyable, première fois que je fais pleurer un clodo, il est là, une fontaine d´eau salée, il se balance d´avant en arrière en faisant de l´air guitare avec ses doigts tous crasseux, j ´étais absolument désolée, je lui prends la main, y pose un baiser ( ça se fait beaucoup le baise main ici, drôle de pays tout de même), la lui serre, nao choras por favor, por favor! Il ne s´arrête plus, les gens commencent à nous regarder bizarre, la chanteuse aux pieds nus et le triste clochard. Je ne sais pas quoi faire, je ne veux pas le prendre dans mes bras parce qu´il est tout crade et il pue, je suis là, à côté de lui, et j´attends que ça passe. Soudain, une idée, diabolique, eurêka! Je sors deux reais de ma poche, vai comprar uma cerveja bem gelada! Le bonheur dans son regard! Il sèche ses larmes, attrape mes reais, me baise la main à son tour, voce e boa persoa, oui oui oui, allez, zou, au bar! Voilà madame, vous vouliez que je donne, et bien je donne, à écouter, à voir, et aussi à boire...
dimanche 3 janvier 2010
Le journal de la grande traversée, suite et fin
Le 09 décembre 09
Il fait moche aujourd´hui, mais l´humeur est au beau fixe car nous allons enfin passer l´équateur, retrouver le vent et sortir du pot au noir. Je fais la vacation du matin, et nous sabrons le champagne à 10h00 TU, au degré 00´00 de latitude. Enfin nous sommes dans le sud. Nous devons encore prgresser de 15 degrés dans cet hémispère en faisant de l´est et nous serons enfin à Salvador de Bahia. Mais avec le mauvais temps, malgré l´équateur que nous avons passé, il y a un peu de maussade dans l´air. Nyels et moi avons eu la mauvaise idée de faire une sieste au même moment, avant le dej, le chef s´est retrouvé tout seul, et le chef n´aime pas être tout seul, alors le chef n´est pas content. Et nous, quand le chef n´est pas content, on n´aime pas ça. Mais heureusement ça lui passe assez vite,`et à nous aussi. Enfin, à moi, pas tout à fait, car je ne peux pas aller à l´étrave pour décrocher, et si je ne peux pas décrocher au moins une fois dans la journée, je suis malheureuse comme les pierres...
Nous mangeons bien, le thon tient toujours et égaie franchement nos repas. Nous le cuisinons à toutes les sauces, cuit, cru, et nous régalons. La journée passe, une de plus, encore 7 ou 8 avant le grand attérissage...
Le 27 décembre 09
Va savoir pourquoi, il m´est plus difficile de bien écrire sur du papier que sur un clavier. Mon copain le poil dans la main se réveille dès que j´y tiens un stylo, et tente des envolées lyriques. Je veux faire couler de la plume une cascade de mots, d´adjectifs, de phrases longues et impactantes, mais les lignes freinent mon inspiration. Mes aptitudes à écrire, à décrire, sont dépendantes des progrès de la technologie. Pendant la traversée, lors de mes quarts de nuit, j´écrivais le blog sur l´ordinateur du bord, j´ai commencé à faire cela à partir du 10 décembre. J´ai tout gardé sur une clef USB. Une vingtaine de pages, lèchées, travaillées, soigneusement construites. Je les lisais, les relisais, toute ravie que j´étais de pouvoir être emportée par ma propre prose. Et j´ai perdu la clef USB. Desespoir. Des centaines de lignes décrivant les journées, les nuits, les pensées, les joies, les peines. Introuvables. Irrécupérables. Je em souviens néanmoins de quelques moments, impressions, que je vais tenter de restituer le plus fidélement possible.
Je me souviens de mon impatience d´arriver. Je me souviens de la lecture de ce livre, La Longue Route de Bernard Moitessier. Bernard est un voyageur au long cours qui part sur son bateau rouge et blanc, Joshua, faire seul le tour du monde en passant par trois de ses caps mythiques, le Bonne-Espérance, l ´Horn et le Leeuwin. Bernard est obsédé par la moyenne journalière des miles parcourus. Au début ça me gonflait franchement qu´il nous rabâche sans arrêt le compte de ses miles quotidiens. Et puis moi aussi, j´ai été prise par l´obsession de la vitesse, de la moyenne. Au bout de quelques jours sur Pilhouë, je me suis fatiguée, lassée, je n´en pouvais plus. Nous sommes trois, un microcosme, une microsociété. Gédéon se rappelle cruellement à mon souvenir. Gédéon et son équipage en duo. Gédéon si petit dans le gigantisme de la mer. Gédéon, goutte d´eau, qui glissait avec le vent, sur lequel je me sentais si seule et minuscule, si fragile et vulnérable, nourisson de la voile, nourisson de la voile de Gédéon, de Gédéon qui tout seul, m´emportait vers le large, me portait vers l´inconnu. Gédéon le grand garçon qui nous emmenait Denis et moi, Gédéon le grand garçon qui traçait sa route, creusait son sillage, faisait son cap, sans personne pour lui tenir la main. Denis au bureau, moi sur le pont, j´étais nouvelle au monde, toute à sa découverte, toute à sa compréhension. J´étais dans la mer, dans le vent, dans le soleil, dans les étoiles, je les découvrais, pour la première fois vraiment, je les admirais, pour la première fois vraiment. Gédéon, raisonnable, sobre, maniable, pas exigeant pour deux sous.
Sur Pilhouë, tout est plus compliqué. Et avant c´était si simple! Ou sont passés les jours heureux de la première traversée, Madère - Canaries? Rien n´a changé pourtant, nous sommes toujours trois, Nyels est toujours à la manoeuvre, moi au logis, le chef au four et au moulin, et pourtant, l´ambiance n´y est pas. Il FAUT sans arrêt. Il faut préparer, laver, ranger, régler, réparer, composer, sacrifier, argumenter, décider, faire. Il faut faire. François est un hyper-actif, un fou du voilier, une fourmis, une abeille, laver ci, ajuster ça, chercher ici, veiller là. Oú est ma mer, où est mon soleil, oú se cache le silence? Je ne trouve que mes étoiles, qui me sourient, brillent et filent pour mon plus grand plaisir, quand je suis seule, enfin, sur le pont de Pilou, la nuit. Pilhouë est beau, Pilhouë est un bon bateau, Pilhouë me fait traverser le plus grand des océans, mais Pilhouë me frustre. A son bord je ne trouve plus la plénitude qui m´a fait adorer Gédéon, qui me fait le regretter à présent. Alors j´attends impatiemment que Pilhouë me fasse toucher terre. Un jour il avale 149 miles, un jour 153, l´autre 133. 133 François! C´est pas normal! Pas de vent. Moteur! Moteur à balle, par pitié! C´est comme ça. J´en ai marre! Patience...
