dimanche 27 décembre 2009

Des équipiers

J´ignore totalement quelle est la norme en matière d´équipiers. Quel est le comportement idéal á adopter, la dose d´investissement nécessaire à la satisfaction de votre skippeur, à la marche de votre bateau? Pour ma part je pensais avoir trouvé ma place. Mes atouts: je n´ai pas peur de l´éponge et du balais brosse, de la casserole et des couverts de service. Je suis mobile, me déplace facilement dans des espaces restreints, tout en laissant quelques coins de portes et tranches de placards venir me coincer le doigts ou bosser la tête, mais ça, on va dire que ce sont les aléas du métier. J´ai bon caractère quand tout va bien, et je ne manque pas d´enthousiasme. Donc en gros, je suis bonne à faire la counchite et la causette, et franchement c´est déjà pas mal! Anne la bateau-stoppeuse dit même que c´est énorme, et qu´elle est bien soulagée, elle qui est tout le temps à la manoeuvre, de ne jamais avoir à se soucier des questions d´intendance et de maintenance. Je tiens bien mes quarts, et bichonne mon équipage, je les laisse dormir un peu plus longtemps, et leur prépare des petits casse-croûte, comme aux choux, deux petits sandwichs jambon de parme-philadelphia, 5 petits gateaux sucrés, et un carré de chocolat de ma réserve personnelle. Plus du chocolat chaud avec du vrai chocolat de ma réserve personnelle (l´importance de la réserve personnelle sur un bateau, l´importance!!!) pour Nyels, et un thernos de thé chaud pour François. J´ai tout arrêté au lendemain de la grosse dispute, révolte sourde de mon sommeil contrarié. Mes défauts: si je me sens coincée, rien ne va plus. Souvent je me sens coincée quand je ne peux pas faire ce que je veux. Quand je ne peux pas faire ce que je veux je pête un câble! Mais quoiqu´il en soit, moi et mon équipage, c´est á la vie à la mort, je suis une nounou en exercice, qui prépare, lave et chouchoutte, je suis la fille au pair de Pilou.

les autres équipiers sont tous différents. Il y a les fous de la voile, qui sont partout sur le bateau, et trouvent toujours une manille à graisser, un bout à rallonger ou une lessive à lancer. Il y a ceux qui s´en foutent royalement et sont là en touristes, pour voir du pays. Il y a ceux qui comme moi, s´intéressent, s´investissent, mais ne se donnent pas à fond. Le bateau j´aime ça, mais c´est avant tout un moyen de transport, qui me permet doucement d´accéder à mes rêves. Pour être efficace et engagée, un tant soit peu, dans sa bonnne marche, il faut que le bateau me fasse rêver, qu´il se fasse sentir, et je ne peux pas sentir quelque chose qui m´épuise, et m´arrache à ma liberté de rêver, à ma liberté de ne rien faire et de tout penser.
Dans la marina, l´infatigable paresseuse que je suis s´amuse à regarder les sur-équipiers s´activer à la coque, au pont, à l´étrave et au mât. Je suis confortablement calée, à l´ombre, sur un coffre de cockpit, ma guitare à la main, un petit jus frais pas trop loin, une cigarette dans un coin, et j´admire la capacité de ces marins à savoir et pouvoir réellement faire passer le bateau avant eux. Ils ont la mer dans le sang. Moi je l´ai dans le coeur, mais pas dans la tête, dans ma tête il y a de la musique, des copains et du soleil, de la terre, des gens, et du temps, beaucoup de temps, pour savourer le bonheur, sans le laisser filer trop vite.