Alors mes enfants, encore une fois, il s’en est passé des choses… ça ne s’arrête jamais, et à la limite c’est tant mieux, ça me surexcite tellement que ça m’empêche de dormir même quand je n’ai que quatre heures de sommeil dans les pattes… donc j’écris, ça permet de passer le temps agréablement en attendant que le marchand de sable ne se décide à me rendre visite.
Revenons très brièvement sur l’épisode Saint-Maarten, ou alors, allons-y carrément, épiloguons. Saint-Maarten, dans l’absolu, j’ai détesté. Cette île est, de mon point de vue, le royaume du vice, une île de sauvages, c’est sea sex and sun, sex drugs and rock n’ roll, et peace and love. Sur le papier ça fait rêver, dans la réalité c’est une horreur, car ce n’est que ça. Saint-Maarten, ça n’est pas les Antilles. La culture caribéenne, on n’en voit même pas la couleur, juste l’odeur du rhum, duquel je me suis tenue sagement éloignée, fuyant à tout prix la vie nocturne et les prédateurs concupiscents qui rôdent le long des bars. Certes ça parle créole, ça mange du boudin, ça danse le zouk, ça boit de l’arrangé, mais tout cela est noyé dans le reste, dans la masse touristes ventripotents venus les bourses pleines, avec dans l’idée la ferme intention de se les vider. Pour eux, on a construit des complexes hôteliers, des résidences, des maisons à louer, dans les plus beaux endroits. On a tué ces endroits. Avant, la jeunesse, blanche et noire, venait y festoyer en pleine nature, là c’était vraiment rock n’ roll et peace and love ; sur la plage on jouait de la musique, on buvait du rhum coco, on fumait de la marie-jeanne et on dansait et chantait jusqu’à pas d’heure. La vie, la sensualité, l’ivresse de la liberté et de l’insouciance, c’était l’esprit cool et les good vibes des caraïbes. Mais, le touriste blanc, le red neck occidental à la retraite est arrivé savaté de ses air max toutes dégonflées par le poids des hamburgers accumulés dans sa grassouillette panse. Et mon Dieu, mais qu’il est chiant le touriste occidental retiré ! Il arrive et il dit, oh comme c’est joli, comme c’est sauvage et bon enfant, c’est gentil tout ça, ça chante, ça danse, ça s’amuse, la plage est belle, l’eau transparente, on va revenir plus souvent, et on en parle aux copains en rentrant ! On va montrer les photos ça sera plus probant ! Il rentre chez lui, il en parle aux copains, tout le monde rapplique et décide de passer régulièrement les vacances ; on investit. La où la nature est belle, on va mettre de la pierre et des barbecues géants, parce que c’est tellement plus sympa ! Ah oui mais par contre à 23h, coucouche panier papattes en rond ! Ah mais coucouche panier peux pas, il y a trop de bruit dehors… Bah on n’a qu’à faire interdire le bruit et la fête, de toute façon on est prio, c’est nous qu’on fait marcher le business maintenant ! Allez, dehors les jeunes, ou plutôt, dedans ! Oh et la plage aussi, le sable il est trop chaud, on peut pas s’asseoir dessus, ça va faire mal à nos gros popotins délicats, il faut des transats ! Et allez, des transats partout, et tu raques pour poser ta serviette ! Oh et puis si on mettait des casinos et des bars à putes, histoire de pourrir un peu plus l’ambiance ? Oh ouais, c’est bon ça ! Là où tout était libre et beau, ils ont mis leur grain de sel, et transformé l’île en club vioc géant. A dix heures du soir dans la marina de Marigot, tout est fermé, quand il y a quinze ans, ça dansait jusqu’au matin… Ils ont tout pourri, les nantis ! Et ça se proclame grands libérateurs des opprimés, ambassadeurs de la liberté, on croit rêver… Du coup la jeunesse se traîne entre les bars et les casinos, ça se drogue mais le bon esprit n’est plus là, le good spirit de Jah est parti en poussière, déterré par les pelleteuses… Jah est mort, le fucking oh my god l’a tué. Bref, saint-Maarten, c’est à chier, mais aussi surprenant que cela puisse paraître je ne suis pas du tout mécontente d’y avoir été. Et oui, car Saint-Maarten m’ a offert l’amour, avec en prime, la plus chouette chanson que j’aie jamais écrite de toute ma vie, de mon point de vue. Et ce n’est pas Martin le crazy thcèque par lequel est arrivée la flèche, comme présupposé, mais par en vidunderlig danske somand. Revenons sur Martin le tchèque. Je pense que j’ai fait une fixette sur Martin le tchèque. Sur le papier il correspondait à l’homme de mes rêves, mais dans la réalité, il faut l’admettre, on communique très difficilement. Et comme disent les cousines, la clef de la réussite d’une relation est dans la communication. Je pense que Martin a été pour moi un prétexte afin d’oublier celui qui me tenait encore au cœur, et de la perte duquel mon ego ne se remettait pas. Martin fut aussi un merveilleux prétexte pour éloigner les prédateurs que je ne trouvait pas à mon goût. Martin était une raison d’écrire une chanson. Martin était une raison. Martin était tout sauf quelqu’un dont j’étais réellement amoureuse, et je me mentais à moi-même, me berçait de la douce illusion de cette passion pour trouver encore un autre merveilleux sens à ma vie. Avec min eventyrlystne danske, et ben j’ai été complètement prise de cours, et je ne m’attendais pas du tout à tomber. La chute fut en fait une ascension vers le ciel, toute légère et transportée que je fus quand je découvris that I can’t help falling in love, non je ne pouvais pas m’en empêcher. Et je ne m’en empêchai pas. ( le passé simple est de retour, il m’avait manqué !). Je me suis laissée complètement aller, porter, charmer pour mon plus grand bonheur, dans cette île de malheur. Le danois quitté, comme d’habitude j’ai écrit une chanson, avec l’aide de Dave d’Alaska, et aussitôt échappée de son bateau (le bateau de Dave c’était comme la maison en pain d’épice dans Hansel et Gretel), je me suis cloitrée une nuit et une journée pour enregistrer la chanson et l’envoyer à son destinataire, et ma muse. Ma muse et moi allons nous revoir, pour ma plus grande joie, et, quand viendra le départ, pour mon plus grand désespoir. Mais la vie est ainsi faite, il y a un temps pour s’a-muse-r, un temps pour travailler, et moi l’année prochaine, j’ai décidé de bosser, pour de vrai ! Non Papa, Maman, ne sabrez pas le champagne, ne sautez pas de joie, ne remerciez pas tous les Saints que vous avez prié pour moi, quand je dis bosser, ça veut juste dire que je vais retourner chanter sur les routes, mais en ayant un peu plus de suite dans les idées, cette fois-ci. J’ai fait mes armes cette année, je me suis fait les ongles, je m’en vais faire rentrer le métier de voyageuse et de chanteuse jusque dans la moelle de mes os. Docu docu, me voici me voilà, attends moi bien au chaud, je m’occupe de toi dès le moi de juin !
En attendant, je vais prendre le frais, au Canada !
Mais pourquoi le Canada ???