Sur Gédéon, pendant les dix jours de traversée, je n´ai pas vu filer le temps. Il n´avait aucun effet sur moi, ce temps dont chaque seconde, chaque minute, chaque heure, m´apportait son lot de beauté, de félicité, d´incroyable. Sur Pilou à présent je compte les secondes, les minutes, les heures qui enfin, m´enlèveront à lui.
J´envie Moitessier, d´être seul sur son bateau, seul à faire son chemin, seul avec le ciel, la terre, sans rien qui ne puisse l´arracher à leur contemplation, sans rien qui ne le rappelle à la civilisation, et à ses exigences. J´envie sa liberté, le courage et la force qu´elle lui inspire, le talent qui transpire du récit qu´il fait de son aventure en solitaire. Simple, beau, passionnant.
La douce harmonie des premiers jours s´en est allée, remplacée par une pression venue de nulle part. Une vision différente des choses nous pousse loin l´un de l´autre, François et moi. L´hyperactif et la glandue se tirent la bourre, sans parvenir à jouer leur partition de concert. Nyels, entre nous deux, prend son parti en jouant cavalier seul, et je l´envie. "je fais ça pour moi", le reste, il s´en cogne. Et moi j´ai des bleus partout, au corps et à l´âme. Je décide de suivre son exemple, et je vais même plus loin, je débarque de Pilou, je suis ailleurs, je m´en fous de tout, ignore les malentendus, oublie les aigreurs, oublie le skippeur, ne pense qu´à moi et à mon équipier. Avec Nyels désormais nous partageons les tâches, et les centres d´intérêts. Il m´aide à faire la vaisselle, je lui pose des questions sur le bateau, et l´accompagne dans ses petits réglages. Au point qu´un matin, une douce folie s´empare de moi, alors que je suis du quart de l´aube: Pilou va trop lentement a mon goût, le vent adonne, je relâche les voiles, et prend la barre, Pilou gagne presque un noeud, et seule face au soleil naissant, je crie victoire, j´ai maîtrisé la bête, on gagne de la vitesse, le Brésil se rapproche encore un peu plus, et un peu plus vite! Vive le vent d´été, et vive Nyels! Je resserre mes liens avec l´oie sauvage, puise dans sa force celle qui me manque pour supporter la longueur de la traversée, rigole, plaisante, lave, essuie et apprend avec le petit frère dont j´avais toujours rêvé. Je ne suis déjà plus sur Pilouhë, je n´ai plus l´envie de lui, je n´ai plus la motivation, je lui prodigue les soins minimums, car je ne me sens plus respectée par son capitaine. J´ai briqué, j´ai cherché, j´ai sorti, j´ai servi, j´ai préparé, j´ai crêpé, casse-croûté, veillé du chien plus que de raison, mais ça n´était jamais assez, et maintenant je n´en peux plus, j´oublie et j´ignore. Fini les discussions animées des bons repas, finie la rigolade avec le conteur d´histoires africaines, je suis usée, lassée, je ne donne plus rien, je fais le minimum. La vaisselle avec Nyels, quelques préparations de repas, repas pendant lesquels je reste muette, impassible, perdant mon regard dans l´eau bleue, tentant vainement d´oublier de chercher le pourquoi du comment de la présente dégradation de la situation. 5 jours de grand froid entre François et moi, 5 jours de grand chaud avec le petit frère, que j´apprends à mieux connaître, et à aimer comme j´aime les autres membres de ma nombreuse famille. Enfin, à la veille de notre arrivée, je provoque le grand chef, et l´exhortant à se poser, à se reposer, déclenche la discussion salvatrice qui remettra tout le monde d´accord. Je ne suis plus là François, tu es trop exigeant et j´ai lâché l´affaire. Je l´avais bien remarqué, 5 jours que je fais quasiment tout. Bah oui, tu en demandais trop, résultat je ne veux plus rien faire. François écoute, François comprend, François est fin, sensible et intelligent, et François accepte. Il propose même qu´une fois à terre, nous prenions chacun un jour de repos plutôt que de se précipiter au lavage du bateau. Béni soit le ciel pour François, béni soit le ciel pour Pilhouë, béni soit le ciel pour Nyels, et pour cette traversée, qui finalement, se termine en beauté.
Le lendemain nous appercevons la côte, les grattes ciels New-Yorkesques de Salvador se dessinent sur l´horizon, nous ripaillons, buvons, nous faisons tous beaux, admirons la vue surréaliste de cet étalage de civilisation sur fond de Jack Johnson et Dire Strait, et arrivons frais, unis, heureux, à Bahia Marina, accueillis par de belles brésiliennes portant paniers de fruits exotiques et fraîches caïpirinhas, et par les équipages arrivés avant nous, qui pendus aux lèvres de François, écoutent le skippeur des skippeur déclarer: "c´était trop facile, et la terre est toute petite"...
Il fait moche aujourd´hui, mais l´humeur est au beau fixe car nous allons enfin passer l´équateur, retrouver le vent et sortir du pot au noir. Je fais la vacation du matin, et nous sabrons le champagne à 10h00 TU, au degré 00´00 de latitude. Enfin nous sommes dans le sud. Nous devons encore prgresser de 15 degrés dans cet hémispère en faisant de l´est et nous serons enfin à Salvador de Bahia. Mais avec le mauvais temps, malgré l´équateur que nous avons passé, il y a un peu de maussade dans l´air. Nyels et moi avons eu la mauvaise idée de faire une sieste au même moment, avant le dej, le chef s´est retrouvé tout seul, et le chef n´aime pas être tout seul, alors le chef n´est pas content. Et nous, quand le chef n´est pas content, on n´aime pas ça. Mais heureusement ça lui passe assez vite,`et à nous aussi. Enfin, à moi, pas tout à fait, car je ne peux pas aller à l´étrave pour décrocher, et si je ne peux pas décrocher au moins une fois dans la journée, je suis malheureuse comme les pierres...
Nous mangeons bien, le thon tient toujours et égaie franchement nos repas. Nous le cuisinons à toutes les sauces, cuit, cru, et nous régalons. La journée passe, une de plus, encore 7 ou 8 avant le grand attérissage...
Le 27 décembre 09
Va savoir pourquoi, il m´est plus difficile de bien écrire sur du papier que sur un clavier. Mon copain le poil dans la main se réveille dès que j´y tiens un stylo, et tente des envolées lyriques. Je veux faire couler de la plume une cascade de mots, d´adjectifs, de phrases longues et impactantes, mais les lignes freinent mon inspiration. Mes aptitudes à écrire, à décrire, sont dépendantes des progrès de la technologie. Pendant la traversée, lors de mes quarts de nuit, j´écrivais le blog sur l´ordinateur du bord, j´ai commencé à faire cela à partir du 10 décembre. J´ai tout gardé sur une clef USB. Une vingtaine de pages, lèchées, travaillées, soigneusement construites. Je les lisais, les relisais, toute ravie que j´étais de pouvoir être emportée par ma propre prose. Et j´ai perdu la clef USB. Desespoir. Des centaines de lignes décrivant les journées, les nuits, les pensées, les joies, les peines. Introuvables. Irrécupérables. Je em souviens néanmoins de quelques moments, impressions, que je vais tenter de restituer le plus fidélement possible.