Je veux du froid et des gens civilisés. La américains sont too much, les scandinaves, too far, allons au Québec, allons voir ces gens qui parlent un français tellement sympa et poétique. Le bonheur que ça va être de chanter devant eux, tabernacle !! (4 jours que je suis à Montréal, et je crois que je suis la seule à utiliser ce mot, je ne l’ai pour le moment entendu de la bouche d’absolument personne). Me voilà donc à l’aéroport de nouveau, avec moitié moins de bagages cette fois-ci, mais toujours autant de problèmes. L’envoi de mes bagages par cargo en France ayant pris un peu de temps, je me retrouve encore à courir après mon avion. J’arrive la dernière à l’intérieur, comme d’hab, et là, je veux passer dans les rangs et donc mettre ma guitare sur le ventre mais HORREUR ! Ma guitare n’est plus sur mon dos, et la porte se referme. Je pousse un huuuurlement, je lâche tout, je me rue sur la porte, passe ric-rac, tout ça sans rien expliciter, devant des hôtesses qui ont les yeux qui leurs sortent de la tête, je sors en vociférant tous bras en l’air hold the plaaaaaaaaaaaaaaane I will be baaaaaaaaaaaack ! Je trace en quatrième vitesse à la douane, j’avais oublié la guitare dans le scan…. Faut dire qu’ils m’ont fait la fouille corporelle et tout le tralala, pour la quarantième fois, j’étais un peu en panique d’être là en train de me faire avertir qu’on allait me caresser les fesses alors que mon avion était sur le point de partir. Caresse et pis c’est tout, suis pas en sucre for God sick ! Les attouchements terminés j’ai juste détalé comme un lapin en ramassant tout ce que j’avais sous la main, et la guitare n’était pas loin, mais pas à portée de main. Je l’ai oubliée, je l’ai oubliée ! Je n’en reviens pas. Bref je l’attrape, et je vole jusqu’à l’avion, qui enfin peut s’envoler à son tour. Quatre heures plus tard, j’atterris à Charlotte, en Caroline du nord. Mon vol pour Montréal est dans deux heures. Je débarque, repasse la douane, me fait tamponner le passeport bien à la perpendiculaire s’il vous plait madame, je suis une passeport maniac ! Là clairement, j’ai vingt minutes avant le prochain vol, autant dire toute la vie, à mon échelle. J’ai le temps de prendre un Starbuck madame ? Oui mais en vitesse ! Je fais le café cloppe le plus surréaliste de mon voyage, là, au beau milieu de la Caroline du Nord, mais qu’est-ce que je fabrique en Caroline du Nord ? C’est endroit sur cette terre où je n’aurais jamais pensé mettre les pieds un jour. Bref, je ne pense pas au fait que je doive repasser une douane, et que c’est la même pour tous les avions. Je fais la queue sagement en me disant c’est bon, jusqu’au moment où je regarde à la montre de mon voisin (je suis passée experte dans l’art), et là, panique, il est moins cinq, l’avion part à cinq, et une vingtaine de personnes devant moi. Branle-bas de combat, cette fois-ci dans le calme, on ne va pas utiliser la méthode panique, on va tout prendre à revers. Excusez moi monsieur, bien le bonjour, que vous êtes joli, que vous me semblez beau, j’ai pu constater qu’il était 19h55, et voyez vous, sur mon billet, là, il est inscrit que mon avion prendra le ciel dans dix minutes, auriez-vous l’infinie bonté et l’extrême obligeance de bien vouloir me laisser me glisser devant vous ? Mais bien sûr mon petit pot de miel, après toi ! Et là, fouille au corps, le retour, évidemment (je bipe à chaque fois à cause de mes bracelets qui ne s’enlèvent pas, et là, j’avais une salopette short avec des boutons partout partout, poitrine, dos, haut des fesses et les douanières passaient et repassaient leurs mains et leurs machines, toutes paniquées par les multiples bips qui émanaient de ma personne). Je re-détale comme un lapin, arrive en dernière toute essoufflée, suant comme une vache, et vais me poser dans mon siège. A côté de moi, au bonheur, personne, je m’étale et je dors.
J’arrive au Canada en me disant, le plus dur est derrière moi, le meilleur est à venir. Je me fourrais le doigt dans l’œil jusqu’à l’épaule. J’arrive au canada, on me dit mademoiselle suivez-moi, nous allons à l’immigration. Et pourquoi ça ??? Je ne suis pas immigrée moi, je suis globbe-trotteuse, je ne vois pas ce que j’irais faire à l’immigration ! C’est comme ça pour toutes les personnes dont c’est la première visite mademoiselle. Ah bon d’accord, très bien. Je vais à l’immigration. Là on me pose tout un tas de questions que je trouve extrêmement indiscrètes ; quel travail exerciez vous en France, êtes vous encore sous contrat, et… COMBIEN AVEZ-VOUS D’ARGENT SUR VOTRE COMPTE EN BANQUE ? C’est une blague ? Je suis obligée de répondre ? Ecoutez mademoiselle, entrer au Canada c’est un privilège. Vous voulez-dire que c’est une galère ouais, je retourne aux states, c’était plus simple !….Tu, bien évidemment. Nous voulons juste nous assurer que vous ne serez pas dans le besoin…Oh mais c’est trop aimable à vous ! Rassurez-vous, tout va bien madame, je suis loin d’être nécessiteuse. Loin à hauteur de quel montant mademoiselle ? 500 madame. Mytho. Etes-vous en mesure de le prouver ? Absolument pas ! Avez-vous un billet de retour mademoiselle. Non, je les prends toujours last minute comme ça c’est moins cher. Mademoiselle je suis désolée mais je ne suis pas en mesure de vous faire rentrer dans le pays, nous allons devoir vous extrader. Vous vous payez ma tête, très certainement !...Tu, évidemment. Et pourquoi cela madame ? Parce que vous avez le profil idéal du travailleur clandestin, aller-simple et pas d’argent, néanmoins, où vous logerez- vous mademoiselle ? Je suis reçue chez Môssieur E. R-L madame, avocat à la cour madame. Alors gare à ton cul sale chienne ! Tu, évidemment….Avez-vous son numéro mademoiselle. Oui madame, le voici. Très bien, patientez, je l’appelle. Mademoiselle Saint-Pierre ? de Saint-Périer madame, c’est mon nom comme il se doit prononcer. Et visiblement c’est tout ce qu’il me reste, soyez gentille de ne pas l’écorcher, merci du peu….Tu, évidemment. Ça ne répond pas mademoiselle, veuillez patienter, je vais consulter mon collègue. Je vais patienter madame. Je patiente. Le téléphone sonne. Service d’ l’immigration d’l’aéroport d’Montréal j’écoute ? Bonsoir monsieur. Oui elle est ici. Pouvez-vous nous dire combien de temps elle reste ? Si elle est dans le besoin pourrez vous la soutenir financièrement ? Merci monsieur, nous terminons la procédure et vous l’envoyons. Tralalalèèèreu, tu l’as dans l’os ma vieille, tu fais moins la maligne là, il est passé où tout le privilège du Canada ?... Tu, évidemment. Merci madame, je n’aurais jamais pensé qu’il fut tant compliqué d’entrer chez vous, si j’avais su… Au plaisir !
ça fait déjà 1h30 que mes gentils hôtes m’attendent à la sortie.
Qui sont mes gentils hôtes ? Tout simplement le fils du voisin de mes parents et sa femme, lui grand avocat, et elle directrice de l’événementiel d'une grande marque. Très gentiment ils ont proposé de m’héberger, ce que j’ai accepté avec bonheur, n’ayant aucun plan pour me loger. Grand bien m’en a pris, sinon je retournais en France, ou pire encore sur l’île de la tentation…Merci Papa Maman, merci mes gentils voisins, et merci mes gentils hôtes !
Mais mon calvaire n’est pas fini, je dois passer une autre douane. Il y a deux douaniers, un qui est occupé à défaire la valise d’un mec, et un autre qui baille au corneille et a sans doute décidé de s’octroyer une pause, j’arrive, je sens gros comme une maison au bout de deux secondes que je vais poireauter en attendant que l’autre termine avec son type, le paresseux n’a visiblement pas envie de travailler. Et là, comme dans tex avery, vous savez quand le bébé a un visage impassible, et que tout d’un coup il lui sort des geysers de larmes des yeux, alors qu’il devient tout rouge. Pareil. Debout, là, désespérée, je n’ai plus d’autre solution, plus de ressources, plus de nerfs, plus de force, je chiale comme un moutard. Le douanier s’approche. Bah qu’est-ce qu’il vous arrive mademoiselle ? ça fait deux heures que j’attends de sortir monsieur, il y a des gens qui attendent pour moi aussi dehors, et on m’humilie, et on me traite comme une criminelle, on me crève, on me spolie, je n’en peux plus ! Mais il faut pas s’inquiéter mademoiselle, venez avec moi je vais m’occuper de vous. Vous faites de la musique ? Oui monsieur. Vous avez pris un billet de retour ? Non monsieur. Vous avez de l’argent dans votre compte en banque ? J’explose. Je lui vomis un flot d’exagération, ma grande spécialité. OUI MONSIEUR, l’argent je croule dessous, je roule sur l’or si vous voulez tout savoir, j’en dispose de tellement, je n’en connais même plus la valeur ! Moi monsieur, je peux dépenser 300 euros en 300 secondes et personne ne me dit rien monsieur !! Je suis money addict vous m’entendez ? Je devrais faire une detox si vous voulez mon avis ! Et mon nom monsieur, regardez bien mon passeport, vous avez vu tous les de ?? ça en France monsieur, ça veut dire que je suis richissime, plus riche que le président Monsieur, si vous voulez je vous emmène maintenant au distributeur je vous sors mille dollars ok ? Il est où le money supply, il est où ???? Vous allez voir monsieur !!! Vous savez qui c’est mon papa, vous savez qui c’est ????!!! Il est banquier mon père, PDG, et ouais, une énoooooorme banque, une banque internationale monsieur, la Banque Centrale Européenne vous connaissez ? Et ben en Europe, c’est la mère des banques monsieur, alors j’peux vous dire, l’argent il connait et il en brasse un paquet !!! Que de la gueule évidemment, mais j’ai remarqué que je ne suis jamais autant convaincante que lorsque je mens. Si j’avais été avocate, j’aurais été l’avocat du diable. J’aurais jamais pu défendre la veuve et l’orphelin, j’aurais chialé au bout de cinq minutes de plaidoirie. Ou pas. Bref. Avez-vous de la drogue dans vos bagages mademoiselle ? Non monsieur. Pourquoi souriez-vous mademoiselle ? Parce que tu me fais royalement chier espèce de connard, mais j’en suis à un point où s’en est presque devenu drôle… Tu, évidemment. Je souris parce que je sais que quoique je vous dise monsieur, vous allez ouvrir mes bagages un à un, comme l’ont fait avant vous les douaniers de mon précédent avion. Ça, c’était le mensonge le plus intelligent de toute la série. AH, vous avez déjà été fouillée mademoiselle ? Oui monsieur, à Charlotte, aux US, tous mes bagages, tous mes instruments, jusqu’au pied de micro que vous voyez, là messire, là ! Et je peux vous dire que question fouille, les ricains sont des professionnels, des vrais sniper. Mais vous voyez, je suis là, donc je suis clean…Très bien mademoiselle, vous pouvez y aller. YES !
Je sors en poussant mon charriot en courant, mes hôtes en me voyant paraissent soulagés, mais un tantinet énervés quand même, ce que je conçois parfaitement. En ce qui me concernait, j’étais au bord de la rupture… Dans la voiture, E m’explique qu’il ne faut absolument pas que je chante dans la rue, car il est officiellement garant de mon honnêteté aux yeux de l’immigration, et si jamais il m’arrive quoi que ce soit, il sera autant dans le pétrin que moi. Je fais donc une croix sur la musique au Canada, en me disant que je peux toujours bouger à NYC avec cette fois-ci un billet retour pour Paris. Nous arrivons dans la maison de mes généreux hôtes. C’est en plein quartier vert de Montréal, a deux pas du parc magnifique de Mont-Royal où je jogge tous les jours, Parc qui a été dessiné par le même architecte que Central Park. C’est aussi en plein centre, à deux pas de Guy et Saint-Catherine, deux des grandes rues principales de la ville. On me couche dans une chambre coquette, avec oh bonheur, oh joie, une baignoire dans la salle de bain !!!! Huit mois que je n’ai pas vu la couleur d’un bain moussant chaud !!!! LUUUUUUUUUUUUUUUUUXE !!! Mes hôtes sont open, tout est open, Anne tu es ici comme chez toi, tu te sers, tu viens, tu vas, nous on fait pas de chichis, on est o-pen !!! Chouette alors. Je me couche, bien bien bien nase.
Le lendemain quand je me lève, personne. Ça fait tout bizarre, mais je n’ose pas aller plus loin que la cuisine, la terrasse et ma chambre, je me sens encore très incrustée. Je vaque à diverses pages sur internet puis part faire la decouverte de la ville en courant. J’ai tout de suite un très bon feeling avec Montréal. Il y a de l’espace, beaucoup d’espace et ce n’est pas over-crowded. Et il y a du vert aussi, beaucoup de vert. Les gens sont gentils, relax, avenants, il fait beau, et les 15 degrés de cet après-midi de printemps me ravissent le cœur et l’épiderme. Je pars ensuite rejoindre Colin, un marin pro du laser rencontré sur facebook par hasard, toute seule comme une grande. On prend un starbuck évidemment (il y en a tous les cinq cent mètres ici, plus la concurrence !!!), et on s’en va visiter l’église Saint-Joseph sur le plateau, en haut de la côte des neiges. Je suis un peu sur les genoux à cause du jogging mais apprécie fort la compagnie de colin, qui est absolument charmant. Il ne m’attire pas , je rassure tout le monde, non je ne vais pas lui sauter dessus ! Il me raccompagne, je dîne, et me couche avec les poules, conformément à mon programme remise en forme. Le lendemain, c’est le jour où oh bonheur, je vais voir Caty Catherine, ma bonne copine, rencontrée avec Sophie à Salvador, j’en ai déjà parlé plus bas. Avant je déjeune avec ma maîtresse de maison, qui me raconte sa vie pendant que je lui raconte la mienne, et c’est passionnant. En fait je préfère dix fois plus rencontrer des adultes que des jeunes, tout simplement parce qu’ils ont deux fois plus de vécu, ils sont dix fois plus intéressant. J’ai toujours eu un contact plus facile avec les adultes. J’ai toujours adoré tous les parents de tous mes potes. Bref. Déjeuner de salade composée comme à la chayri, souvenirs souvenirs, je bois du petit lait, je suis comme un coq-en-pâte. C me dit qu’elle reçoit le lendemain le big big boss et ses amis, je propose de chanter, comme ça je me frotte au public Québécois, et rend un service à la lady of the house. Elle accepte, rendez-vous est pris le lendemain pour un tour de chant à l’apéro, pour des personnes dont je comprends qu’elle comptent beaucoup aux yeux de C. Je prie pour ne pas commettre d’impair, je suis d’une lignée de gaffeurs, et j’en fais parfois les frais. Je revois Catherine, on passe 4 heures trop sympas à discuter, catching up, à rigoler, je suis trop contente en la quittant. Je rentre, dîne bien sagement de riz blanc, féculents pour la course du lendemain matin. Sauf que le lendemain il pleut donc je ne cours pas. Le lendemain fut une journée folle et géniale.