Je me souviens de mon impatience d´arriver. Je me souviens de la lecture de ce livre, La Longue Route de Bernard Moitessier. Bernard est un voyageur au long cours qui part sur son bateau rouge et blanc, Joshua, faire seul le tour du monde en passant par trois de ses caps mythiques, le Bonne-Espérance, l ´Horn et le Leeuwin. Bernard est obsédé par la moyenne journalière des miles parcourus. Au début ça me gonflait franchement qu´il nous rabâche sans arrêt le compte de ses miles quotidiens. Et puis moi aussi, j´ai été prise par l´obsession de la vitesse, de la moyenne. Au bout de quelques jours sur Pilhouë, je me suis fatiguée, lassée, je n´en pouvais plus. Nous sommes trois, un microcosme, une microsociété. Gédéon se rappelle cruellement à mon souvenir. Gédéon et son équipage en duo. Gédéon si petit dans le gigantisme de la mer. Gédéon, goutte d´eau, qui glissait avec le vent, sur lequel je me sentais si seule et minuscule, si fragile et vulnérable, nourisson de la voile, nourisson de la voile de Gédéon, de Gédéon qui tout seul, m´emportait vers le large, me portait vers l´inconnu. Gédéon le grand garçon qui nous emmenait Denis et moi, Gédéon le grand garçon qui traçait sa route, creusait son sillage, faisait son cap, sans personne pour lui tenir la main. Denis au bureau, moi sur le pont, j´étais nouvelle au monde, toute à sa découverte, toute à sa compréhension. J´étais dans la mer, dans le vent, dans le soleil, dans les étoiles, je les découvrais, pour la première fois vraiment, je les admirais, pour la première fois vraiment. Gédéon, raisonnable, sobre, maniable, pas exigeant pour deux sous.
Sur Pilhouë, tout est plus compliqué. Et avant c´était si simple! Ou sont passés les jours heureux de la première traversée, Madère - Canaries? Rien n´a changé pourtant, nous sommes toujours trois, Nyels est toujours à la manoeuvre, moi au logis, le chef au four et au moulin, et pourtant, l´ambiance n´y est pas. Il FAUT sans arrêt. Il faut préparer, laver, ranger, régler, réparer, composer, sacrifier, argumenter, décider, faire. Il faut faire. François est un hyper-actif, un fou du voilier, une fourmis, une abeille, laver ci, ajuster ça, chercher ici, veiller là. Oú est ma mer, où est mon soleil, oú se cache le silence? Je ne trouve que mes étoiles, qui me sourient, brillent et filent pour mon plus grand plaisir, quand je suis seule, enfin, sur le pont de Pilou, la nuit. Pilhouë est beau, Pilhouë est un bon bateau, Pilhouë me fait traverser le plus grand des océans, mais Pilhouë me frustre. A son bord je ne trouve plus la plénitude qui m´a fait adorer Gédéon, qui me fait le regretter à présent. Alors j´attends impatiemment que Pilhouë me fasse toucher terre. Un jour il avale 149 miles, un jour 153, l´autre 133. 133 François! C´est pas normal! Pas de vent. Moteur! Moteur à balle, par pitié! C´est comme ça. J´en ai marre! Patience...
Sur Gédéon, pendant les dix jours de traversée, je n´ai pas vu filer le temps. Il n´avait aucun effet sur moi, ce temps dont chaque seconde, chaque minute, chaque heure, m´apportait son lot de beauté, de félicité, d´incroyable. Sur Pilou à présent je compte les secondes, les minutes, les heures qui enfin, m´enlèveront à lui.
J´envie Moitessier, d´être seul sur son bateau, seul à faire son chemin, seul avec le ciel, la terre, sans rien qui ne puisse l´arracher à leur contemplation, sans rien qui ne le rappelle à la civilisation, et à ses exigences. J´envie sa liberté, le courage et la force qu´elle lui inspire, le talent qui transpire du récit qu´il fait de son aventure en solitaire. Simple, beau, passionnant.
La douce harmonie des premiers jours s´en est allée, remplacée par une pression venue de nulle part. Une vision différente des choses nous pousse loin l´un de l´autre, François et moi. L´hyperactif et la glandue se tirent la bourre, sans parvenir à jouer leur partition de concert. Nyels, entre nous deux, prend son parti en jouant cavalier seul, et je l´envie. "je fais ça pour moi", le reste, il s´en cogne. Et moi j´ai des bleus partout, au corps et à l´âme. Je décide de suivre son exemple, et je vais même plus loin, je débarque de Pilou, je suis ailleurs, je m´en fous de tout, ignore les malentendus, oublie les aigreurs, oublie le skippeur, ne pense qu´à moi et à mon équipier. Avec Nyels désormais nous partageons les tâches, et les centres d´intérêts. Il m´aide à faire la vaisselle, je lui pose des questions sur le bateau, et l´accompagne dans ses petits réglages. Au point qu´un matin, une douce folie s´empare de moi, alors que je suis du quart de l´aube: Pilou va trop lentement a mon goût, le vent adonne, je relâche les voiles, et prend la barre, Pilou gagne presque un noeud, et seule face au soleil naissant, je crie victoire, j´ai maîtrisé la bête, on gagne de la vitesse, le Brésil se rapproche encore un peu plus, et un peu plus vite! Vive le vent d´été, et vive Nyels! Je resserre mes liens avec l´oie sauvage, puise dans sa force celle qui me manque pour supporter la longueur de la traversée, rigole, plaisante, lave, essuie et apprend avec le petit frère dont j´avais toujours rêvé. Je ne suis déjà plus sur Pilouhë, je n´ai plus l´envie de lui, je n´ai plus la motivation, je lui prodigue les soins minimums, car je ne me sens plus respectée par son capitaine. J´ai briqué, j´ai cherché, j´ai sorti, j´ai servi, j´ai préparé, j´ai crêpé, casse-croûté, veillé du chien plus que de raison, mais ça n´était jamais assez, et maintenant je n´en peux plus, j´oublie et j´ignore. Fini les discussions animées des bons repas, finie la rigolade avec le conteur d´histoires africaines, je suis usée, lassée, je ne donne plus rien, je fais le minimum. La vaisselle avec Nyels, quelques préparations de repas, repas pendant lesquels je reste muette, impassible, perdant mon regard dans l´eau bleue, tentant vainement d´oublier de chercher le pourquoi du comment de la présente dégradation de la situation. 5 jours de grand froid entre François et moi, 5 jours de grand chaud avec le petit frère, que j´apprends à mieux connaître, et à aimer comme j´aime les autres membres de ma nombreuse famille. Enfin, à la veille de notre arrivée, je provoque le grand chef, et l´exhortant à se poser, à se reposer, déclenche la discussion salvatrice qui remettra tout le monde d´accord. Je ne suis plus là François, tu es trop exigeant et j´ai lâché l´affaire. Je l´avais bien remarqué, 5 jours que je fais quasiment tout. Bah oui, tu en demandais trop, résultat je ne veux plus rien faire. François écoute, François comprend, François est fin, sensible et intelligent, et François accepte. Il propose même qu´une fois à terre, nous prenions chacun un jour de repos plutôt que de se précipiter au lavage du bateau. Béni soit le ciel pour François, béni soit le ciel pour Pilhouë, béni soit le ciel pour Nyels, et pour cette traversée, qui finalement, se termine en beauté.
Le lendemain nous appercevons la côte, les grattes ciels New-Yorkesques de Salvador se dessinent sur l´horizon, nous ripaillons, buvons, nous faisons tous beaux, admirons la vue surréaliste de cet étalage de civilisation sur fond de Jack Johnson et Dire Strait, et arrivons frais, unis, heureux, à Bahia Marina, accueillis par de belles brésiliennes portant paniers de fruits exotiques et fraîches caïpirinhas, et par les équipages arrivés avant nous, qui pendus aux lèvres de François, écoutent le skippeur des skippeur déclarer: "c´était trop facile, et la terre est toute petite"...
Le journal de bord de la grande traversée, pot au noir, II
Huitième jour de nav. Déjá 1060 miles parcourus. 132 miles de moyenne journalière. Avalés, 16 degrés de latitude vers le sud. Et à 53 minutes, l´équateur, que nous traverserons dans neuf heures et trente minutes, à 11h30, si nous maintenons notre vitesse actuelle de 5 noeuds. Nous allons au près serré, cap au 207. Il est 23h50 en temps universel. Moitessier, sors de ce corps!!!!
Je suis du quart de chien. J´ai remplacé Nyels à la dernière minuite car je ne trouvais pas le sommeil. Reminiscence des insomnies de l´ouest parisien. Je pense, j´imagine ce que sera le Brésil. Je ne m´y figure pas ma vie là-bas, je m´y vois juste chanter, dans les rues, sur les places, à la fraîche. J´ai hâte de toucher terre et de gratter le premier accord devant les bahiannais. En ce moment je lis la longue route de Moitessier, et Damien Autour du monde, un bouquin absolument captivant, qui parle de trois jeunes de 18 ans, qui se donnent 5 ans pour économiser acheter, et préparer un voilier, Damien, qui leur fera faire le tour du monde par des endroits peu fréquentés en 5 autres années. Ces livres, à la fois me transportent, et me déséspèrent. Je me reconnais dans le désir de ces hommes de trouver la vérité et le sens de leur vie dans la beauté du voyage, l´ivresse et la sérennité du grand large, dans l´émotion de leur rencontre avec la nature, en mer, et avec l´homme, à terre. Mais je réalise au fur et à mesure que je lis ces gitans de l´océan qu´il ne me sera pas possible avant longtemps de pouvoir un jour posséder mon propre bateau, et tracer ma propre route, avec ma maison sur le dos. Il va falloir faire une croix temporaire sur le troly flottant. Avoir son propre voilier et acquérir l´expérience nécessaire pour le faire marcher soi-même est un défi qui demande énormément de temps, d´argent et de sacrifices, pour qui n´a pas les moyens de sortir de sa poche la somme rondelette permettant de s´offrir un bateau tout équipé avec skippeur intégré. Il y a une différence fondamentale entre ces hommes et moi. Déjà, je ne leur arrive pas à la cheville, ce sont des dieux vivants, des héros des temps modernes, ils ne seraient pas skippeurs, je les épouserais, même si maintenant ils sont probablement d´un âge avancé... Il faudra garder leurs ossements dans un sanctuaire dressé à leur gloire en haut d´une falaise, face à la mer, oú leurs louanges seront chantées tous les jours par des miliers de pèlerins venus des quatre coins du monde, à pied, à cheval, á la voile, se recueillir sur la tombe de ces jean-sans-peur, de ces coeurs vaillants, de ces hommes simples et purs, ces diamants d´innocence pour qui l´océan fut tout, pour qui il sera le néant. Tin tin tin tin! hop. Amen alléluia. Bref! Ces hommes, ces surhommes, ces demi-dieux aiment plus la mer que la terre, ils rêvent de traversées interminables, sans escales, d´eau jusqu´à plus soif, de vents qui les poussent jusqu´à la ligne d´horizon, pour les faire tomber de l´autre côté. Moi ça n´est pas du tout du tout mon cas! J´ai besoin de la terre pour chanter, répéter, et faire des grasses mat´. Oublié donc, le rêve d´indépendance en maison flottante. Mais le bateau restera mon mode de transport préféré, le bateau c´est le tapis volant qui m´emmène vers des destinations enchantées. Mais si un jour j´ai de l´argent, et beaucoup, je m´achèterai un voilier sympa, et me paierai le skipper qui va avec!
Une partie de moi est soulagée par ce trait que je tire sur mon désir d´avoir dans un futur pas trop éloigné, la capacité de posséder et skipper mon propre bateau. Ce constat que je fais confirme bel et bien mon envie, mon obsession à vouloir persévérer dans la musique, et dans la rue. J´appartiens à la rue et la rue m´appartient. Cela me rassure de savoir qu´aucune coquille de noix ne me fera virer de mon cap. J´attends le Brésil avec impatience, je le pense, je le rêve, à longueur de miles, je serai heureuse de poser enfin le pied à terre.
En attendant la vie suit son cours sur Pilou, et je peux proclamer non sans une fierté peu contenue qu´ enfin, je suis propre. Et oui, tel un bébé à qui on apprend à faire ses besoins dans le pot, on m´a initiée aux sciences de la juppe! La juppe c ést le marche pied au ras de l´eau qui se trouve à l´arrière du bateau. Tu vas sur la juppe, et tu fais, c´est que m´a dit Nyels. Deux jours que je n´ai pas mis le pied dans les toilettes de Pilou, deux jours que je n´ai pas pompé! Je ne peux pas pomper, la pompe de Pilou réclame une poigne de catcheuse texane, je suis une délicate jeune fille de l´ouest parisien, je ne pompe pas moi monsieur, je tire la chasse, et pis c´est tout! Depuis deux jours donc, je prends d´autres risques que ceux de péter les chiottes. Je prends le risque de passer à la bail pour un simple pissou, c´est terriblement grisant! Je suis propre donc, et les toilettes du bord aussi par conséquent, comme ça le chef peut faire son gros cacou du matin tranquilou bilou! Ouf! C´est déjà ça de retiré à la longue liste de toutes les hypothétiques conneries que je suis susceptible de faire sur un bateau... En plus aujourd´hui il fait beau et nous en profitons largement. Longues lectures et siestes pour tout le monde, repas fins de thon frais, bronzette, journée tranquille, journée bonheur!!!