Cela fait quatre jours que j’attends un message qui ne vient pas à cause d’une satanée tempête qui accapare toute l’attention des danois. Ce matin j’ouvre l’œil à 7h, me lève d’un bond et fonce sur l’ordi, et, il est là devant moi, le message que j’attends. Je le lis, en dandinant mes fesses de joie sur ma chaise, en poussant des soupirs de bonheur, je ne suis qu’émotions et frissons de félicité. Soudain, va savoir pourquoi, je pense au Yuku. Oh dear. Où est le Yukulélé ? Je le sens, je l’ai oublié à l’aéroport, c’est la faute de ces satanés douaniers, ils m’ont fait perdre tellement de temps que je me suis pressée, en courant avec mon charriot il dû tomber. Je le cherche partout dans la maison, en pleurant comme une perdue, en m’arrachant les cheveux de la tête. Il n’y a personne alors je me laisse aller au désespoir en sanglotant de toutes mes forces, j’évacue le stress, je décompresse, mais je suis triste, mon Dieu que je suis triste, je veux mouriiiiiiiiiiiiiiiiiiirrr ! En trente seconde je suis passée de la joie de vivre la plus totale, (je veux dire, qu’y a-t-il de plus jouissif que l’amour ?) au désespoir complet. Je n’en peux plus, je n’en peux plus ! Je vais faire un arrêt, c’est sûr, c’est écrit ! Il n’y a rien que je puisse faire pour contrôler mes émotions, rien ! Bref, toujours sanglotant, je prends le taureau par les cornes, j’appelle l’aéroport, et là, je suis mauvaise, méchante, je suis arrivée il y a deux jours dans votre foutu pays, comme quoi c’est un privilège de rentrer chez vous, on m’a traitée comme une criminelle, j’y ai perdu mon yuku, où est-il mais où est-il ??? Oui je sais, vous n’êtes que standardiste, alors à qui dois-je l’adresser pour crier, et être entendue ???!!!! La maîtresse de maison rentre à 8h30, sans doute de l’école de son fils, me voit dehors, clopant, pleurant et criant au téléphone, au petit matin. Elle me demande ce qu’il se passe, je lui dis, c’est affreux j’ai perdu mon Yukulélé, MAIS ! Il est peut-être dans votre voiture… Elle court, elle vole, je la suis, j’espère, je prie, elle sort, triomphale, mon Yukulélé du coffre, je luis saute au cou et la câline de toute mon affection. Elle a retrouvé mon Yuku, même s’il n’était pas perdu, je la bénis à tout jamais ! Je remonte au sommet du bonheur, en 30 secondes.
Ensuite je pars me mettre en quête d’adaptateur et de convertisseurs en tous genres pour le concert de ce soir. Je ramène ce qu’il me faut, mais rien ne marche. Heureusement, Gersande, la fille de C, n’a pas cours aujourd’hui, et oh bonheur, elle étudie en génie électrique, et c’est un génie tout court, m’est avis. Le matin même sa maman m’a montré un poème que sa fille avait écrit à huit ans, tout bonnement hallucinant de gravité, de profondeur et de talent littéraire…. Elle peint très bien aussi, et joue de la guitare, est savante comme dix et curieuse comme quarante. Dix-neuf ans, et quand je lui parle, j’ai l’impression que c’est moi la plus jeune des deux… Passionnante en tout cas. Bref. Gersande se propose de m’accompagner dans un magasin sérieux pour trouver mon bonheur. C’est l’occase pour nous de faire plus ample connaissance, on ne s’était parlées que dix minutes en tout et pour tout auparavant. Et bon, je découvre vraiment une jeune fille assez extraordinaire et j’accroche tout de suite, avec elle c’est trop agréable de parler, de tout et de rien, je me sens trop bien, comme avec Cathy. Je pensais que je préférais avoir des amis hommes, parce que j’en ai plus que de femmes, mais en fait je préfère avoir des amies femmes, seulement j’aime pas les chochottes, j’aime bien celles qui réfléchissent comme des hommes, j’aime pas les fifilles. Quatre frères, bon, ça s’explique. Bref, Gersande, Cathy, pas froid aux yeux, curieuses, pas de chichis, simples, franches et directes, moi, ça me plaît. Donc on passe une après-midi trop chouette à parler électricité et voyages, tout ce que j’aime.
Nous revenons, et bientôt c’est l’heure de la promise prestation. Le dîner est en grandes pompes, ça court dans tous les sens, fleuristes, serveuses, chef suisse qui a une femme brésilienne et avec qui ce fut un bonheur de parler portugais. Ce ballet de prestataires me fait penser aux grands jours du Saussay. L'un des prestataires, c'est le nettoyeur de tapis, tapis que j'ai tâché par maladresse, dans l'obscurité j'ai nettoyé, cru que tout était parti, que nenni! Il restait des tâches. Quand j'ai déjeuné avec C la veille, elle s'en est aperçue, et moi aussi du coup, mais j'étais tellement gênée, embarrassée, terrorisée, anéantie, que je n'ai pas eu le courage de me dénoncer. Ce n'est que quelques jours plus tard que j'ai avoué ma faute, contrite. C a été tellement gentille, elle ne m'a pas donné la fessée tant redoutée...! J'ai quel âge déjà? Ah oui, 25. Là j'en avait 6, comme l'un des choux que j'ai gardé... Quelle honte, quelle bêtise!!! Enfin... Les invités sont tous là, je branche. Je suis très très à l’aise, ça, c’est ma came. Huit paires d’yeux qui me regardent et m’écoutent. Pendant 40 minutes, je serai à eux, ils seront à moi, ils seront pour moi. J’ai quand même un trac de fou qui me fait glisser les doigts sur la guitare, mais je reste très relax quand il s’agit de parler et de raconter le voyage, l’année qui vient de s’écouler, les folies qu’il s’est passé. En quarante minutes je n’ai chanté que 5 chansons, ça vous laisse imaginer combien de temps j’ai raconté, mais ce fut, visiblement, pour le plus grand bonheur des convives et des maîtres de maison, et surtout pour mon plus grand bonheur, c'était tellement agréable! A la fin, C fait une standing ovation, la première de ma vie, la voir debout si contente, je n’en pouvais plus de joie. Cette famille me rend tellement heureuse par la chaleur et la décontraction de son accueil, que c’est trop de bonheur pour moi d’avoir eu à disposition les moyens d’à mon tour les rendre heureux l'espace d'un moment. Si on te donne il faut rendre comme dit la mère de mon pote. Papa Maman je vous vois venir, mais pourquoi fait-elle profiter de ses largesses aux autres et pas à nous ? Je répondrai, tout vient à point à qui sait attendre, last but not least, les derniers seront les premiers, le mois de juin, il est pour moi, mais il est aussi pour vous !
Dans l’enthousiasme général, Gersande et moi prenons congé, on va au resto. Gersande m’emmène dans le vieux Montréal, près du vieux port. Rues pavées, immeubles de haut standing, petites brasseries, petits cafés et restaurants, c’est beau et charmant. Nous dinons au café de l’aventure, c’est le nom qui m’a séduite. Dîner trop chouette, bon, déjà, et plein de découvertes, sur Gersande, la famille qui m’accueille, l’histoire, les jeunesses, etc…Et là pour une fois je ne rechigne pas à raconter les anecdotes que je raconte sans-arrêt, non, avec des gens qu’on apprécie vraiment, ça passe, ça le fait grave, je suis contente de tout, absolument tout dire à Gersande. Ce que j’adore dans les relations humaines, c’est lorsque deux personnes savent trouver le juste équilibre entre parler et écouter. Il n’y en a pas une qui parle tout le temps et l’autre rien, ou le contraire, non les deux échangent un même volume de récits, ou d’arguments, et dans ce cas, le dialogue est tellement sympathique, que l’on peut facilement comprendre que converser puisse parfois relever du domaine de l’artistique. ça me fait exactement le même effet avec dis moi oui. Nous revenons à la maison à une heure du mat’, et trouvons tout notre petit monde sur les digeos, de fort bonne humeur, qui nous accueillent à bars ouverts en nous disant à table, à table !! Nous nous asseyons, discutons, ils ont la gentillesse de m'encourager, ils questionnent, et je suis ravie que tout le monde soit tellement content du petit show, ils disent qu’ils ont trouvé ça génial, je suis dans mes petits souliers (en fait j’ai beau être dans un cadre magnifique, je ne quitte plus mes larges bottes de voile depuis trois jours, je les mets avec tout, jupe jean shorts salopette, elles ont une classe folle !). Les invités partent, on se retrouve en famille, Papa, Maman, Gersande et moi, champagne champagne, on est là tous les quatre, on écoute Jonhy Cleg, papa et Maman tapent des mains et dodelinent de la tête en rythme, on parle de tout et de rien, on se quitte pour aller se coucher, fatigués mais RA-VIS ; Et je m’entends dire avec bonheur que je peux rester tant que je veux, qu’on est réjoui de m’avoir accueilli, et que la porte sera toujours ouverte si je veux revenir. Il ne faudra pas me le dire deux fois madame !!! Avec vous on est si bien!