Je suis du quart de chien. J´ai remplacé Nyels à la dernière minuite car je ne trouvais pas le sommeil. Reminiscence des insomnies de l´ouest parisien. Je pense, j´imagine ce que sera le Brésil. Je ne m´y figure pas ma vie là-bas, je m´y vois juste chanter, dans les rues, sur les places, à la fraîche. J´ai hâte de toucher terre et de gratter le premier accord devant les bahiannais. En ce moment je lis la longue route de Moitessier, et Damien Autour du monde, un bouquin absolument captivant, qui parle de trois jeunes de 18 ans, qui se donnent 5 ans pour économiser acheter, et préparer un voilier, Damien, qui leur fera faire le tour du monde par des endroits peu fréquentés en 5 autres années. Ces livres, à la fois me transportent, et me déséspèrent. Je me reconnais dans le désir de ces hommes de trouver la vérité et le sens de leur vie dans la beauté du voyage, l´ivresse et la sérennité du grand large, dans l´émotion de leur rencontre avec la nature, en mer, et avec l´homme, à terre. Mais je réalise au fur et à mesure que je lis ces gitans de l´océan qu´il ne me sera pas possible avant longtemps de pouvoir un jour posséder mon propre bateau, et tracer ma propre route, avec ma maison sur le dos. Il va falloir faire une croix temporaire sur le troly flottant. Avoir son propre voilier et acquérir l´expérience nécessaire pour le faire marcher soi-même est un défi qui demande énormément de temps, d´argent et de sacrifices, pour qui n´a pas les moyens de sortir de sa poche la somme rondelette permettant de s´offrir un bateau tout équipé avec skippeur intégré. Il y a une différence fondamentale entre ces hommes et moi. Déjà, je ne leur arrive pas à la cheville, ce sont des dieux vivants, des héros des temps modernes, ils ne seraient pas skippeurs, je les épouserais, même si maintenant ils sont probablement d´un âge avancé... Il faudra garder leurs ossements dans un sanctuaire dressé à leur gloire en haut d´une falaise, face à la mer, oú leurs louanges seront chantées tous les jours par des miliers de pèlerins venus des quatre coins du monde, à pied, à cheval, á la voile, se recueillir sur la tombe de ces jean-sans-peur, de ces coeurs vaillants, de ces hommes simples et purs, ces diamants d´innocence pour qui l´océan fut tout, pour qui il sera le néant. Tin tin tin tin! hop. Amen alléluia. Bref! Ces hommes, ces surhommes, ces demi-dieux aiment plus la mer que la terre, ils rêvent de traversées interminables, sans escales, d´eau jusqu´à plus soif, de vents qui les poussent jusqu´à la ligne d´horizon, pour les faire tomber de l´autre côté. Moi ça n´est pas du tout du tout mon cas! J´ai besoin de la terre pour chanter, répéter, et faire des grasses mat´. Oublié donc, le rêve d´indépendance en maison flottante. Mais le bateau restera mon mode de transport préféré, le bateau c´est le tapis volant qui m´emmène vers des destinations enchantées. Mais si un jour j´ai de l´argent, et beaucoup, je m´achèterai un voilier sympa, et me paierai le skipper qui va avec!
Une partie de moi est soulagée par ce trait que je tire sur mon désir d´avoir dans un futur pas trop éloigné, la capacité de posséder et skipper mon propre bateau. Ce constat que je fais confirme bel et bien mon envie, mon obsession à vouloir persévérer dans la musique, et dans la rue. J´appartiens à la rue et la rue m´appartient. Cela me rassure de savoir qu´aucune coquille de noix ne me fera virer de mon cap. J´attends le Brésil avec impatience, je le pense, je le rêve, à longueur de miles, je serai heureuse de poser enfin le pied à terre.
En attendant la vie suit son cours sur Pilou, et je peux proclamer non sans une fierté peu contenue qu´ enfin, je suis propre. Et oui, tel un bébé à qui on apprend à faire ses besoins dans le pot, on m´a initiée aux sciences de la juppe! La juppe c ést le marche pied au ras de l´eau qui se trouve à l´arrière du bateau. Tu vas sur la juppe, et tu fais, c´est que m´a dit Nyels. Deux jours que je n´ai pas mis le pied dans les toilettes de Pilou, deux jours que je n´ai pas pompé! Je ne peux pas pomper, la pompe de Pilou réclame une poigne de catcheuse texane, je suis une délicate jeune fille de l´ouest parisien, je ne pompe pas moi monsieur, je tire la chasse, et pis c´est tout! Depuis deux jours donc, je prends d´autres risques que ceux de péter les chiottes. Je prends le risque de passer à la bail pour un simple pissou, c´est terriblement grisant! Je suis propre donc, et les toilettes du bord aussi par conséquent, comme ça le chef peut faire son gros cacou du matin tranquilou bilou! Ouf! C´est déjà ça de retiré à la longue liste de toutes les hypothétiques conneries que je suis susceptible de faire sur un bateau... En plus aujourd´hui il fait beau et nous en profitons largement. Longues lectures et siestes pour tout le monde, repas fins de thon frais, bronzette, journée tranquille, journée bonheur!!!
Fausse alerte
Hier soir, tout est revenu à la normale. Une demie-heure de show, 120 reais dans ma boîte, the usual, ouf! J´étais bien contente, bien contente! Et je pense avoir trouvé le pourquoi du comment de la précédente famine de ma panthère. Notre petit île vit au rythmes des gros bateaux de croisière qui mouillent dans sa baie. Hier, le bateau venait d´Argentine. Plein de mira vos parmi nous, j´étais contente! Ils étaient partout, à la terrasse des restos, dans les magazins, les bars, les cybers, à la plage, on ne voyait et on n´entendait qu´eux. J´étais aux anges, j´ai parlé castellano toute la journée, retrouvé mes boludos, pelotudas, mi amor, la negri, pelado, gordita, ça faisait tellement longtemps que je n´avais pas entendu tous ces mots! A mes deux tours de chants de la journée j´ai fait un programme spécial Argentine en chantant du Charly Garcia et du Andres Calamaro, ils étaient ravis. Sauf que sauf que, apparemment, ça va pas très bien en Argentine en ce moment, du point de vue économique. Anne la bateau stoppeuse qui va passer par là-bas avant de faire sa rentrée scolaire au Chili m´a dit qu´un euro valait 8 pesos. Quand j´y étais, c´était un euro contre 4 pesos. Du coup, les argentins sont près de leurs sous, ce qui est complètement normal étant donné la faiblesse actuelle de leur monnaie. 2 réais pour eux c´est pas rien, ils vont pas balancer des billets de 5 et de 10 comme j´en reçois d´habitude...Donc ceci explique cela. Hier soir les argentins étaient repartis dans leur bateau, ne restaient que les brésiliens et les autres, j´ai retrouvé dans ma boîte les billets de 5, de 10, et même un de 20! Le bonheur! Le show a été trés apprécié, j´ai retrouvé une autre bande de jeunes qui voulait que je re-chante de nouveau, ils sont de Sao Paulo, pensez si j´étais contente, des fans do centwo do univewso! La journée ayant été riche en émotions, très bonnes et très mauvaises, je voulais rester sur cette impression de bonheur absolu procuré par la conversation avec Martin, et le succès du dernier show. Je suis donc allée sagement me coucher, en laissant mon adresse mail aux jeunes de Sao Paulo, car il est indispensable que je passe par cette ville, pour l´accent, et pour mon cousin Marco qui habite là-bas!
samedi 2 janvier 2010
Mi-figue, mi-raisin
Aujourd´hui c´est presque un mauvais jour. J´ai chanté deux fois pour le moment, et je n´ai que 130 reais dans ma panthère, déception! Soit tout le monde a la gueule de bois, soit les sommes mirobolantes des jours précédents n´étaient que l´effet des fêtes de fin d´année. Je pencherais pour la deuxième solution. Si je vois que la vache maigre persiste, je bougerai à Rio en attendant Sophie. Je suis d´une humeur de dogue, je déteste ne pas faire autant de sous que ce que je veux, et je déteste que mon bonheur soit dépendant de cette satanée boîte à sous. Mais! Car il y a un mais, aujourd´hui j´ai parlé à Martin my crazy czek lover sur facebook, première fois que j´ai un contact avec lui depuis 3 mois! Il m´a dit que je lui manquais, trop chouette! Du coup j´ai décidé que j´irai vraiment à St- Martin en mars, pour aller voir Martin et Maya. Martin est à Grand Canarias en train de bosser, Maya est repartie en Irlande bosser dans son bar pour ramasser des sous, elle revient la semaine prochaine et ils traversent l´atlantique dans la foulée! Je retrouve tout ce petit monde en mars, Martin m´a dit qu´il allait m´apprendre plus de tchèque, et je lui ai dit que j´allais aller en rep. Tchéque pour faire des concerts lá-bas, ça serait tellement fou! Ils me manquent trop tous les deux, j´ai tellement hâte de les revoir!!!! Je suis toute excitée! Je vais aller chanter maintenant, et ramasser les cacahuètes que les clients voudront bien me lancer... (cet après-midi on m´a mis une capote dans la boîte á sous, j´avais l´air fine quand je l´ai vidée devant le patron du resto qui garde mon matos....). Malheureuse en argent... à bientôt les tchèques!!!!
Workaholic
J´ouvre les yeux, j´ai une barre de fer dans le crâne. Jade gêmit dans son lit au dessus du mien, on a tous les deux une gueule de bois bien bien carabinée. Je regarde par la fenêtre, et pense que je suis toujours sous le coup de l´álcool quand j´apperçois un rayon de soleil qui vient chatouiller la vitre. Je bondis de mon lit et me précipite dehors, joie! Il fait beau! je vais pouvoir bosser! Merde, j´ai la gueule de bois. Je prends les choses en main. Petit dej copieux, gâteau, pain, beurre, deux tasses de café, deux verres de jus d´orange, de la pastèque, de la mangue, du melon, je me fais exploser le bide. Il faut toujours bien manger pour faire passer les lendemains de fête. Et je vais me recoucher. Je me réveille à midi, et je descends récupérer mon charriot au resto, direction les terrasses de la plage. Je débale, je branche, liberta puis petit speaech bien rôdé, adapté au premier janvier. "Eu me chamo Anna, y tenho uma boa resaca (j´ai une bonne gueule de bois)" ça met tout le monde de bonne humeur. Je continue en disant comme d´habitude d´où je viens, ce que je fais, les gens encore tous bourrés poussent des clameurs à chaque fin de mes déclaration, c´est TROP ambiance! Je termine en présentant la boîte à sous, je dis que j´accepte les euros, les reais, les dollars, et le paracétamol, on se tord sur sa chaise. A la fin de mon speech je suis applaudie, acclamée, encensée, béatifiée, c´est trop d´emotions, encore un peu ivre de la veille, je tremble de tout mon corps, pression sur mes petites épaules, public trop enthousiaste dès le départ, il va falloir envoyer du lourd! J´envoie tout ce que je peux, je parle beaucoup, je percussionne sur ma caisse de guitare, je danse, j´invite à danser, le mec que j´invite à danser se sent pousser des ailes, me soulève et me fais tourner allongée dans ses bras, je vais vomir, à terre à terre! Je fais des acrobaties plus belles et 

plus propres que jamais malgré tout, fais passer ma caisse et ramasse... 165 reais b (65 euros),
record brésilien battu, feliz ano novo Anna! Bien épuisée par tout ce que je viens de donner, je rentre à ma pousada, me baigne dans la cascade trés trés longtemps, me couche à 15h, me réveille en bien meilleure forme à 17h, me re-baigne, et vais chercher mon charriot pour l´amener à l´autre bout de la plage, au bar Lua et Mar. Je commence à m´installer á côté de la terrasse. Mais, scandale, le serveur arrive et me dit que je ne peux pas, que le voisin va se plaindre, que ça va faire une nuisance sonore, je suis sur le point de lui envoyer mon poing dans la tronche, moi???!!! Une nuisance sonore???!!! ( injustice, et j´ai encore de la caïpi dans le sang, le malheureux, il ne sait pas qu´il est en train de réveiller la bête). Mais une table de jeunes femmes devant moi se révolte, on argumente ensemble, je ne suis pas devant le bar, je suis devant chez le voisin, c´est un espace public, et les nuisances sonores pendant la journée, mon cul. Le serveur ne veut rien entendre. Les jeunes femmes prennnent à parti une table à côté et tous ensemblent ils scandent "Toca! toca! toca!". Le voisin finit par rappliquer. Je lui demande si ça le dérange que je joue une petite demie-heure, il répond qu´absolument pas, une jeune femme part à l íntérieur négocier avec le patron, et revient victorieuse, tu
peux jouer! je m´installe, je joue, tout le monde est trop content, public charmé, surtout un jeune homme, pas laid mais pas beau non plus, qui ne me lâche pas des yeux, et quand je dis qu´íl ne me lâche pas, il ne me lâche pas!