Et maintenant le jour se lève. J’ai écrit sans me relire 7 pages word, ça m’a pris 4h, c’est dur hein !!!! et là j’en ai bien encore pour une bonne demi-heure. J’vais café-clopper, j’ai bien mérité.
Revenons très brièvement sur l’épisode Saint-Maarten, ou alors, allons-y carrément, épiloguons. Saint-Maarten, dans l’absolu, j’ai détesté. Cette île est, de mon point de vue, le royaume du vice, une île de sauvages, c’est sea sex and sun, sex drugs and rock n’ roll, et peace and love. Sur le papier ça fait rêver, dans la réalité c’est une horreur, car ce n’est que ça. Saint-Maarten, ça n’est pas les Antilles. La culture caribéenne, on n’en voit même pas la couleur, juste l’odeur du rhum, duquel je me suis tenue sagement éloignée, fuyant à tout prix la vie nocturne et les prédateurs concupiscents qui rôdent le long des bars. Certes ça parle créole, ça mange du boudin, ça danse le zouk, ça boit de l’arrangé, mais tout cela est noyé dans le reste, dans la masse touristes ventripotents venus les bourses pleines, avec dans l’idée la ferme intention de se les vider. Pour eux, on a construit des complexes hôteliers, des résidences, des maisons à louer, dans les plus beaux endroits. On a tué ces endroits. Avant, la jeunesse, blanche et noire, venait y festoyer en pleine nature, là c’était vraiment rock n’ roll et peace and love ; sur la plage on jouait de la musique, on buvait du rhum coco, on fumait de la marie-jeanne et on dansait et chantait jusqu’à pas d’heure. La vie, la sensualité, l’ivresse de la liberté et de l’insouciance, c’était l’esprit cool et les good vibes des caraïbes. Mais, le touriste blanc, le red neck occidental à la retraite est arrivé savaté de ses air max toutes dégonflées par le poids des hamburgers accumulés dans sa grassouillette panse. Et mon Dieu, mais qu’il est chiant le touriste occidental retiré ! Il arrive et il dit, oh comme c’est joli, comme c’est sauvage et bon enfant, c’est gentil tout ça, ça chante, ça danse, ça s’amuse, la plage est belle, l’eau transparente, on va revenir plus souvent, et on en parle aux copains en rentrant ! On va montrer les photos ça sera plus probant ! Il rentre chez lui, il en parle aux copains, tout le monde rapplique et décide de passer régulièrement les vacances ; on investit. La où la nature est belle, on va mettre de la pierre et des barbecues géants, parce que c’est tellement plus sympa ! Ah oui mais par contre à 23h, coucouche panier papattes en rond ! Ah mais coucouche panier peux pas, il y a trop de bruit dehors… Bah on n’a qu’à faire interdire le bruit et la fête, de toute façon on est prio, c’est nous qu’on fait marcher le business maintenant ! Allez, dehors les jeunes, ou plutôt, dedans ! Oh et la plage aussi, le sable il est trop chaud, on peut pas s’asseoir dessus, ça va faire mal à nos gros popotins délicats, il faut des transats ! Et allez, des transats partout, et tu raques pour poser ta serviette ! Oh et puis si on mettait des casinos et des bars à putes, histoire de pourrir un peu plus l’ambiance ? Oh ouais, c’est bon ça ! Là où tout était libre et beau, ils ont mis leur grain de sel, et transformé l’île en club vioc géant. A dix heures du soir dans la marina de Marigot, tout est fermé, quand il y a quinze ans, ça dansait jusqu’au matin… Ils ont tout pourri, les nantis ! Et ça se proclame grands libérateurs des opprimés, ambassadeurs de la liberté, on croit rêver… Du coup la jeunesse se traîne entre les bars et les casinos, ça se drogue mais le bon esprit n’est plus là, le good spirit de Jah est parti en poussière, déterré par les pelleteuses… Jah est mort, le fucking oh my god l’a tué. Bref, saint-Maarten, c’est à chier, mais aussi surprenant que cela puisse paraître je ne suis pas du tout mécontente d’y avoir été. Et oui, car Saint-Maarten m’ a offert l’amour, avec en prime, la plus chouette chanson que j’aie jamais écrite de toute ma vie, de mon point de vue. Et ce n’est pas Martin le crazy thcèque par lequel est arrivée la flèche, comme présupposé, mais par en vidunderlig danske somand. Revenons sur Martin le tchèque. Je pense que j’ai fait une fixette sur Martin le tchèque. Sur le papier il correspondait à l’homme de mes rêves, mais dans la réalité, il faut l’admettre, on communique très difficilement. Et comme disent les cousines, la clef de la réussite d’une relation est dans la communication. Je pense que Martin a été pour moi un prétexte afin d’oublier celui qui me tenait encore au cœur, et de la perte duquel mon ego ne se remettait pas. Martin fut aussi un merveilleux prétexte pour éloigner les prédateurs que je ne trouvait pas à mon goût. Martin était une raison d’écrire une chanson. Martin était une raison. Martin était tout sauf quelqu’un dont j’étais réellement amoureuse, et je me mentais à moi-même, me berçait de la douce illusion de cette passion pour trouver encore un autre merveilleux sens à ma vie. Avec min eventyrlystne danske, et ben j’ai été complètement prise de cours, et je ne m’attendais pas du tout à tomber. La chute fut en fait une ascension vers le ciel, toute légère et transportée que je fus quand je découvris that I can’t help falling in love, non je ne pouvais pas m’en empêcher. Et je ne m’en empêchai pas. ( le passé simple est de retour, il m’avait manqué !). Je me suis laissée complètement aller, porter, charmer pour mon plus grand bonheur, dans cette île de malheur. Le danois quitté, comme d’habitude j’ai écrit une chanson, avec l’aide de Dave d’Alaska, et aussitôt échappée de son bateau (le bateau de Dave c’était comme la maison en pain d’épice dans Hansel et Gretel), je me suis cloitrée une nuit et une journée pour enregistrer la chanson et l’envoyer à son destinataire, et ma muse. Ma muse et moi allons nous revoir, pour ma plus grande joie, et, quand viendra le départ, pour mon plus grand désespoir. Mais la vie est ainsi faite, il y a un temps pour s’a-muse-r, un temps pour travailler, et moi l’année prochaine, j’ai décidé de bosser, pour de vrai ! Non Papa, Maman, ne sabrez pas le champagne, ne sautez pas de joie, ne remerciez pas tous les Saints que vous avez prié pour moi, quand je dis bosser, ça veut juste dire que je vais retourner chanter sur les routes, mais en ayant un peu plus de suite dans les idées, cette fois-ci. J’ai fait mes armes cette année, je me suis fait les ongles, je m’en vais faire rentrer le métier de voyageuse et de chanteuse jusque dans la moelle de mes os. Docu docu, me voici me voilà, attends moi bien au chaud, je m’occupe de toi dès le moi de juin !
En attendant, je vais prendre le frais, au Canada !
Mais pourquoi le Canada ???
Je veux du froid et des gens civilisés. La américains sont too much, les scandinaves, too far, allons au Québec, allons voir ces gens qui parlent un français tellement sympa et poétique. Le bonheur que ça va être de chanter devant eux, tabernacle !! (4 jours que je suis à Montréal, et je crois que je suis la seule à utiliser ce mot, je ne l’ai pour le moment entendu de la bouche d’absolument personne). Me voilà donc à l’aéroport de nouveau, avec moitié moins de bagages cette fois-ci, mais toujours autant de problèmes. L’envoi de mes bagages par cargo en France ayant pris un peu de temps, je me retrouve encore à courir après mon avion. J’arrive la dernière à l’intérieur, comme d’hab, et là, je veux passer dans les rangs et donc mettre ma guitare sur le ventre mais HORREUR ! Ma guitare n’est plus sur mon dos, et la porte se referme. Je pousse un huuuurlement, je lâche tout, je me rue sur la porte, passe ric-rac, tout ça sans rien expliciter, devant des hôtesses qui ont les yeux qui leurs sortent de la tête, je sors en vociférant tous bras en l’air hold the plaaaaaaaaaaaaaaane I will be baaaaaaaaaaaack ! Je trace en quatrième vitesse à la douane, j’avais oublié la guitare dans le scan…. Faut dire qu’ils m’ont fait la fouille corporelle et tout le tralala, pour la quarantième fois, j’étais un peu en panique d’être là en train de me faire avertir qu’on allait me caresser les fesses alors que mon avion était sur le point de partir. Caresse et pis c’est tout, suis pas en sucre for God sick ! Les attouchements terminés j’ai juste détalé comme un lapin en ramassant tout ce que j’avais sous la main, et la guitare n’était pas loin, mais pas à portée de main. Je l’ai oubliée, je l’ai oubliée ! Je n’en reviens pas. Bref je l’attrape, et je vole jusqu’à l’avion, qui enfin peut s’envoler à son tour. Quatre heures plus tard, j’atterris à Charlotte, en Caroline du nord. Mon vol pour Montréal est dans deux heures. Je débarque, repasse la douane, me fait tamponner le passeport bien à la perpendiculaire s’il vous plait madame, je suis une passeport maniac ! Là clairement, j’ai vingt minutes avant le prochain vol, autant dire toute la vie, à mon échelle. J’ai le temps de prendre un Starbuck madame ? Oui mais en vitesse ! Je fais le café cloppe le plus surréaliste de mon voyage, là, au beau milieu de la Caroline du Nord, mais qu’est-ce que je fabrique en Caroline du Nord ? C’est endroit sur cette terre où je n’aurais jamais pensé mettre les pieds un jour. Bref, je ne pense pas au fait que je doive repasser une douane, et que c’est la même pour tous les avions. Je fais la queue sagement en me disant c’est bon, jusqu’au moment où je regarde à la montre de mon voisin (je suis passée experte dans l’art), et là, panique, il est moins cinq, l’avion part à cinq, et une vingtaine de personnes devant moi. Branle-bas de combat, cette fois-ci dans le calme, on ne va pas utiliser la méthode panique, on va tout prendre à revers. Excusez moi monsieur, bien le bonjour, que vous êtes joli, que vous me semblez beau, j’ai pu constater qu’il était 19h55, et voyez vous, sur mon billet, là, il est inscrit que mon avion prendra le ciel dans dix minutes, auriez-vous l’infinie bonté et l’extrême obligeance de bien vouloir me laisser me glisser devant vous ? Mais bien sûr mon petit pot de miel, après toi ! Et là, fouille au corps, le retour, évidemment (je bipe à chaque fois à cause de mes bracelets qui ne s’enlèvent pas, et là, j’avais une salopette short avec des boutons partout partout, poitrine, dos, haut des fesses et les douanières passaient et repassaient leurs mains et leurs machines, toutes paniquées par les multiples bips qui émanaient de ma personne). Je re-détale comme un lapin, arrive en dernière toute essoufflée, suant comme une vache, et vais me poser dans mon siège. A côté de moi, au bonheur, personne, je m’étale et je dors.
J’arrive au Canada en me disant, le plus dur est derrière moi, le meilleur est à venir. Je me fourrais le doigt dans l’œil jusqu’à l’épaule. J’arrive au canada, on me dit mademoiselle suivez-moi, nous allons à l’immigration. Et pourquoi ça ??? Je ne suis pas immigrée moi, je suis globbe-trotteuse, je ne vois pas ce que j’irais faire à l’immigration ! C’est comme ça pour toutes les personnes dont c’est la première visite mademoiselle. Ah bon d’accord, très bien. Je vais à l’immigration. Là on me pose tout un tas de questions que je trouve extrêmement indiscrètes ; quel travail exerciez vous en France, êtes vous encore sous contrat, et… COMBIEN AVEZ-VOUS D’ARGENT SUR VOTRE COMPTE EN BANQUE ? C’est une blague ? Je suis obligée de répondre ? Ecoutez mademoiselle, entrer au Canada c’est un privilège. Vous voulez-dire que c’est une galère ouais, je retourne aux states, c’était plus simple !….Tu, bien évidemment. Nous voulons juste nous assurer que vous ne serez pas dans le besoin…Oh mais c’est trop aimable à vous ! Rassurez-vous, tout va bien madame, je suis loin d’être nécessiteuse. Loin à hauteur de quel montant mademoiselle ? 500 madame. Mytho. Etes-vous en mesure de le prouver ? Absolument pas ! Avez-vous un billet de retour mademoiselle. Non, je les prends toujours last minute comme ça c’est moins cher. Mademoiselle je suis désolée mais je ne suis pas en mesure de vous faire rentrer dans le pays, nous allons devoir vous extrader. Vous vous payez ma tête, très certainement !...Tu, évidemment. Et pourquoi cela madame ? Parce que vous avez le profil idéal du travailleur clandestin, aller-simple et pas d’argent, néanmoins, où vous logerez- vous mademoiselle ? Je suis reçue chez Môssieur E. R-L madame, avocat à la cour madame. Alors gare à ton cul sale chienne ! Tu, évidemment….Avez-vous son numéro mademoiselle. Oui madame, le voici. Très bien, patientez, je l’appelle. Mademoiselle Saint-Pierre ? de Saint-Périer madame, c’est mon nom comme il se doit prononcer. Et visiblement c’est tout ce qu’il me reste, soyez gentille de ne pas l’écorcher, merci du peu….Tu, évidemment. Ça ne répond pas mademoiselle, veuillez patienter, je vais consulter mon collègue. Je vais patienter madame. Je patiente. Le téléphone sonne. Service d’ l’immigration d’l’aéroport d’Montréal j’écoute ? Bonsoir monsieur. Oui elle est ici. Pouvez-vous nous dire combien de temps elle reste ? Si elle est dans le besoin pourrez vous la soutenir financièrement ? Merci monsieur, nous terminons la procédure et vous l’envoyons. Tralalalèèèreu, tu l’as dans l’os ma vieille, tu fais moins la maligne là, il est passé où tout le privilège du Canada ?... Tu, évidemment. Merci madame, je n’aurais jamais pensé qu’il fut tant compliqué d’entrer chez vous, si j’avais su… Au plaisir !
ça fait déjà 1h30 que mes gentils hôtes m’attendent à la sortie.
Qui sont mes gentils hôtes ? Tout simplement le fils du voisin de mes parents et sa femme, lui grand avocat, et elle directrice de l’événementiel d'une grande marque. Très gentiment ils ont proposé de m’héberger, ce que j’ai accepté avec bonheur, n’ayant aucun plan pour me loger. Grand bien m’en a pris, sinon je retournais en France, ou pire encore sur l’île de la tentation…Merci Papa Maman, merci mes gentils voisins, et merci mes gentils hôtes !