A la fin, alors qu´il me fixe toujours autant pendant que je range mes affaires, ses potes me disent "fica apaxionato, e boa persona sabes" bah oui mais il ne me plait pas! Et pendant ce temps là, le mec me regarde toujours, avec des yeux, je n´avais jamais vu ça! Ça fait bizarre quand même, on aurait dit un fanatique, ça devrait faire trop plaisir, mais à ce point là, c´est perturbant! Je pars, me retourne 100 mètres plus loin, le bougre est toujours en train de me regarder, un fou!
Je pars chanter place de l´église, devant une pizzeria bondée. J´ai bien pris confiance aujourd´hui, au point que quand je fais mon petit speech, je me lève carrément, Jacques Martin à l´ecole des fans, je me raconte, je me présente, moi, mes instrus, ma batterie de voiture, ma boîte à sous. Succès, applause, des jeunes à qui j´avais dit à Lua et Mar que serais là ensuite sont venus me ré-écouter, je suis aux anges. Je remplis la boîte, plus de 100 reais, comme au Lua et Mar. Je pars chanter une quatrième et derniére fois entre les deux restos de plages du matin, accompagnée par d´autres jeunes, qui ont vu la fin et étaient restés sur leur faim. Ils me demandent où je vais jouer maintenant, et me tirent mon charriot, portent mon pied de micro et ma guitare. Enfin! Première fois que des gens me proposent de m´aider à tirer, ça fait du bien! Je m´installe, les terrasses ne sont pas très remplies. Mais pendant que je fais mon speech, des gens arrivent , on rajoute des
tables et des chaises, je suis trop fière. Les jeunes se posent par terre, en cercle devant moi, des couples les rejoigents et il y a un petit tas de monde assis à mes pieds et qui m´entourent, je suis au paradis. Je leurs raconte: " Je suis trop contente car ce soir c´est un rêve que j´avais depuis longtemps qui se réalise. Quand j´átais en France je rêvais du Brésil, et je rêvais de chanter la bas. Je voulais apprendre des chansons brésiliennes, alors j´ai cherché sur internet des jolis morceaux. Je suis tombée sur une vidéo sur Youtube, d´un goupe qui s´appelle los hermanos et qui chantait la chanson que je viens de vous chanter, Esquadros. Ils étaient sur la
plage, installés sur des tapis, et le public était assis par terre tout autour d´eux. Cette vidéo me faisait fantasmer, je l´ai regardé trop de fois, en rêvant qu´un jour je fasse moi aussi la même chose, et ce soir c´est ce rêve qui se réalise, je suis sur la plage, je chante esquadros, et il y a vous assis par terre autour de moi, c´est trop sympa, merci, mille fois merci!" Je prends une photo pour immortaliser le moment. Je constate, pour la énième fois, que ma musique a un effet aphrodisiaque, des couples n´en finissent plus de se rouler des pelles sous mes yeux, et ça, ça me fait gonfler le coeur de bonheur. Ce tour de chant est magique. Intime, chaleureux, à la lumière des bougies posées sur chaque table, au clair de lune c´est romantique, suave, tout doux. Je réveille tout ce petit monde avec mes acrobaties, ensuite je débranche, ils disent uma mais! uma mais! uma mais! Je fais le bis avec Blowing in the wind, les jeunes chantent, les couples s´embrassent, c´est luxe calme et volupté ce soir, c´est gé-nial! Je compte l´intégralité de ma caisse du jours, 500 reais en tout, 200 euros, j´ai bien bossé! Je fais de la monnaie à un des deux restos, le patron m´adore, m´appelle sua namorada, tu reviens demain hein? Oui oui! Tu me gardes mon bordel en échange? (son retso est plus pratique pour moi que l´autre qui me les garde), pas de problème. Je peux avoir un bol de riz gratos? Tout ce que tu veux, va en cuisine et sers toi. Je me sers, et rejoins ma bande de jeunes. Ce sont des bcbg de Belo Horizonte, chemises californiennes et colliers autour du cou, ils savent parler français, anglais, espagnol, la crème de la crème. Ils font partis d´une assoce présente dans une centaine de pays, l´Aesaec, pas bien compris ce que c´était exactement. Ça prône 6 valeurs, l´une d´entre elles étant la diversité. ils voudraient qu'on vienne les voir et participer au week end. J´ai dit que j´en parlerais à Sophie, mais que je serais ravie de venir. On se quitte, grandes embrassades car ils partent le lendemain. Je rentre à la pousada, riche, et bien fatiguée, mais comblée de bonheur.
plus propres que jamais malgré tout, fais passer ma caisse et ramasse... 165 reais b (65 euros),
Je pars chanter place de l´église, devant une pizzeria bondée. J´ai bien pris confiance aujourd´hui, au point que quand je fais mon petit speech, je me lève carrément, Jacques Martin à l´ecole des fans, je me raconte, je me présente, moi, mes instrus, ma batterie de voiture, ma boîte à sous. Succès, applause, des jeunes à qui j´avais dit à Lua et Mar que serais là ensuite sont venus me ré-écouter, je suis aux anges. Je remplis la boîte, plus de 100 reais, comme au Lua et Mar. Je pars chanter une quatrième et derniére fois entre les deux restos de plages du matin, accompagnée par d´autres jeunes, qui ont vu la fin et étaient restés sur leur faim. Ils me demandent où je vais jouer maintenant, et me tirent mon charriot, portent mon pied de micro et ma guitare. Enfin! Première fois que des gens me proposent de m´aider à tirer, ça fait du bien! Je m´installe, les terrasses ne sont pas très remplies. Mais pendant que je fais mon speech, des gens arrivent , on rajoute des
Feliz ano novo!