Mais mon calvaire n’est pas fini, je dois passer une autre douane. Il y a deux douaniers, un qui est occupé à défaire la valise d’un mec, et un autre qui baille au corneille et a sans doute décidé de s’octroyer une pause, j’arrive, je sens gros comme une maison au bout de deux secondes que je vais poireauter en attendant que l’autre termine avec son type, le paresseux n’a visiblement pas envie de travailler. Et là, comme dans tex avery, vous savez quand le bébé a un visage impassible, et que tout d’un coup il lui sort des geysers de larmes des yeux, alors qu’il devient tout rouge. Pareil. Debout, là, désespérée, je n’ai plus d’autre solution, plus de ressources, plus de nerfs, plus de force, je chiale comme un moutard. Le douanier s’approche. Bah qu’est-ce qu’il vous arrive mademoiselle ? ça fait deux heures que j’attends de sortir monsieur, il y a des gens qui attendent pour moi aussi dehors, et on m’humilie, et on me traite comme une criminelle, on me crève, on me spolie, je n’en peux plus ! Mais il faut pas s’inquiéter mademoiselle, venez avec moi je vais m’occuper de vous. Vous faites de la musique ? Oui monsieur. Vous avez pris un billet de retour ? Non monsieur. Vous avez de l’argent dans votre compte en banque ? J’explose. Je lui vomis un flot d’exagération, ma grande spécialité. OUI MONSIEUR, l’argent je croule dessous, je roule sur l’or si vous voulez tout savoir, j’en dispose de tellement, je n’en connais même plus la valeur ! Moi monsieur, je peux dépenser 300 euros en 300 secondes et personne ne me dit rien monsieur !! Je suis money addict vous m’entendez ? Je devrais faire une detox si vous voulez mon avis ! Et mon nom monsieur, regardez bien mon passeport, vous avez vu tous les de ?? ça en France monsieur, ça veut dire que je suis richissime, plus riche que le président Monsieur, si vous voulez je vous emmène maintenant au distributeur je vous sors mille dollars ok ? Il est où le money supply, il est où ???? Vous allez voir monsieur !!! Vous savez qui c’est mon papa, vous savez qui c’est ????!!! Il est banquier mon père, PDG, et ouais, une énoooooorme banque, une banque internationale monsieur, la Banque Centrale Européenne vous connaissez ? Et ben en Europe, c’est la mère des banques monsieur, alors j’peux vous dire, l’argent il connait et il en brasse un paquet !!! Que de la gueule évidemment, mais j’ai remarqué que je ne suis jamais autant convaincante que lorsque je mens. Si j’avais été avocate, j’aurais été l’avocat du diable. J’aurais jamais pu défendre la veuve et l’orphelin, j’aurais chialé au bout de cinq minutes de plaidoirie. Ou pas. Bref. Avez-vous de la drogue dans vos bagages mademoiselle ? Non monsieur. Pourquoi souriez-vous mademoiselle ? Parce que tu me fais royalement chier espèce de connard, mais j’en suis à un point où s’en est presque devenu drôle… Tu, évidemment. Je souris parce que je sais que quoique je vous dise monsieur, vous allez ouvrir mes bagages un à un, comme l’ont fait avant vous les douaniers de mon précédent avion. Ça, c’était le mensonge le plus intelligent de toute la série. AH, vous avez déjà été fouillée mademoiselle ? Oui monsieur, à Charlotte, aux US, tous mes bagages, tous mes instruments, jusqu’au pied de micro que vous voyez, là messire, là ! Et je peux vous dire que question fouille, les ricains sont des professionnels, des vrais sniper. Mais vous voyez, je suis là, donc je suis clean…Très bien mademoiselle, vous pouvez y aller. YES !
Je sors en poussant mon charriot en courant, mes hôtes en me voyant paraissent soulagés, mais un tantinet énervés quand même, ce que je conçois parfaitement. En ce qui me concernait, j’étais au bord de la rupture… Dans la voiture, E m’explique qu’il ne faut absolument pas que je chante dans la rue, car il est officiellement garant de mon honnêteté aux yeux de l’immigration, et si jamais il m’arrive quoi que ce soit, il sera autant dans le pétrin que moi. Je fais donc une croix sur la musique au Canada, en me disant que je peux toujours bouger à NYC avec cette fois-ci un billet retour pour Paris. Nous arrivons dans la maison de mes généreux hôtes. C’est en plein quartier vert de Montréal, a deux pas du parc magnifique de Mont-Royal où je jogge tous les jours, Parc qui a été dessiné par le même architecte que Central Park. C’est aussi en plein centre, à deux pas de Guy et Saint-Catherine, deux des grandes rues principales de la ville. On me couche dans une chambre coquette, avec oh bonheur, oh joie, une baignoire dans la salle de bain !!!! Huit mois que je n’ai pas vu la couleur d’un bain moussant chaud !!!! LUUUUUUUUUUUUUUUUUXE !!! Mes hôtes sont open, tout est open, Anne tu es ici comme chez toi, tu te sers, tu viens, tu vas, nous on fait pas de chichis, on est o-pen !!! Chouette alors. Je me couche, bien bien bien nase.
Le lendemain quand je me lève, personne. Ça fait tout bizarre, mais je n’ose pas aller plus loin que la cuisine, la terrasse et ma chambre, je me sens encore très incrustée. Je vaque à diverses pages sur internet puis part faire la decouverte de la ville en courant. J’ai tout de suite un très bon feeling avec Montréal. Il y a de l’espace, beaucoup d’espace et ce n’est pas over-crowded. Et il y a du vert aussi, beaucoup de vert. Les gens sont gentils, relax, avenants, il fait beau, et les 15 degrés de cet après-midi de printemps me ravissent le cœur et l’épiderme. Je pars ensuite rejoindre Colin, un marin pro du laser rencontré sur facebook par hasard, toute seule comme une grande. On prend un starbuck évidemment (il y en a tous les cinq cent mètres ici, plus la concurrence !!!), et on s’en va visiter l’église Saint-Joseph sur le plateau, en haut de la côte des neiges. Je suis un peu sur les genoux à cause du jogging mais apprécie fort la compagnie de colin, qui est absolument charmant. Il ne m’attire pas , je rassure tout le monde, non je ne vais pas lui sauter dessus ! Il me raccompagne, je dîne, et me couche avec les poules, conformément à mon programme remise en forme. Le lendemain, c’est le jour où oh bonheur, je vais voir Caty Catherine, ma bonne copine, rencontrée avec Sophie à Salvador, j’en ai déjà parlé plus bas. Avant je déjeune avec ma maîtresse de maison, qui me raconte sa vie pendant que je lui raconte la mienne, et c’est passionnant. En fait je préfère dix fois plus rencontrer des adultes que des jeunes, tout simplement parce qu’ils ont deux fois plus de vécu, ils sont dix fois plus intéressant. J’ai toujours eu un contact plus facile avec les adultes. J’ai toujours adoré tous les parents de tous mes potes. Bref. Déjeuner de salade composée comme à la chayri, souvenirs souvenirs, je bois du petit lait, je suis comme un coq-en-pâte. C me dit qu’elle reçoit le lendemain le big big boss et ses amis, je propose de chanter, comme ça je me frotte au public Québécois, et rend un service à la lady of the house. Elle accepte, rendez-vous est pris le lendemain pour un tour de chant à l’apéro, pour des personnes dont je comprends qu’elle comptent beaucoup aux yeux de C. Je prie pour ne pas commettre d’impair, je suis d’une lignée de gaffeurs, et j’en fais parfois les frais. Je revois Catherine, on passe 4 heures trop sympas à discuter, catching up, à rigoler, je suis trop contente en la quittant. Je rentre, dîne bien sagement de riz blanc, féculents pour la course du lendemain matin. Sauf que le lendemain il pleut donc je ne cours pas. Le lendemain fut une journée folle et géniale.
Cela fait quatre jours que j’attends un message qui ne vient pas à cause d’une satanée tempête qui accapare toute l’attention des danois. Ce matin j’ouvre l’œil à 7h, me lève d’un bond et fonce sur l’ordi, et, il est là devant moi, le message que j’attends. Je le lis, en dandinant mes fesses de joie sur ma chaise, en poussant des soupirs de bonheur, je ne suis qu’émotions et frissons de félicité. Soudain, va savoir pourquoi, je pense au Yuku. Oh dear. Où est le Yukulélé ? Je le sens, je l’ai oublié à l’aéroport, c’est la faute de ces satanés douaniers, ils m’ont fait perdre tellement de temps que je me suis pressée, en courant avec mon charriot il dû tomber. Je le cherche partout dans la maison, en pleurant comme une perdue, en m’arrachant les cheveux de la tête. Il n’y a personne alors je me laisse aller au désespoir en sanglotant de toutes mes forces, j’évacue le stress, je décompresse, mais je suis triste, mon Dieu que je suis triste, je veux mouriiiiiiiiiiiiiiiiiiirrr ! En trente seconde je suis passée de la joie de vivre la plus totale, (je veux dire, qu’y a-t-il de plus jouissif que l’amour ?) au désespoir complet. Je n’en peux plus, je n’en peux plus ! Je vais faire un arrêt, c’est sûr, c’est écrit ! Il n’y a rien que je puisse faire pour contrôler mes émotions, rien ! Bref, toujours sanglotant, je prends le taureau par les cornes, j’appelle l’aéroport, et là, je suis mauvaise, méchante, je suis arrivée il y a deux jours dans votre foutu pays, comme quoi c’est un privilège de rentrer chez vous, on m’a traitée comme une criminelle, j’y ai perdu mon yuku, où est-il mais où est-il ??? Oui je sais, vous n’êtes que standardiste, alors à qui dois-je l’adresser pour crier, et être entendue ???!!!! La maîtresse de maison rentre à 8h30, sans doute de l’école de son fils, me voit dehors, clopant, pleurant et criant au téléphone, au petit matin. Elle me demande ce qu’il se passe, je lui dis, c’est affreux j’ai perdu mon Yukulélé, MAIS ! Il est peut-être dans votre voiture… Elle court, elle vole, je la suis, j’espère, je prie, elle sort, triomphale, mon Yukulélé du coffre, je luis saute au cou et la câline de toute mon affection. Elle a retrouvé mon Yuku, même s’il n’était pas perdu, je la bénis à tout jamais ! Je remonte au sommet du bonheur, en 30 secondes.
Ensuite je pars me mettre en quête d’adaptateur et de convertisseurs en tous genres pour le concert de ce soir. Je ramène ce qu’il me faut, mais rien ne marche. Heureusement, Gersande, la fille de C, n’a pas cours aujourd’hui, et oh bonheur, elle étudie en génie électrique, et c’est un génie tout court, m’est avis. Le matin même sa maman m’a montré un poème que sa fille avait écrit à huit ans, tout bonnement hallucinant de gravité, de profondeur et de talent littéraire…. Elle peint très bien aussi, et joue de la guitare, est savante comme dix et curieuse comme quarante. Dix-neuf ans, et quand je lui parle, j’ai l’impression que c’est moi la plus jeune des deux… Passionnante en tout cas. Bref. Gersande se propose de m’accompagner dans un magasin sérieux pour trouver mon bonheur. C’est l’occase pour nous de faire plus ample connaissance, on ne s’était parlées que dix minutes en tout et pour tout auparavant. Et bon, je découvre vraiment une jeune fille assez extraordinaire et j’accroche tout de suite, avec elle c’est trop agréable de parler, de tout et de rien, je me sens trop bien, comme avec Cathy. Je pensais que je préférais avoir des amis hommes, parce que j’en ai plus que de femmes, mais en fait je préfère avoir des amies femmes, seulement j’aime pas les chochottes, j’aime bien celles qui réfléchissent comme des hommes, j’aime pas les fifilles. Quatre frères, bon, ça s’explique. Bref, Gersande, Cathy, pas froid aux yeux, curieuses, pas de chichis, simples, franches et directes, moi, ça me plaît. Donc on passe une après-midi trop chouette à parler électricité et voyages, tout ce que j’aime.
Nous revenons, et bientôt c’est l’heure de la promise prestation. Le dîner est en grandes pompes, ça court dans tous les sens, fleuristes, serveuses, chef suisse qui a une femme brésilienne et avec qui ce fut un bonheur de parler portugais. Ce ballet de prestataires me fait penser aux grands jours du Saussay. L'un des prestataires, c'est le nettoyeur de tapis, tapis que j'ai tâché par maladresse, dans l'obscurité j'ai nettoyé, cru que tout était parti, que nenni! Il restait des tâches. Quand j'ai déjeuné avec C la veille, elle s'en est aperçue, et moi aussi du coup, mais j'étais tellement gênée, embarrassée, terrorisée, anéantie, que je n'ai pas eu le courage de me dénoncer. Ce n'est que quelques jours plus tard que j'ai avoué ma faute, contrite. C a été tellement gentille, elle ne m'a pas donné la fessée tant redoutée...! J'ai quel âge déjà? Ah oui, 25. Là j'en avait 6, comme l'un des choux que j'ai gardé... Quelle honte, quelle bêtise!!! Enfin... Les invités sont tous là, je branche. Je suis très très à l’aise, ça, c’est ma came. Huit paires d’yeux qui me regardent et m’écoutent. Pendant 40 minutes, je serai à eux, ils seront à moi, ils seront pour moi. J’ai quand même un trac de fou qui me fait glisser les doigts sur la guitare, mais je reste très relax quand il s’agit de parler et de raconter le voyage, l’année qui vient de s’écouler, les folies qu’il s’est passé. En quarante minutes je n’ai chanté que 5 chansons, ça vous laisse imaginer combien de temps j’ai raconté, mais ce fut, visiblement, pour le plus grand bonheur des convives et des maîtres de maison, et surtout pour mon plus grand bonheur, c'était tellement agréable! A la fin, C fait une standing ovation, la première de ma vie, la voir debout si contente, je n’en pouvais plus de joie. Cette famille me rend tellement heureuse par la chaleur et la décontraction de son accueil, que c’est trop de bonheur pour moi d’avoir eu à disposition les moyens d’à mon tour les rendre heureux l'espace d'un moment. Si on te donne il faut rendre comme dit la mère de mon pote. Papa Maman je vous vois venir, mais pourquoi fait-elle profiter de ses largesses aux autres et pas à nous ? Je répondrai, tout vient à point à qui sait attendre, last but not least, les derniers seront les premiers, le mois de juin, il est pour moi, mais il est aussi pour vous !
Dans l’enthousiasme général, Gersande et moi prenons congé, on va au resto. Gersande m’emmène dans le vieux Montréal, près du vieux port. Rues pavées, immeubles de haut standing, petites brasseries, petits cafés et restaurants, c’est beau et charmant. Nous dinons au café de l’aventure, c’est le nom qui m’a séduite. Dîner trop chouette, bon, déjà, et plein de découvertes, sur Gersande, la famille qui m’accueille, l’histoire, les jeunesses, etc…Et là pour une fois je ne rechigne pas à raconter les anecdotes que je raconte sans-arrêt, non, avec des gens qu’on apprécie vraiment, ça passe, ça le fait grave, je suis contente de tout, absolument tout dire à Gersande. Ce que j’adore dans les relations humaines, c’est lorsque deux personnes savent trouver le juste équilibre entre parler et écouter. Il n’y en a pas une qui parle tout le temps et l’autre rien, ou le contraire, non les deux échangent un même volume de récits, ou d’arguments, et dans ce cas, le dialogue est tellement sympathique, que l’on peut facilement comprendre que converser puisse parfois relever du domaine de l’artistique. ça me fait exactement le même effet avec dis moi oui. Nous revenons à la maison à une heure du mat’, et trouvons tout notre petit monde sur les digeos, de fort bonne humeur, qui nous accueillent à bars ouverts en nous disant à table, à table !! Nous nous asseyons, discutons, ils ont la gentillesse de m'encourager, ils questionnent, et je suis ravie que tout le monde soit tellement content du petit show, ils disent qu’ils ont trouvé ça génial, je suis dans mes petits souliers (en fait j’ai beau être dans un cadre magnifique, je ne quitte plus mes larges bottes de voile depuis trois jours, je les mets avec tout, jupe jean shorts salopette, elles ont une classe folle !). Les invités partent, on se retrouve en famille, Papa, Maman, Gersande et moi, champagne champagne, on est là tous les quatre, on écoute Jonhy Cleg, papa et Maman tapent des mains et dodelinent de la tête en rythme, on parle de tout et de rien, on se quitte pour aller se coucher, fatigués mais RA-VIS ; Et je m’entends dire avec bonheur que je peux rester tant que je veux, qu’on est réjoui de m’avoir accueilli, et que la porte sera toujours ouverte si je veux revenir. Il ne faudra pas me le dire deux fois madame !!! Avec vous on est si bien!
Et maintenant le jour se lève. J’ai écrit sans me relire 7 pages word, ça m’a pris 4h, c’est dur hein !!!! et là j’en ai bien encore pour une bonne demi-heure. J’vais café-clopper, j’ai bien mérité.