Réveillon très spécial, le meilleur que j´aie vécu depuis longtemps. Il a plu des cordes toute la journée. La veille, un blackout total et une coupure d´eau a mis toute la ville en émoi, et en panique. Pas de glace, pas de lumières, pas de son, et rien ne promettait le retour de l´eau ni de l´electricté. Les chiottes étaient inutilisables, pas d´internet, rien. Le néant. Je suis donc partie me réfugier sur le continent, à Angra. Là il y avait tout, lumière et eau. J´en suis revenue à 17h. Je croise à la sortie de mon bateau une copine qui me dit qu´elle a été invitée par Géronimo l´argentin ( un des trois marins qui nous ont accueilli le premier jour avec Eric) à réveillonner sur son bateau. Et que je peux venir aussi. Moi je réfléchis deux secondes. J´ai le choix entre réveillonner dans le resto de ma pousada du centre ville où la bouffe est juste trop bonne, ou réveillonner sur un bateau. Je choisis de suivre ma copine. Tant pis pour la bonne bouffe, de toute façon je trouve que les gens de la pousada sont un peu trop pépère alors je décide d´aller sur le bateau. En plus je suis persuadée qu´Eric, que je n´ai pas vu depuis une lune, sera là. Quand on arrive au point de rendez-vous, Jason, l´américain qui vit sur un trimaran pourri jusqu´à la quille, nous dit que finalement la fête est sur le bateau d´Eric et non sur celui de Geronimo, et qu´on a repoussé le rendez-vous pour dans une heure. Pour moi, il va de soi que je peux venir et ma copine aussi. Bien éduquée, je propose à ma copine qu´on aille chercher des boissons, histoire de ne pas arriver les mains vide. On part faire les courses, et à notre retour, Jason dit, changement de programme, vous ne pouvez pas venir. J´ouvre des yeux tous ronds, comment ça???!! Eric a dit que c ´était pas une fête juste un dîner sympa, et qu´il n´invitait que moi Jason, et Geronimo. Mais tu lui a dit que j´étais là?? Que c´était moi?? Oui, oui, il n´a pas dit que toi particulièrement tu ne pouvais pas venir, il a juste dit que c´était pas une fête et qu´íl n´invitait que les gens qu´il avait convié personnellement. J´hallucine total, et en même temps je réalise qu´après tout, Eric est français. Typique. Je dis à Jason, dis lui qu´íl est un big french SOB ( Son Of a Bitch), and that when I´m drunk tonight I go there swimming and I will do big scandal! Je ne suis pas vraiment déçue car je sais qu´un super repas avec boissons gratuites m´attends. Nous nous séparons avec ma copine, je pars me faire toute belle dans ma pousada ( juste me laver, mettre une robe et des boucles d´oreilles, la vie au soleil est d´une simplicité!) et je vais au resto. Il y a des grandes tablées avec tous les gens de la pousada, un trés trés beau mec tire une chaise et m´invite très galamment à m´y asseoir, je suis comme une petite princesse, j´y pose délicatement mon séant en croisant grâcieusement mes petites jambes. Je suis absolument séduite par le jeune homme qui me demande comment je m´appelle presque en me reniflant le cou, mais, mais, deux secondes après, une jeune fille arrive et s´assied en face de moi, à côté de lui, lui caresse les cheveux, lui prend la main, se présente, Maria, l´épouse de Francisco. Bon, pour une fois qu´il y en a un qui me plaît et qui n´a pas l´air d´un beauf, et voilà qu´il est marié! Je rêve et suis une fois de plus outrée par le sans-gêne de certains hommes. Surtout que même si sa femme est là, Francisco me parle toujours avec sa tête tout près de la mienne, au point que je dois décaler discrètement ma chaise! Il me regarde droit dans les yeux, et moi je sais plus où me mettre. Sa femme ne peut pas en placer une, c´est bien simple, elle n´existe plus... Elle finit par prendre les choses en main, et demande à Francisco d´échanger sa place conter la sienne, prétextant un courant d´air. Je me retrouve donc à côté de Maria, et j´apprends qu´elle et Francisco sont acteurs de théâtre, à Sao Paulo. Le dîner, absolument délicieux, arrosé de trés bon vins blancs et rouges, se passe très agréablement et tout à fait normalement, maintenant que Fransisco est à plus de 2cm de moi. Je papote toute la soirée en portugais avec Maria qui est charmante et corrige très gentiment mes fautes. Elle tient bien fermement la main de Fransisco dans la sienne, presque en permanence, lui il est à moi, pas touche! Je quitte la table vers 23h, je suis épuisée par les deux heures que je viens de passer à me tordre le cerveau dans tous les sens pour parler portugais. Je me balade seule dans les deux rues d´Ilha Grande, et croise Felipe, et des clients de sa pousada que j´avais rencontré la veille, on décide d´aller sur la plage ensemble. On admire le feu d´artifice, puis devant mes yeux ébahis, à minuit, toute la plage se roule des grosse pelles, ça se bouche à bouche dans tous les sens, des langues, des lèvres collées, tradition brésilienne. Pour le nouvelle année, on s´habille en blanc et on se fait des transferts de salive, ça porte chance! Pour la santé, on repassera... Plusieurs fois des brésiliens me serrent dans leurs bras puis m´assaillent, bouches béantes, langues pendantes... J´esquive habilement en me baissant et en faisant un tour sur moi-même, c´est très très amusant comme petit jeu! Je n´ai pas vraiment envie de commencer l´année avec une mononucléose carabinée... Finalement le moment passe, mais je subirai régulièrement pendant la soirée les assauts de brésiliens complètement avinés qui fondent sur tout ce qui bouge toutes langues dehors...! Miracle, la lumière revient, le concert peut commencer, la pluie est toujours là, on a laché les parapluies, on est trempés jusqu´aux os, on se réchauffe toute la nuit en dansant la samba et en buvant des caïpi. Je suis, comme tout le monde, complètement ivre, à force de demander au barman "uma caïpi bem bem cargada por favor amigo, bem bem cargada!". Souvent quand je suis au stade ultime de l´ivresse, comme ce soir, je répète en boucle la même chose, parce que je perds la mémoire immédiate, et je ne me souviens plus de ce que je viens de dire. Ce soir, je répète à tout le monde que je ne suis pas argentine: "Eu so francesa, nao so argentina, so francesa, tenho sotaque argentino mais so francesa!!!!" Parce qu´à chaque fois que je dis à quelqu´un de deviner d´ou je suis, 90 fois sur 100, on me répond argentine, apparemment j´ai un accent argentin. Ça a le don de m´exaspérer, parce qu´en plus, au Brésil, on n´aime pas les argentins. Donc toute la soirée, je répète à qui veut l´entendre que je suis française, et pas argentine. J´ai un autre petit jeu aussi, très amusant celui là, repérer les gens de Sao Paulo. Ils ont un accent très particulier, ils prononcent les R à l´américaine, ça donne un effet trés spécial. Ils ne disent pas porrrta, mais powta, puewto, univerwso. Je me balade en écoutant les gens parler, dès que j´entends un accent de Sao paulo, je saute sur la personne en disant "voce e de sao paulo, voce e do centwo do univewso!" En imitant grossièrement leur accent. Je suis explosée de rire à chaque fois, eux aussi, tout le monde rigole, c´est trop la fête! Plein de monde me reconnaît de mes tours de chants, ils me disent bonjour en français, a cantora da ilha! Bonjour! Trop sympa! Mais au bout d´un moment (à 5h du mat quand même) la pluie finit par me congeler, j´ai la chair de poule, je suis toute bourée, je me dis, il faut que j´aille me coucher. Felipe me raccompagme à ma pousada en tout bien tout honneur, et je m´écroule sous une grosse couverture bien chaude, aprés m´être brossée les dents très très scrupuleusement. Ce réveillon était tout mouillé (il a plu toute la nuit, et finalement l´eau et l´electricté ont éte coupées de nouveau), mais super chaleureux, joyeux, vivant, bon enfant, brésilien quoi!
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